Mais la réalité rattrape très souvent la fiction et peu après la publication de Mad #4 (1952 Series) William Gaines, propriétaire d’EC Comics l’éditeur de Mad #4 (1952 Series), reçoit un courrier de cease & desist de National Publications. Cette procédure judiciaire très commune aux États-Unis enjoint un professionnel de cesser une activité que le propriétaire d’un droit (copyright notamment) considère comme violant ses droits. En cas de réitération, le destinataire s’expose à des poursuites judiciaires. DC Comics était connu pour régulièrement utiliser cette procédure mais également pour effectivement poursuivre les « contrevenants » et gagner ses procès (le premier et plus célèbre étant le litige Wonderman contre le Fox Features Syndicate).
Les ventes de Mad #4 (1952 Series) étant excellentes visiblement grâce à l’épisode de Superduperman, William Gaines interroge l’avocat historique de son père qui était l’ancien associé d’All-American Publications avec les propriétaires de National Publications. Cet avocat, qui du fait de ses liens est également l’avocat historique de National Publications, lui conseille d’abandonner la publication de parodie visant des personnages sous copyright.
Mais Harvey Kurtzman consulte d’autres avocats qui ont des avis divergents. EC Comics décide alors de ne pas obtempérer au cease & desist. La rédaction décide même de continuer et la même équipe réitèrera son galop d’essai dans Mad #9 (1952 Series) avec l’épisode Bat Boy and Rubin!, donnant ainsi naissance à un genre bien à part dans l’histoire des comics et dans lequel elle excellera.
Sans réaction de National Publications EC Comics s’attaque à de nombreuses autres icônes de la pop culture et des médias. C’est ainsi que la couverture de Mad #11 (1952 Series) est une parodie du magazine Life. Mais cette fois-ci, un procès aura lieu. La direction du prestigieux magazine attaque EC Comics pour plagiat. Fort heureusement, les juges énonceront dans un arrêt fondateur le droit à la parodie en application de la théorie du fair use. Les épisodes de Superduperman! et Bat Boy and Rubin! sont disponibles en français dans les deux excellentes anthologies publiées par Urban Comics : Mad présente Superman & Mad présente Batman.
Une dizaine d’années plus tard, après la renaissance de la branche comics de Martin Goodman sous le nom de Marvel, Stan Lee commencera à se moquer des productions concurrentes dans ses diverses rubriques (courrier des lecteurs, Stan Lee Soapbox, etc.).
À partir de Fantastic Four #43 (1961 Series) apparaît le terme « Brand Echh » que nous pouvons traduire par « marque ixch » avec une forte connotation négative. Ce terme est dérivé de l’appellation Brand X qui venait du monde des agences publicitaires où il était utilisé dans les publicités comparatives sans citer le nom du concurrent.
Très rapidement va naître dans les esprits de Stan Lee, Roy Thomas & Gary Friedrich l’idée de lancer un magazine satirique spécialisé dans les parodies de comics dans le genre des pionniers de Mad (1952 Series).
Dans le milieu de l’année 1967 apparaît donc dans les kiosques Not Brand Echh (1967 Series). Ce n’est pas la première fois que le groupe de presse de Martin Goodman (propriétaire de l’éditeur Marvel) se lance sur le créneau des magazines satiriques. Stan Lee a déjà été la cheville ouvrière de titres comme Crazy (1953 Series), Wild (1954 Series), Riot & Snafu (1955 Series) dans les années cinquante. Il s’agissait alors d’imitation de Mad (1952 Series). Mais c’est la première fois que la nouvelle génération d’auteurs justement biberonnés à Mad (1952 Series) et aux comics en général va s’attaquer exclusivement au genre des super-héros redevenu majeur à cette époque.
Le sommaire des treize numéros de Not Brand Echh (1967 Series) sera un festival d’invention parodiant à la fois les personnages de l’éditeur lui-même. C’est une nouveauté : aucun autre éditeur n’ayant versé dans l’autodérision. Mais on reconnaît aussi beaucoup de ses concurrents (DC Comics, Tower Comics, Western Publishing, Archie Comics), des personnages « défunts » (le Captain Marvel originel, The Spirit, The Green Hornet) ainsi que des personnages d’autres médias (cinéma, télévision, etc.).
En France, trois des épisodes de Not Brand Echh (1967 Series) seront publiés par l’éditeur nordiste Artima – Arédit dans les n° 2 à 4 de Spoof 1ère série. Il s’agit de The Origin of… The Fantastical Four & The Origin of… Stuporman paru dans Not Brand Echh #7 (1967 Series) et Where Stomps the Scent-y paru dans Not Brand Echh #9 (1967 Series).
Le premier est bien sûr une reprise hilarante mais assez conforme de l’origine de Fantastic Four. Le deuxième est visiblement inspiré de l’épisode de Superduperman! publié dans Mad #4 (1952 Series). Mais la fin est extraordinaire. Après avoir renvoyé sur Krypton tous les clones et copie de lui-même pour rester unique, Stuporman découvre que son monde a été envahi par les super-héros Marvel ! Enfin, le troisième épisode est une parodie de Captain Marvel [Mar-Vell] rebaptisé Captain Marvin avec des références à Mr Mind & Captain Marvel (avec également une apparition de Billy Batson) alors même qu’ils étaient encore dans les limbes des personnages de comics.
Il est d’ailleurs intéressant de voir que les épisodes sont publiés en France dans Spoof 1ère série. En effet, après l’arrêt de Not Brand Echh (1967 Series), Stan Lee relancera des comics humoristiques avec Spoof (1970 Series), Crazy (1973 Series) qui rééditera des épisodes de Not Brand Echh (1967 Series) & Arrgh! 1974 Series). Mais bien sûr Marvel ne sera pas le seul éditeur à éditer des comics parodiques. Néanmoins, il sera sans doute le plus direct dans son approche. Comme nous le verrons dans un prochain French Collection sur la série Inferior Five, DC Comics aura une approche assez différente.
D’ailleurs, par un superbe renversement comme l’histoire des comics et de la bande-dessinée en connaissent, les personnages de DC Comics & Marvel seront parodiés dans un épisode de Superdupont dessiné par Neal Adams dans Fluide Glacial n° 80.
Merci à vous tous d’avoir été fidèles à French Collection pendant ces 200 numéros. Soyez patriote et payez vos impôts en retard comme Superdupont afin de donner 10 % de plus à la patrie (et c’est un directeur fiscal qui vous le dit). À défaut, restez fidèles à French Collection pour les 200 prochains numéros (si la Direction Générale des Finances Publiques n’a pas eu raison de moi dans l’intervalle).
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