Le retour de Conan le Barbare chez Marvel (on peut, sans doute, parler d’un retour au bercail) est l’une des curiosités de ce début d’année 2019. La licence américaine (en France, les textes de Robert E. Howard sont tombés dans le domaine public, ce qui permet à Glénat de travailler aussi sur le perso) a quitté Dark Horse pour revenir vers l’éditeur qui l’avait importé dans les comics il y a presque cinquante ans. Mais pour faire quoi ? Premiers éléments de réponse dans cet épisode signé Aaron et Asrar.
Scénario de Jason Aaron
Dessins de Mahmud Asrar
Parution aux USA le mercredi 2 janvier 2019
Au demeurant, il est tentant de rapprocher le parcours des comics de Conan avec ceux de Star Wars. Les deux licences ont en effet été d’abord adaptées chez Marvel, y ont connu un succès certain, avant que l’éditeur laisse filer les licences, qu’elles se retrouvent progressivement chez Dark Horse Comics pendant une longue durée. Et les voilà toutes les deux revenues sous l’égide de Marvel. Même parcours, d’accord, mais pas même problématique. D’une part l’esthétique de Star Wars vient des films, c’est la référence de base, qui fait qu’au fil des ans les artistes employés par Dark Horse n’ont pas ressenti le besoin de forcément se définir par rapport à Carmine Infantino (ou autres noms associés avec la version Marvel). Et puis la réintégration de Star Wars chez Marvel après le passage Dark Horse tombait à peu près au même moment que la décision de ne plus automatiquement considérer les dérivés antérieurs comme éléments de l’univers étendu. Star Wars revenu chez Marvel, c’était le début d’une phase 3 dans la continuité des comics concernés. Conan, c’est un autre exercice. D’abord parce qu’en dehors de quelques illustrations de Frazetta et de vieux pulps, tout restait à inventer dans le langage visuel de Conan quand Marvel, sous l’impulsion de Roy Thomas, s’est penché dessus. Cela implique une sorte de sentiment « propriétaire » sur une certaine esthétique. D’ailleurs, là pour le coup, même à l’époque Dark Horse, un certain nombre de dessinateurs (pas tous, attention) suintaient la référence à Buscema ou à Alcala. Par ailleurs, il n’y a pas cette fois l’aspect « reboot partiel » qui accompagnait Star Wars. C’est donc par une double page de montages que Conan revient chez Marvel, à coups de vignettes empruntées à Barry Windsor-Smith, John Buscema ou Alfredo Alcala. Ce long préambule pour vous dire que l’équation ici est différente et que tous les efforts déployés pour démontrer aux incrédules qu’il y a une légitimité impliquent par conséquent une question : comment faire du neuf alors que dans le même temps on invoque le Conan « canal historique ».
La réponse est évidente dans ce premier numéro : en n’empêchant pas les auteurs de conserver leurs caractéristiques. En apparence, bien sûr, Jason Aaron donne tous les gages nécessaires de fidélité du mythe. Dans tel passage son phrasé prend soin de respecter le ton Howardien. Dans tel autre l’archétype de sorcière dira bien des choses à ceux qui n’ont pas beaucoup fréquenté les romans mais se souviennent des films. Ça, c’est le premier degré. En surface, Jason Aaron – qui avait en son temps relancé Star Wars chez Marvel – montre qu’il est compatible avec le monde du Cimmérien. En sous-couche, sans contredire cela, il explique aussi qu’il peut le faire en ne se reniant pas. En un sens ce Conan The Barbarian #1 est bien plus « Aaronien » que l’était Star Wars #1, écrit un peu à la façon des Thor God of Thunder du même auteur. Il joue avec les époques. On aussi bien dans le même récit le jeune Conan que sa version devenue plus vieille, King Conan, là où ailleurs Aaron utilise le jeune Thor et son futur vieillissant, devenu roi. Aaron fait donc feu de tout bois et d’emblée la tactique permet de démontrer qu’il est chez lui dans le monde de Conan, sans pour autant avoir besoin de forcer pour que cela rentre. Il est la bonne pointure qu’il fallait.
La tâche est sans doute plus dure pour Mahmud Asrar. Non pas qu’il démérite, bien au contraire. Mais comme dit plus haut, avec Conan, il y a un poids esthétique existant (là où Aaron, en plus du reste, n’a pas forcément besoin de se définir par rapport à Roy Thomas, par exemple). Asrar lorgne donc sur LE Conan de Buscema mais à sa sauce. Bien sûr, la coupe de cheveux, le pagne en fourrure et la musculature sont là. Mais le dessinateur réutilise aussi avec brio le « regard noir » du barbare. Pour ce qui est de la scénographie, il nous livre un monde exotique et ensoleillé, formant un excellent tandem avec le coloriste Matthew Wilson. Mais c’est bien dans la scénographie et ce qu’on pourrait qualifier d’expression des matières que Asrar excelle. Les drapés s’animent, occupent l’espace, accompagnent le mouvement. Sans minimiser ce qui a pu se faire chez Dark Horse (ou le regard oblique apporté par Glénat ces derniers mois), le Conan nouveau de Marvel est dans d’excellentes mains, jouant la carte de la fidélité sans sentir le boulot de commande.
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