French Collection #258
3 juin 2015[FRENCH] Comme nous l’avons vu il y a quelques semaines, les scénaristes de Superman commencèrent à essayer de rationaliser les pouvoirs et comportements de Superman dans les années cinquante. Et par ou mieux commencer qu’en expliquant comment son costume a été créé.
Dans les premiers épisodes de Superman, il est mitraillé, s’écrase au sol ou est bombardé sans que son costume ne présente un accroc. Aucune explication n’est donnée, d’autant plus que le sujet de son enfance n’est traité que dans une case lorsqu’il se recueille sur la tombe de ses parents avant de rejoindre Metropolis. Lors de la première réinterprétation de son origine dans la Sunday Page, le sujet est traité en une seule page. Il est sous-entendu que son passage à l’orphelinat n’a pas été de tout repos pour le personnel et que le directeur était ravi de le voir partir avec les Kent qui sont déjà présenté comme des fermiers que l’on imagine du middle west.
L’apparition de ses pouvoirs est traité en quelques cases jusqu’au décès de ses parents adoptifs à qui il jure de défendre le bien et le droit. Il décide alors d’utiliser un costume afin de protéger son identité secrète mais encore une fois, aucune explication n’est donnée sur l’origine du costume. C’est dans Superboy (1949 Series) #78 que la réponse sera apportée. Nous y apprenons qu’après son adoption, le jeune Clark Kent commença à manifester des aptitudes extraordinaires. Martha décidera alors de lui coudre un premier costume constitué d’une cape rouge. Malheureusement, celle-ci attira l’attention du taureau de l’exploitation familiale qui le percuta violemment.
Le jeune Kent s’en sorti indemne mais pas ses vêtements. Plusieurs costumes après, le petit Clark va sauver la ferme familiale en éteignant un début d’incendie dans le grenier. Jonathan se rend alors compte que les couvertures trouvées dans la fusée ayant amené l’orphelin des étoiles, et qu’il avait entreposées dans le grenier, sont intactes. Après quelques expériences, les Kent se rendent à l’évidence. Le tissu constituant les couvertures sont aussi indestructibles que leur rejeton. Martha décide alors de faire avec un costume à son fils. Pour cela ils défont un nœud et tire deux pelotes qu’elle tricote. Malheureusement, il faut couper le fil et c’est impossible.
Heureusement, la vision calorifique du petit Kent réussit à le fondre. Equipé de tissu indestructible, le galopin peut faire toutes les bêtises qu’il souhaite. Le costume sera remisé lorsqu’ayant grandi il sera devenu suffisamment raisonnable pour prendre soins de vêtements « ordinaires ». Mais lorsque le jeune Clark décidera d’embrasser la carrière de justicier, il souhaitera avoir un costume pour dissimuler son identité secrète (comme dans la Superman Sunday Page déjà évoqué). Son costume d’enfant est ressorti des placards et complété avec les restes de pelotes qui avaient été conservées. Mais il manque encore une ceinture et des chaussures.
Le matériel de base sera encore une fois trouvé dans la fusée. Des bandes de caoutchouc seront enlevées puis ajusté aux mollets par super-force tandis qu’une courroie deviendra ceinture. Se pose enfin, le problème des vêtements civils de celui qui va devenir Superboy. Heureusement, il reste suffisamment de tissu pour tricoter une cape avec une poche intérieure ou ils pourront être dissimulés. Quant aux lunettes du jeune Clark, nous avons déjà vu comment il les assemblera encore une fois avec des débris de sa fusée (cf. French Collection #254).
Au fil des années, l’histoire sera enrichie notamment avec la célèbre scène ou les vêtements du petit Clark s’enflamme lorsqu’il pédale à super-vitesse (sans que le scénariste ne pense que les engrenages du vélo devraient lâcher avant). La simple courroie devient une ceinture de sécurité, ce qui permet d’expliquer l’existence de la boucle de ceinture. Les bandes de caoutchouc deviennent une vraie paire de botte que Superboy cout au moyen d’une « super-aiguille ». Les vêtements civils seront eux réputés être imprégnés d’un fluide leur permettant de supporter les conditions extrêmes auxquelles ils sont soumis même dans la poche de la cape (traverser un soleil, etc.).
