French Collection #300

[FRENCH] Pour fêter la 300e chronique, nous inaugurons une nouvelle série consacrée à un éditeur majeur du comic américains et notamment de super-héros qui de manière assez surprenante n’a encore jamais été évoqué dans ces pages, même si le personnage dont nous allons détailler une nouvelle version à lui déjà fait l’objet de chroniques il y a quelques années.

MLJ Comics est un des plus grands éditeurs de comics ainsi que l’un des plus anciens puisqu’il opère sans discontinuer depuis fin 1939. Le groupe doit son nom aux prénoms de ses trois fondateurs Maurice Coyne, Louis Silberkleit & John L. Goldwater. Louis Silberkleit est un des précurseurs du secteur des pulp’s magazine. Il est ainsi dès la fin des années vingt Circulation Manager chez le distributeur de magazine Eastern Distributing Corp. C’est dans le cadre de ces fonctions qu’il va engager un jeune homme pour l’assister. Il s’agit de Martin Goodman, futur propriétaire de Marvel Comics.

Mais Eastern Distributing Corp. fait faillite et les deux hommes s’associent avec quelques investisseurs pour fonder Mutual Magazine Distributors en plus d’un éditeur de pulps chacun. Ce sera Newsstand Publications Inc. pour Goodman et Columbia Publications pour Silberkleit. Les deux hommes partagent d’ailleurs le même comptable (Bookeeper), Maurice Coyne qui en plus d’être l’un des fondateurs de MLJ fera de nombreuses avances au tandem créatif de Marvel Joe Simon & Jack Kirby et sera celui qui révélera aux deux jeunes artistes que Goodman les spolie de leur droits sur Captain America Comics.

John L. Goldwater, le troisième associé, a rencontré Louis Silberkleit au travers de sa société Periodicals for Export au travers de laquelle il achète les surplus des publications de Silberkleit à un penny pièce pour les revendre en dehors des Etats-Unis. Les trois hommes, plus Goodman, travailleront également en étroite relation avec la société Independent News, la branche de distribution du groupe de Jack Liebowitz & Harry Donenfeld qui deviendra DC Comics. Le premier titre de MLJ Comics sera Blue Ribbon Comics (1939 Series). Il s’agit d’un magazine consacré aux genres policiers de manière assez large.

Mais dès le numéro 2 apparaît un personnage de super-héros, Bob Phantom. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’un personnage original mais d’une nouvelle version d’un personnage apparu auparavant dans Star Comics #1 (1937 Series) et Keen Komics #1 (1939 Series). Ceci s’explique par le fait que le personnage a été créé en 1937 par l’un des précurseurs du monde des comics Harry « A » Chesler pour sa propre production. Les deux pages du personnage seront revendues une première fois à l’éditeur Centaur puis la nouvelle version à MLJ Comics.

En effet, le nouvel éditeur ne disposant pas d’équipe artistique propre, il fera appel au Harry « A » Chesler Studio, un sweat shop qui package des publications entières pour le compte de leur client éditeur. Mais très rapidement, comme beaucoup d’autres éditeurs, MLJ Comics va se passer des services du studio de Chesler en engageant directement les artistes. Comme nous le verrons dans de prochaines chroniques, les productions de MLJ Comics vont croitre très rapidement et notamment grâce à de nombreux personnages de super-héros. Mais l’événement majeur de l’histoire de l’éditeur est la publication d’un nouveau personnage dans Pep Comics #22 (1940 Series), le comic titre du premier super-héros patriotique de l’histoire : The Shield (qui devance de plus d’un an l’apparition de Captain America).

Archibal « Chick » Andrews surnommé Archie va révolutionner le genre du teen comics et devenir la locomotive de l’éditeur qui va d’ailleurs se rebaptiser Archie Comics pour capitaliser sur le succès de son nouveau personnage vedette. Les personnages de super-héros qui ont pourtant fait le succès du groupe et la fortune de ses fondateurs vont être abandonnés petits à petit jusqu’à disparaitre définitivement. Mais au début du silver age, et notamment dans le sillage du succès du renouveau de la ligne de comics de leur vieux compère Goodman, les trois fondateurs de MLJ Comics décident de revenir au genre du super-héros qui a fait leur succès originel avec deux nouveaux personnages, en sachant qu’Archie reste toujours leur principal actif et assure toujours leur succès.

