French Collection #257

 [FRENCH] Cette semaine, nous allons étudier un classique du silver age qui fait suite à une de nos récentes chroniques. L’ère moderne de Marvel Comics a commencé six mois auparavant avec la publication de Fantastic Four #1 (1961 Series) suite à une commande de l’oncle et patron de Stan Lee, Martin Goodman. La légende (et un peu l’histoire) veut que ce dernier est appris par un des responsables de son diffuseur en jouant au golf que la meilleure vente de son concurrent DC Comics était Justice League of America (1961 Series). Il faut dire que suite à l’arrêt d’Atlas, sa propre structure de distribution, puis la liquidation d’American News Company (ANC) son nouveau distributeur Goodman a été contraint d’aller mendier la distribution de ses titres à Independent News. Mais même si Goodman a des relations anciennes avec cette société dans laquelle il a débuté, il n’en reste pas moins que le distributeur est en fait une filiale de l’un de ses principaux concurrents, National Periodical Publications (qui deviendra ultérieurement DC Comics). La société accepte donc de prendre les comics Atlas à condition qu’il n’en publie que huit par mois. Or, Martin Goodman était un « suiveur ». C’est-à-dire que dès qu’il voyait un genre fonctionné, il submergeait les kiosques de publication de ce genre avec des titres très proches.

Il s’agissait donc d’une stratégie de volume qui ne pouvait fonctionner avec huit titres mensuels. Néanmoins, Goodman essaya néanmoins de poursuivre sa stratégie à moindre échelle en publiait 16 titres bimensuels (au lieu des plus de 60 titres qu’il publiait avant la liquidation d’ANC). Fin 1961, il débarque donc dans le bureau de son neveu d’Editor après son parcours de golf et lui ordonne de lancer un titre d’équipe de super-héros. Il a déjà choisi les membres de l’équipe en misant sur ses vieilles gloires. L’équipe sera donc constituée de Captain America [Steve Rogers] & Bucky [Bucky Barnes], Human Torch [Jim Hammond] & Toro [Thomas Raymond] & The Submariner et ce malgré l’échec qu’avait constitué leur retour quelques années auparavant (cf. French Collection #251 & 253).

Mais Stan Lee est dans une période de doute. Il commence à se lasser de ces scénarios répétitifs qu’il est obligé d’écrire pour vivre. Et il a toujours en tête son grand œuvre. Ce roman marquant de la littérature américaine qu’il compte écrire. N’as-t-il pas choisi le pseudonyme de Stan Lee pour sa production de comics afin de conserver son nom civil de Stanley Lieber pour la « vraie » littérature. Il est également un peu amer de voir certains de ses anciens scénaristes avoir réussi leur reconversion littéraire comme Mickey Spillane, Daniel Keyes ou Patricia Highsmith. Selon une autre légende (et sans doute aussi d’un peu l’histoire) il s’en ouvre à son épouse qui le pousse à écrire le comics dont il rêve. De toute façon, il n’a rien à perdre puisqu’il souhaite quitter cette activité.

Stan Lee créé donc Fantastic Four #1 (1961 Series) en partie juste de cette envie. Les études les plus récentes ainsi que des procédures de justices remettent en cause cette version et mettent en avant le rôle de Jack Kirby dans cette création. Quoi qu’il en soit, contrairement aux instructions de son oncle (et patron) la série ne comprend aucun des personnages voulus. La seule « concession » est l’introduction d’un Human Torch moderne en suivant en cela la tendance qu’avait inaugurée Julius Schwartz chez DC Comics. Ceci, sans que le créateur du personnage Carl Burgos n’en soit ni informé (quand bien même il avait participé au dernier revival) ni bien entendu intéresser financièrement. Cet état de fait le conduira, comme sa fille en témoignera, à brûler l’intégralité des originaux qu’il possédait devant ce qu’il considérera toujours comme une spoliation pure et simple.

Le succès aidant, la nécessité d’élargir le vivier de personnage va imposer l’idée initiale de Martin Goodman. C’est ainsi que Fantastic Four #4 (1961 Series) arbore The Submariner en couverture. A la fin de l’épisode précédent, Human Torch [Johnny Storm] a décidé de quitter le quatuor après une énième dispute avec The Thing [Ben Grimm]. Les trois membres restant du groupe se mettent donc dans ce nouveau numéro à la recherche de leur benjamin. Mais c’est The Thing [Ben Grimm] qui le découvre dans un garage et engage une nouvelle confrontation. Johnny s’enfuit une nouvelle fois et trouve refuge dans un hôtel fréquenté par des marginaux. Sur place, il trouve un comics de The Submariner.

