French Collection #230

[FRENCH] Cette semaine, une chronique surprise dans la continuité de notre série consacrée aux scénarios duplicatifs dans les voyages temporels qui montre que DC Comics n’était pas le seul à exploiter ce filon. Alors qu’il est pour une fois au calme, Tony Stark est happé par une rafale d’énergie. Il pense immédiatement qu’il est de nouveau victime du système de téléportation du Mandarin (cf. French Collection #228). Happé par le faisceau, il n’a pas le temps de se saisir de la valise contenant son armure d’Iron Man. C’est donc dans son costume civil (même s’il dissimule sa plaque thoracique) qu’il apparaît au XXIVe siècle pour se retrouver devant une assemblée de juge.

Il apprend qu’il a été transporté dans le futur par une sonde temporelle afin d’être exécuté pour délivrer le futur du tyran Cerebrus. Il s’agit en fait d’un ordinateur que Tony Stark a inventé pour coordonner les actions de défenses des Etats-Unis. Dans les années suivant sa mise en service, les gouvernements successifs le développèrent afin de s’en servir pour résoudre toute sorte de problème. Mais bien entendu, la machine acquis une conscience propre et des moyens de se développer par elle-même. Les hommes perdirent le contrôle de leur création qui très rapidement les domina. Les humains se séparèrent alors en deux catégories. D’une part des zombies asservis de Cerebrus et d’autre part des résistants qui se révoltèrent contre le tyran mécanique.

Ce sont ces derniers qui ont capturé Tony Stark et veulent l’exécuter afin que sa mort l’empêche de créer la machine. Il leur fait alors remarqué qu’ils comptent sur un paradoxe temporel pour régler le problème alors même que sa mort n’empêchera peut être pas la création de la machine, ce qui est fort probable si l’on en croit les différentes théories scientifiques qui veulent qu’une invention naît d’un environnement de recherche et pas d’un homme seul et que par exemple si Einstein était mort avant d’avoir énoncer sa théorie de la relativité d’autres savants qui travaillaient sur le même courant de pensée l’aurait trouver mais un peu plus tard.

Il leur propose alors de le renvoyer dans le passé en ayant connaissance de la dangerosité de Cerebrus afin qu’il fasse tout pour éviter sa création. Mais ses juges / bourreaux refusent. En effet, la machine repère toutes les fluctuations énergétiques de la planète. Ils ont déjà pris un risque en utilisant la sonde temporelle pour le faire venir. Une deuxième utilisation les ferait repérer à coup sûr. Cet argument ne résiste d’ailleurs pas à une analyse logique. Même si Cerebrus repère la deuxième fluctuation d’énergie la conséquence du retour de Tony dans le passé devrait effacer le futur dans lequel les résistants se trouvent.

Mais Tony Stark n’a de toute façon pas le temps de développer cet argument car les tentacules chercheurs de Cerebrus font irruption dans la pièce car elles ont repéré la première fluctuation énergétique. Dans la panique, Tony Stark s’enfuit désemparé. Il est alors rejoint par Krylla, une jeune et jolie historienne qui s’était opposé aux plans des résistants. En effet, ce n’est pas tant l’invention de Cerebrus par Stark qui est le problème mais les améliorations des gouvernements successifs qui se sont déchargé sur lui de la résolution de leurs problèmes jusqu’à créer un monstre surpuissant.

En tant qu’historienne, elle connaît tout le dédale de couloir dans lequel ils sont réfugiés. Elle va non seulement le faire échapper aux résistants qui le poursuive mais l’amener dans un musée ou se trouve un modèle de l’armure d’Iron Man qu’il va immédiatement revêtir. La scène nous apprend plusieurs choses. Premièrement c’est que Krylla ne sait pas que Tony Stark & Iron Man sont une seule et même personne. Cela contredit donc les événements ultérieurs comme Civil War pendant lesquels Stark a révélé son identité secrète. Il est également possible de penser qu’en 400 ans cette information s’est perdue, ce qui est toutefois assez peu probable au regard du retentissement de ces événements.

La deuxième, c’est que comprenant qu’il va devoir sa vie à un musée, Tony Stark jure de subventionner tous les musées existants. La troisième c’est que la plaque thoracique qu’il porte sur lui va permettre de recharger l’armure exposée. Redevenu The Golden Avenger, Stark rentre avec Krylla dans un des tentacules chercheurs afin de remonter vers l’unité centrale. Il va bien entendu affronter des systèmes de défenses puis tellement énerver Cerebrus que ce dernier va « l’aspirer » jusqu’à la salle centrale pour l’affronter. D’abord en lui envoyant des robots puis en se matérialisant lui-même sous une forme énergétique afin de l’affronter.

Cerebrus est tellement puissant qu’Iron Man [Tony Stark] est mis en déroute. Il ne doit son salut qu’au fait qu’il se démasque. Comprenant qu’il affronte son propre créateur, Cerebrus est confronté à ce que nous appellerions aujourd’hui une référence circulaire. Iron Man [Tony Stark] veut le détruire. Mais en même temps, s’il le tue il risque de provoquer un paradoxe temporel qui aura pour conséquence de le faire disparaitre car il n’aura jamais été créé.