Mais comme Goodman, les trois hommes n’ont pas cessés leurs autres activités d’éditions et ont même rachetés l’activité d’éditions de Street & Smith, le plus gros éditeur de Pulp’s dont ils n’étaient qu’un petit concurrent, au travers de Belmont Books leur société d’édition spécialisé dans le Paperback (livre de poche). Grâce à cette acquisition, Maurice Coyne, Louis Silberkleit & John L. Goldwater récupèrent les droits d’un des personnages les plus connus de la culture populaire américaine, The Shadow. Comme nous l’avons déjà vu dans French Collection #15, Street & Smith avait déjà publié le personnage dans une version assez fidèle au pulp en comic strip puis dans une ligne de comic propre qui s’était arrêtée en 1949. MLJ Comics relance donc le titre en 1964 avec néanmoins de très nombreuses modifications. Premièrement, même si le personnage apparaît sur la couverture du comic sous son apparence classique (bien que sa cape soit d’une couleur verte, qui peut passer pour être un effet de lumière) il n’en est rien à l’intérieur.

En effet, dès la première page nous constatons que The Shadow est devenu blond ! Deuxièmement, il ne porte plus ni chapeau ni écharpe rouge mais à peine une cape de la moitié de sa longueur classique. Mais alors, comment est-il capable de se dissimuler aux yeux des hommes (the power to cloud men’s minds so they cannot see him) ? Et bien la réponse varie selon les épisodes. Ce qui est certain, c’est que son pouvoir est devenu celui d’un hypnotiseur qui peut visiblement conduire dans certaines circonstances à le faire disparaître aux yeux des hommes ! (également compléter d’un talent de ventriloque). Reste que The Shadow possède toujours son rire énigmatique.

Beaucoup de choses ont visiblement changées, mais The Shadow combat toujours son ennemi de toujours Shiwan Khan, bien que son apparence ne soit pas la même que dans la version classique et qu’il s’agisse visiblement leur première rencontre dans cette version, et possède toujours son identité de Lamont Cranston. En effet, après son combat contre Shiwan Khan à la fin duquel il réussit à s’enfuir, The Shadow revêt des lunettes (reprenant ainsi un ressort scénaristique assez contesté de Superman pour justifier son identité secrète) et part auprès de sa « simple » secrétaire, Margo Lane (qui est bien sur secrètement amoureuse de lui). Margo Lane et Shrevy, les deux supporting characters (personnages secondaires) les plus récurrents de The Shadow, sont donc également présents mais là encore une fois avec de forts changements. The Shadow et ses deux compagnons ne sont plus des vigilants (justiciers) mais des agents de la Central Intelligence Agency (C.I.A.), les services secrets américains officiels et l’action se passe légèrement dans le passé en 1962.

Leur agent de contact est un certain Weston, ce qui rappelle aux auditeurs des émissions radiophoniques le personnage historique du Commissionner Weston. Et visiblement, Margo n’est pas au courant de l’identité secrète de Cranston ni aucun autre de ses contacts ! The Shadow passe en fait pour une légende dans le monde de l’espionnage. Quant à Shrevy il n’est plus chauffeur de taxi, mais le chauffeur personnel de Cranston qui se déplace en Rolls Royce ! Rolls Royce qui est bourré de gadgets, tout comme la résidence de Cranston qui est en réalité devenu le meilleur agent secret du monde ! La nouvelle version du personnage lorgne donc plus vers James Bond que vers la version originelle des pulp’s. D’ailleurs, au même moment, Belmont Books relance également une nouvelle série de romans dans lesquels The Shadow est également un agent secret. A défaut d’être respectueux de l’œuvre originelle, les actionnaires communs des deux sociétés sont cohérents.

The Shadow #1 (1964 Series) contient également une nouvelle qui nous détaille les nouvelles origines du personnage. Lamont Cranston n’est plus une identité emprunté avec le consentement de son propriétaire par l’aventurier Kent Allard mais bien celle du personnage. Finit également le passé d’aviateur mercenaire de la première guerre mondiale, ce qui peut se comprendre du fait de la période de réactualisation du personnage. A la place, nous avons une origine proche de celle de Batman. Lamont Cranston est encore à l’université lorsqu’il hérite de la fortune de ses parents et décide de voyager au moyen orient (dans la conception américaine du terme, c’est-à-dire en Egypte) ou il se rend compte de ses talent d’hypnotiseur lorsqu’un fakir essaye de l’hypnotiser !

