French Collection #18

[FRENCH] Blue Beetle est un des multiples personnages secondaires de l’histoire du comic. Mais il possède plusieurs caractéristiques qui en font un personnage à part. Il est ainsi le super héros publié par le plus grand nombre d’éditeurs. Retour sur les multiples vies du personnage qui cache encore une surprise.

Initialement publié par le Fox Feature Syndicate, Blue Beetle devient la propriété de la société Hollyoke. Celle-ci était l’imprimeur de Victor Fox. Dans la débâcle financière de ce dernier, l’imprimeur se « paya sur la bête » en s’appropriant certaines propriétés de Fox lors des procédures de faillite. C’est le cas de Blue Beetle qu’Holyoke continua de publier dans son propre magazine en continuant la numérotation du titre de Fox (du numéro 19 au numéro 30).

Fox de retour aux affaires, racheta ses actifs (dont la propriété des personnages) en indemnisant ses créanciers à hauteur d’un tiers de ses dettes. Le titre continue sa numérotation initiale et reprend au numéro 31 pour s’achever au numéro 60. Mais « The King of the Comics » comme il aimait se proclamer fit définitivement faillite. Cette fois-ci c’est l’éditeur Charlton qui racheta les droits de l’éditeur en faillite et relança le personnage dans Space Adventures #13 daté de Octobre/Novembre 1954. Le personnage bénéficie de son propre titre qui commence au numéro 18. En fait, il s’agit du titre The Thing! qui est rebaptisé au nom du personnage. Mais très rapidement le personnage original est jugé trop désuet. Son titre s’arrête au numéro 21 et il bénéficie d’une dernière apparition dans Nature Boy #3. Mais le personnage n’est pas abandonné pour autant. L’équipe créatrice de Charlton le transforme radicalement quelques années plus tard en lui donnant l’identité d’un archéologue possédant un artefact mystique (et non plus celle d’un policier tirant ses pouvoirs d’une vitamine extraordinaire). Cette période pris fin lorsque le personnage fut modernisé sous l’influence de l’artiste Steve Ditko qui venait de claquer la porte de Marvel pour causes de désaccords artistiques avec Stan Lee. L’archéologue Dan Garet mourut héroïquement et le jeune Ted Kord utilisa ses talents d’ingénieur et sa fortune pour devenir le nouveau Blue Beetle.

Il faut également ajouter un autre éditeur lors de la période Charlton. I.W. Publishing, le « bandit reprint publisher » spécialisé dans les rééditions illégales, publiera en 1958 des rééditions des aventures de Blue Beetle chez Fox dans son titre The Human Fly.

Charlton en proie lui aussi à des difficultés financières cessa la publication de sa ligne de comics nommée Action Heroes. Blue Beetle fit alors l’objet d’une licence avec Americomics (éditeur spécialisé dans le revival des personnages du Golden Age) pour un an. A l’issue de cette année, Charlton fut définitivement déclaré en faillite et l’intégralité de ses propriétés intellectuelles fut achetée par DC Comics. La petite histoire veut que le CEO de DC Comics de l’époque ait effectué ce rachat pour faire plaisir à Dick Giordano. Ce dernier qui était le Chief Editor de Charlton et le créateur de la ligne Action Heroes était entre temps passé chez DC. Mais comme il conservait une affection particulière pour ces héros il a été décidé de racheter les droits de ses créations auxquelles il était particulièrement attaché. Les personnages de la ligne Action Heroes seront quasiment tous relancés par DC Comics, sans compter le projet d’Alan Moore qui deviendra The Watchmen et qui initialement devait utiliser les personnages de Charlton.

Blue Beetle est donc le personnage du comic field qui a connu le plus d’éditeurs avec six différents à son actif. Mais nous pensons qu’il fa falloir augmenter ce score et ceci grâce aux Editions Mondiales (ceci sans compter le maquillage des épisodes de Superman qui a fait l’objet d’une étude dans French Collection #12). En effet, suite à la fin de l’épisode The Men in the black robe (dont le début est manquant) dans L’Aventureux numéro 36 de 1941 et L’Audacieux n° 22 de 1941 débute un nouvel épisode. Il faut tout d’abord indiquer que Blue Beetle a été rebaptisé indifféremment « Le Surhomme » ou « Geo Mérillac ». Il est probable que cette « francisation » est en partie liée à la volonté de faire passer la bande pour une création française et éviter tous problèmes avec la commission de censure.

Le début de ce nouvel épisode semble être la traduction d’un épisode américain. Dan Garret (devenu Marc Rosset) et Mike Mannigan (devenu Louis Girard) sortent du commissariat. Mike qui a été blessé au bras part en congé alors que Dan part en patrouille. Mais très rapidement, le style du dessin change, ce qui est très inhabituel dans un épisode américain. Au-delà de ce changement de style, l’histoire devient extrêmement invraisemblable. Dans un passage Blue Beetle nage avec une jeune fille dans les bras tout en maintenant la mâchoire d’un crocodile ouverte car il lui a coincé le pied dedans. De la même manière l’épisode livre un passage ou Blue Beetle ramène un sous-marin vers la côte en la tractant au moyen de son ancre ! Il est possible de s’interroger sur la présence d’une ancre sur un submersible. Enfin, au-delà de l’aspect extrêmement rocambolesque de l’intrigue (mais il faut avoir en tête que certains scénarios de la période Fox ne brillaient pas par leur cohérence) l’épisode est d’une longueur très inhabituelle pour un comic.

A la fin de cet épisode, Blue Beetle décide de partir en vacances avec Viviane (la jeune fille en détresse de l’épisode précédent). Mais peu de temps après, il est appelé par la police qui lui demande d’enquêter sur des événements mystérieux au studio national de cinéma.

Ce nouvel épisode ne sera publié que dans L’Audacieux. La bande ayant disparu des numéros de L’Aventureux, sans doute victime des autorités d’occupation. Le numéro 36 de L’Audacieux voit donc Blue Beetle se rendre au studio national de cinéma pour disparaître à son tour sans que le lecteur français ne sache jamais ce qu’il était devenu la fin de l’épisode n’ayant jamais été publiée. Visiblement, le héros ne possède plus réellement d’identité secrète et est connu sous le nom de Geo Mérillac et n’apparaît plus jamais en « civil ». Dans la continuité de l’épisode précédent, il semble qu’il ne s’agit plus de traduction d’épisodes américains mais de planches réalisées par un artiste français.

Les avatars de Blue Beetle en France furent donc nombreux, divers et variés et méritent que les spécialistes de l’histoire des comics s’y penchent un peu.

[Jean-Michel Ferragatti]
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