Ben Grimm et Johnny Storm voulaient voyager à travers les mondes pour retrouver la trace des autres Fantastic Four. Mais leur périple a viré au cauchemar. Les voici privés de leurs pouvoirs et piégés dans une réalité alternative où ils doivent se fondre dans la population. Normaux et reclus dans une ferme, les deux anciens héros… hé mais n’aurions-nous pas déjà vu ça quelque part ?
Scénario de Chip Zdarsky
Dessins de Ramon Perez
Parution aux USA le mercredi 25 juillet 2018
Sur la couverture, The Thing et Human Torch se tiennent dans une pose similaire à celle du fameux tableau American Gothic de Grant Wood, déjà détourné maintes fois par des comics, et pas des moindres (un numéro d’Elektra Assassin, entre autres, vient à l’esprit). Mais ne vous y laissez pas prendre. La référence se fait par véritable ricochet. Ce n’est pas simplement Grant Wood qui est visé mais, à travers lui, le Black Hammer de Jeff Lemire, publié chez Dark Horse (et en France chez Urban Comics). C’est, en quelque sorte, l’histoire de l’arroseur arrosé. Dans Black Hammer, Jeff Lemire s’est employé à détourner la Justice League, à l’écrire comme DC ne l’aurait pas laissé faire. Mais à la course aux hommages et aux pastiches, on peut jouer à plusieurs. Avec une forme d’humour sous-jacent, Chip Zdarsky fait donc dans ce Marvel Two-In-One #8 une allusion tellement marquée à Black Hammer qu’elle ne peut être accidentelle. Mieux, elle est pour ainsi dire assumée. Johnny Storm et Ben Grimm sont piégés dans une autre dimension et ont donc choisi de vivre repliés dans une petite ferme en attendant de retourner chez eux. Mais les points de concordance ne s’arrêtent pas là, même le fait que Ben Grimm excelle dans la normalité et tourne autour de la serveuse du restaurant local est un écho à diverses scènes de Black Hammer, Ben remplaçant du coup le personnage de Slam. A l’inverse, bien qu’en apparence moins similaire, Johnny Storm représente les personnages de Black Hammer qui ne veulent pas de la normalité et qui ne se remettent pas de la perte de leurs pouvoirs. L’allusion, à ce degré de précision, est amusante. Mais tout cela resterait un simple pastiche si Zdarsky n’avait pas réellement besoin de ménager un espace intime pour que les deux principaux protagonistes puissent avoir une conversation nécessaire pour l’avenir du titre. Ils sont, dans le même temps, bien loin de se douter qu’une certaine équipe s’est lancée à leur recherche.
« Me without powers is… less. You without powers… »
Ramon Perez représente ce véritable exercice de style sans chercher à émuler, pour le coup, l’identité visuelle de Black Hammer. Ses personnages, essentiellement humains, sont cependant représentés dans un style très expressif, dans une sorte de soleil couchant permanent qui évoque lui aussi les grands noms de la peinture américaine. Mais les couleurs de Federico Blee sont régulièrement un peu trop massives, noient la subtilité du dessin. On prendra pour exemple la page d’ouverture où l’on voit Johnny : si l’on fait l’effort de regarder seulement le trait de Ramon Perez puis que l’on observe ensuite tout ce que Blee a rajouté comme volumes inexistants dans le dessin, la page est comme réécrite. La couleur ne vient pas véritablement collaborer le trait, elle vient le réécrire. L’épisode aurait gagné à avoir une palette bien plus légère et moins interventionniste. Reste cependant que, globalement, Marvel Two-In-One #8 fait avancer les choses et devrait satisfaire, au premier degré, les amateurs de la série. A un autre niveau, c’est aussi une (re)lecture qui amusera les fans de Black Hammer.
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