Avec Savage Dragon, Erik Larsen continue de raconter une épopée familiale. Attention, il ne s’agit pas d’une série que vous allez lire au coin du feu, avec le petit dernier s’émerveillant des saillies de Malcom Dragon et de son épouse. Mais une épopée familiale quand même, dans le cheminement du héros, des héros d’ailleurs si l’on reprend la chronologie du titre. Pour preuve cet épisode où, entre deux combats, Malcom, proprement né dans cette série, doit assumer ses propres responsabilités paternelles.
Scénario d’Erik Larsen
Dessins d’Erik Larsen
Parution aux USA le mercredi 7 mars 2018
La formule-type du comic-book feuilletonesque, que l’on parle d’un récit de western, de SF ou de super-héros, repose souvent sur la résolution du cliffanger de l’épisode précédent (s’il y a lieu) puis d’un bref retour au statuquo social avant de lancer le nouveau combat/la nouvelle problématique qui va occuper la fin du numéro. Typiquement, après avoir survécu à une chute après que le Vulture l’ai balancé du ciel, Peter Parker va passer manger une crêpe chez Tante May avant de réaliser qu’il faut aller taper sur Docteur Octopus. Et là vous dîtes « Fournier il est bien gentil mais il a TOTALEMENT oublié qu’il est en train de chroniquer Savage Dragon et JUSTEMENT PAS Spider-Man ». Et justement c’est tout l’enjeu de ce qu’Erik Larsen fait sur Savage Dragon. C’est à dire que sa trame scénaristique tend à raconter des moments de vie des héros, avec des combats pensés comme des interludes, l’important restant la vraie vie sociale des personnages. Exemple cette fois avec une scène où Malcom reprend conscience et passe une page entière à discuter avec des « civils » du meilleur moyen de rentrer chez lui. La saga, dans la série Savage Dragon, elle se passe dans le foyer du héros, le reste n’étant qu’un peu d’épices venant s’ajouter sur ce plat principal. Erik Larsen a été le dessinateur d’Amazing Spider-Man dans les années 80, succédant à Todd McFarlane. A l’époque, Mary Jane Watson passait des pages en nuisette à attendre Spider-Man, comme un aveu d’impuissance à représenter une vie de famille de super-héros autrement que par une vague volonté sexy tout en ne voulant rien montrer d’autre de la vie de famille.
« Can I play Spider-Man? »
En 1992, Erik Larsen s’est émancipé de Marvel, est devenu l’un des co-fondateurs d’Image et a lancé Savage Dragon sur une base régulière. Une des premières menaces affrontées par son colosse vert était un monstre-araignée, une sorte d’ogre se nourrissant d’enfants, comme un doigt d’honneur à l’adresse de Spider-Man et de Marvel. En 2018, Savage Dragon a eu le temps de devenir père et c’est maintenant le fils, Malcom, qui est non seulement devenu la vedette de la série mais aussi père de famille. Le ton est peut-être plus apaisé – bien que Larsen ne se prive pas d’être iconoclaste à l’occasion – mais le message, bien que servi d’une autre manière, demeure. Fasciné par les héros de sa propre enfance, Larsen refuse pour autant de céder à la nostalgie. Produire Savage Dragon, ce n’est pas faire Spider-Man. Il y a dans ce numéro un passage qui le dit expressément à la façon d’une parabole. A sa manière le héros descend d’un Peter Parker, mais un Parker qui privilégie encore plus l’évolution de la famille (peut-être même encore plus qu’un Robert Kirkman sur Walking Dead ou Invincible). Sous ses aspects parfois potaches (et en particulier une épouse véritablement obsédée), Savage Dragon continue de raconter l’évolution d’un foyer. Peut-être que le seul trop-plein qu’on puisse reprocher à la série c’est la multiplication des enfants/petits-enfants de Savage Dragon (en en rajoutant encore via une réalité alternative), ce qui a tendance à banaliser un peu les choses. Il faudrait qu’assez vite ce qui se passe dans la Dimension X trouve une personnalité propre. Mais sinon Savage Dragon #232 est un épisode exemplaire de la série, qui montre bien ce qui la distingue vite des autres.
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