omme un des pensionnaires voit qu’il s’intéresse au personnage il réveille un vieillard pour qu’il montre sa force extraordinaire à Johnny. Mais le vieil homme qui se désole de ne plus rien se rappeler le balaie d’un revers de main. Une bagarre générale s’en suit et Johnny est obligé de s’interposer pour éviter un lynchage. Il propose alors de le raser pour voir à qui il ressemble vraiment. Et là, bien entendu le visage qui surgit est celui de The Submariner. Johnny comprend que le brouillard qui obscurcit l’esprit du Submariner est dû au manque d’eau. Il le plonge dans la mer et le contact avec son élément redonne toute sa vigueur et sa mémoire à Namor.

Malheureusement, il découvre que son royaume a été entièrement détruit et est radioactif. Il en déduit que les hommes de la surface ont réalisé des tests nucléaires et que son peuple à fuit (nous apprenons à cette occasion de manière assez surprenante que les Atlanteans sont insensibles aux radiations). Namor est désespéré car incapable de savoir où se trouve son peuple et décide de se venger des hommes de la surface en commençant par la ville de son bienfaiteur. The Submariner va donc réveiller Giganto afin de raser New-York. Les Fantastic Four se reforment et tentent d’arrêter les deux envahisseurs. Namor tombe immédiatement amoureux d’Invisible Girl [Sue Storm] et propose d’arrêter son action si elle consent à l’épouser. Elle refuse et le quatuor réussit malgré tout à arrêter The Submariner & Giganto.

Cet épisode n’est pas en contradiction avec les derniers épisodes de Namor publié quelques années auparavant. Le caractère du Submariner est assez conforme à celui du personnage d’origine. Ce n’est en effet pas la première fois qu’il réagit à une agression contre son peuple en laissant une invasion. L’intérêt pour les femmes de la surface n’est pas non plus nouveau et Sue Storm ressemble physiquement à Betty Dean, son premier amour. Enfin, le caractère emporté du personnage qui fait de lui l’un des premiers anti-héros du comic est toujours présent. Cette fois-ci, le retour du personnage est gagnant. Il revient deux numéros après en s’alliant avec l’ennemi emblématique des Fantastic Four.

Malgré tout, le personnage conserve un aura héroïque notamment grâce à son sens de l’honneur et aux sentiments qu’il éprouve pour Sue Storm. Le personnage se développe et nous apprenons ainsi que Namor possède des pouvoirs supplémentaires grâce à sa faculté de copier les pouvoirs d’autres créatures marines. Il est ainsi capable d’émettre de l’électricité comme une anguille ou qu’il dispose d’un sens radar (ceci deux ans avant la création de Daredevil [Matt Murdock]). The Submariner est également capable de commander et d’utiliser d’autres créatures marines que Giganto tels qu’un poisson télépathe, un poisson hyptnotiseur, une éponge qui absorbe le feu, une sorte de corail extrêmement coupant ou un champignon « expansif ».

Nous apprenons également que le prince des mers est richissime puisque tous les trésors reposant aux fonds des mers et des océans lui appartiennent. Il fera d’ailleurs usages de cette fortune pour essayer de piéger les Fantastic Four dans Fantastic Four #1 (1961 Series) #9. Il reviendra dans Fantastic Four #1 (1961 Series) #14 en étant sous le contrôle d’un autre ennemi de l’étonnant quatuor. Son rôle sera également majeur dans la réapparition d’un autre personnage majeur du golden age et très rapidement du silver age dont nous reparlerons bientôt dans French Collection.

En France, les apparitions de The Submariner ont été publiées de nombreuses fois dans Fantask 1ère série n° 1 puis dans la série Une aventures des Fantastiques. Plus récemment, les premières apparitions de Namor ont été rééditées dans Fantastic Four l’intégrale chez Panini. Notons également que sa première apparition a été publiée dans le quotidien France Soir du 23 août ou 19 septembre 1973. Il s’agit d’ailleurs du dernier épisode publié dans le quotidien. Je profite de cette chronique pour indiquer à ceux qui ne l’aurais pas encore vu qu’un livre en partie tiré des 80 premières chroniques va être édité chez Neofelis Editions. Pour ceux qui auraient raté l’information, il est encore temps de nous soutenir dans le cadre de la campagne Ulule qui a déjà atteint le seuil de réalisation (comme cela vous ne prenez aucun risque) et profiter des contreparties exclusives. http://fr.ulule.com/histoire-superheros2/

[Jean-Michel Ferragatti]
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