Enfin, l’emblème de Superboy est censé être dérivé des armoiries de la maison El qui signifie espoir en kryptonien. Malheureusement, l’histoire éditoriale de Superman était déjà longue et certains épisodes antérieurs contredisent cette version, notamment un épisode ou le petit Kal-L porte une réplique du costume de son père Jor-L. Mais les chantres de la continuité expliqueront qu’il s’agit d’un épisode se passant dans une autre continuité. Il est à noter que Supergirl [Kara Zor-El] ne rencontrera pas les mêmes soucis puisqu’elle fit son apparition quasiment déjà adulte avec son propre costume tout fait qui devient par voie de conséquence indestructible sur la terre.
Mais la thématique des costumes existait antérieurement et reviendra régulièrement dans les scénarios de la ligne de comics consacrés à Superman. C’est notamment le cas de l’épisode de Superman (1939 Series) #112 qui est antérieur à celui Superboy (1949 Series) #78. Dans cet épisode, Lex Luthor a étudié le costume de Superman [Kal-L] sous toutes les coutures (c’est le cas de le dire) et a découvert qu’il pouvait le transformer en arme contre son éternel ennemi. Il construit donc un rayon susceptible de transformer l’habit de sa Némésis en « costume infernal » (Fatal Costume en anglais).
Exposé au rayon de Luthor, le super-costume se met à émettre des rayonnements de chaleur insoutenable qui fond l’acier en quelques secondes. Superman [Kal-L] donc donc s’éloigner le plus rapidement possible afin de ne pas mettre en danger les innocents qui l’entourent. Laissé libre de leurs mouvements, Luthor et sa bande peuvent donc commettre leurs larcins à leur guise. Après deux essais réussis, Lex décide de mettre fin à ce petit jeu en faisant exploser le costume de Superman [Kal-L]. Alors qu’il pense avoir réussi, son ennemi traverse sa camionnette recouverte de plomb pour l’arrêter.
Superman [Kal-L] a compris dès la deuxième fois qu’on lui tendait un piège. Il a vite repérer la camionnette de Luthor et la suivi grâce à sa super-ouïe et sa vision télescopique. Il a donc tout entendu du plan de Lex Luthor et simuler une explosion afin de lui faire croire à sa disparition. Entre temps, il a modifié la structure moléculaire (on se demande bien comment d’ailleurs) de son costume qui est devenu insensible au rayon diabolique de son adversaire.
Le Bull-Pen de Marvel au commencement de la continuité moderne évacuera tous problèmes liés aux costumes en expliquant que ceux de ses héros étaient constitués de molécules instables inventées par Mister Fantastic [Reed Richards]. Décision très pratique mais qui coupera la maison des idées d’une source de scénarios sommes toutes agréables à lire. John Byrne dans sa réinterprétation du personnage publié dans la mini-série The Man of Steel suite au story arc Crisis on Infinite Earths va également évacuer le problème mais sans néanmoins négligé le problème.
L’auteur essaye en effet lui aussi de rationaliser à sa façon les pouvoirs et comportements de Superman. Jugeant stupide que Superman [Kal-EL] puisse par exemple bouger une planète sans occasionner de dégât il introduit le concept de « Télékinésie tactile ». Il explique que Superman [Kal-EL] génère un champ télékinésie autour de lui qui lui permet de voler et également de protéger les gens qu’il emporte. Ce champ de télékinésie permet également d’expliquer que son costume ne subit aucun dégât mais également pourquoi il est si collant. Pour être protégé par le champ de télékinésie le vêtement doit être près du corps comme la remarqué sa mère Martha. C’est donc elle qui vous tout simplement lui coudre un uniforme dans un tissu on ne peut plus ordinaire. L’explication est intéressante mais prive le scénariste des nombreuses pistes scénaristiques qu’ouvrait l’idée d’un costume indestructible et qui avait été exploité dans le passé.
Je profite de cette chronique pour remercier les lecteurs qui m’ont fait des commentaires sur le French Collection #254 et qui m’ont convaincu de poursuivre une très très longue série de chronique qui explorera « la mythologie de Superman » dans les années soixante et soixante-dix. Alors soyez au rendez-vous toutes les trois semaines si vous êtes de ceux qui l’apprécier.
[Jean-Michel Ferragatti]
L’idée du champ de force protégeant le costume a aussi été reprise dans la série Loïs et Clark 😉
C’est presque la même époque. Ce n’est pas étonnant.