L’ordinateur étant momentanément paralysé par une boucle logique, Krylla profite de l’opportunité pour lancer une bombe qu’elle a trouvé au musée dans l’unité centrale. Cerebrus détruit, elle peut renvoyer Tony dans le passé. Revenu au XXe siècle à la seconde de son enlèvement, Tony Stark se rend compte qu’il n’a pas rêvé car il porte toujours l’armure qu’il a trouvée au XXIVe siècle et se souvient de tout. L’épisode s’arrête sans nous dire ce que compte faire Tony Stark vis-à-vis de l’ordinateur qui deviendra Cerebrus.

Au-delà de notre thématique de redondance des scénarii qui cette fois-ci s’exprime entre deux éditeurs, l’épisode est très intéressant par certains thèmes qu’il anticipe. Premièrement, concernant les thématiques de redondance des scénarii nous pouvons voir que cet épisode reprend pas mal des thèmes déjà évoqué lors de nos dernières chroniques. Comme dans les épisodes de Green Lantern [Hal Jordan] (cf. French Collection #223), Tony Stark est transporté dans le futur par une sorte de conseil.

Mais cette fois-ci ce n’est pas pour assumer le rôle d’un sauveur mais pour être éliminé. Même si au final, Stark sauvera la société du futur en réendossant son rôle d’Iron Man que personne n’est capable de reprendre. Comme dans les épisodes de Green Lantern [Hal Jordan] il combattra un ordinateur qu’il a contribué à créer et qui en s’éveillant à une conscience propre domine les humains. En cela l’épisode ressemble également à celui de Rip Hunter the Time Master que nous avons étudié la semaine dernière.

Non pas que nous suspections Archie Goodwin, le scénariste d’Iron Man (1968 Series) #5, d’avoir copié les épisodes de DC Comics. Non, simplement la thématique de science-fiction qui relie tous ces épisodes était en fait dans l’air du temps et tous les scénaristes de comics s’y sont abreuvé. Ce qui donne un air de ressemblance à ces épisodes. Néanmoins, comme nous l’avons indiqué, cet épisode d’Iron Man est intéressant car il anticipe certains thèmes que nous retrouvons dans plusieurs œuvres télévisuelles & cinématographiques mais bien entendu dans des comics.

Le thème de la boucle logique qui paralyse Cerebrus avait été brillamment illustré dans l’épisode de la série The Prisoner dans l’épisode The General ou The Number Six détruit un ordinateur en lui posant la question « Why » (l’épisode a été diffusé en 1967 et l’épisode d’Iron Man est publié en 1968). Cerebrus anticipe par sa thématique un projet réel de défense qui est Arpanet. Ce projet de la défense nationale américaine prévoit l’interconnexion des systèmes de défense des USA afin de résister à une attaque nucléaire soviétique suivi d’une guerre mondiale. Ce projet est maintenant plus connu pour être l’ancêtre d’internet mais il a donné naissance au film WarGames en 1983 qui raconte la « prise de pouvoir » du WOPR (War Operation Plan Response), un ordinateur doté d’une intelligence artificielle qui prend le contrôle de la force nucléaire américaine.

Enfin, bien que totalement inexploité par Marvel, l’épisode Frenzy In a Far-Flung Future! d’Iron Man (1968 Series) #5 anticipe de nombreuses thématiques que nous retrouverons dans le crossover Age of Ultron avec Tony Stark dans le rôle d’Hank Pym et Cerebrus dans celui d’Ultron. Il est dommage que cet épisode ait été visiblement totalement oublié des équipes scénaristiques de Marvel. En France, cet épisode a été publié dans Strange 1ère série n° 5 par l’éditeur lyonnais Lug. L’épisode à même l’honneur de la couverture du fascicule.

A noter que dans la version française, les rencontres d’Iron Man [Tony Stark] contre le Mandarin n’ayant pas été publié par l’éditeur (pour des raisons que nous avons déjà détaillé à plusieurs reprises liées à leur caractère anticommuniste et à l’influence du Parti Communiste Français dans la commission de censure de la loi de 1949) la référence a été remplacée par celle de son origine en Corée (même si l’explosion d’une mine n’a pas grand-chose à voir).

A noter également que l’éditeur lyonnais a opté pour une traduction extrêmement dépouillé du titre de l’épisode anglais. Frenzy In a Far-Flung Future! devenant simplement Un délirant saut dans le futur. Les traducteurs de l’éditeur Panini ont fait plus d’effort en adoptant le titre Hourvari dans le futur ! Le dictionnaire nous apprenant que Hourvari est une ruse qu’emploie le gibier lorsqu’il revient sur ses voies pour tromper les chiens (dictionnaire Larousse).

Enfin, bien que cet épisode soit comme nous l’avons malheureusement resté sans descendance, il est a noté que Cerebrus eut cependant droit à une autre petite heure de gloire lorsque sa forme énergétique physique se retrouvera en autocollant dans l’album Superheros de l’Agence Générale d’Editions (AGE) en 1981 sous la dénomination : Clint ! Rien que cette dernière anecdote méritait bien une chronique !

[Jean-Michel Ferragatti]

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