Dès The Shadow #2 (1964 Series), les changements s’accélèrent. De nouveau confronté à Shiwan Khan, Lamont Cranston porte cette fois une tenue de super-héros bleue (masque compris) et verte (culotte, gants, bottes et cape) assez proche de celle de The Web, un vieux personnage de MLJ (sur lequel nous reviendrons bientôt), sur la couverture. Mais pas à l’intérieur du comic lui-même ! Il faudra attendre le numéro suivant pour le voir enfin avec son « nouveau » costume mais également une nouvelle couleur de cheveux. Enfin son ancienne, c’est-à-dire noir corbeau. Dans les numéros suivants, The Shadow s’installe dans une mauvaise routine avec un nouveau scénariste qui n’est autre que Jerry Siegel, le co-créateur de Superman ! The Shadow [Lamont Cranston] rencontre un nouvel adversaire par épisode, Dr. Demon un nazi surgit de son exil datant de la chute du IIIe Reich, Mr. T.N.T (qui ressemble à tous les personnages explosifs de l’histoire du comic et particulièrement Human Bomb de Quality), The Radiation Rogue (qui ressemble à tous les personnages radioactifs de l’histoire du comic et en partie à Radioactive Man de Marvel).

L’univers de notre héros se développe aussi un peu plus, lorgnant cette fois-ci sans doute sur les publications Marvel puisque The Shadow [Lamont Cranston] va obtenir possède une sorte de Danger Room (salle des dangers) équivalent à celles des X-Men baptisée Survival-Course Room dans laquelle il s’entraine au saut du lit. De plus, il possède maintenant (sans que nous ne sachions si c’est en rapport avec le C.H.I.E.F.) un « transistorized electronic eavesdropper device » qui rappelle furieusement les gadgets transistorisés de notre bon vieil tête de fer ! Enfin, Lamont Cranston n’est plus à partir de The Shadow #5 (1964 Series) membre de la C.I.A. mais du Command Headquarters Inter-national Espionage Forces, soit le C.H.I.E.F. qui lorgne de manière assez transparente vers le feuilleton télévisé The Man from U.N.C.L.E. (Des agents très spéciaux en français) et parvient à précéder la création du S.H.I.E.L.D. de quelques mois !

Mais visiblement, Jerry Siegel ne fait pas que regarder des séries télévisées en 1964. Il continue sans doute comme dans sa jeunesse d’aller au cinéma et il est fort probable qu’il a vu le film A shot in the Dark (Quand l’inspecteur s’emmêle en français) dans lequel apparaît Kato le domestique chinois de l’Inspector Clouseau. En effet, apparaît dans The Shadow #5 (1964 Series) le personnage de Yukal Torrg bâtit sur le même modèle. Valet de Shiwan Khan, il a pour mission d’attaquer son maître tous les matins déguisé en The Shadow pour le préparer à une éventuelle attaque de son adversaire dans son repaire ! Yukal ouvre les pages de The Shadow #6 (1964 Series) mais le personnage vedette est un autre vilain du mois un peu plus original que les autres. Depuis son apparition dans les pulp’s, Shiwan Khan est présenté comme le descendant de Genghis Khan et sa soif de conquête du monde s’explique en grande partie par cette ascendance. Il va cette fois-ci être confronté à Attila the Hunter, bien entendu le descendant d’Attila the Hun !

Un peu plus original dans sa conception, ou en tout cas s’encrant dans une certaine tradition de l’univers de The Shadow, le personnage est par contre graphiquement peu inspiré avec son costume digne d’un homme des cavernes. Mais les deux prétendants à la domination mondiale vont allier leurs forces pour affronter celui qui se tient entre eux et leurs rêves de domination : The Shadow [Lamont Cranston]. Bien entendu, les deux adversaires ont des arrières pensées et au final, notre héros triomphera. L’épisode suivant est plus intéressant car sans doute plus aboutit de toute la série et également celui qui comporte le plus de référence à l’univers classique de The Shadow dont il est évident qu’au regard de son âge et de sa culture Siegel est parfaitement informé. Nous retrouvons Shiwan Khan qui explique comment il a échappé à la mort avec Attila the Hunter lors de l’épisode précédent, exercice de continuité bienvenu.

Le voici de retour à une de ses bases ou il organise un tournoi entre ses hommes pour déterminer lequel aura le droit de bénéficier de sa dernière invention. Le vainqueur est exposé à un rayon agrandisseur (Growth Ray) et devient The Brute ! Cette fois-ci, Jerry Siegel dont nous avons pointé les inspirations est cette fois-ci sans doute en avance. Le personnage peut en effet être considéré comme un précurseur de The Freak [Happy Hogan] apparu dans la série Iron Man (1968 Series) sans parler d’autres personnages de comic qui porteront le même nom. La conquête du monde demandant des ressources financières considérables, Shiwan Khan ordonne à son homme de main d’aller piller les banques américaines. The Brute qui a réussi à négocier « one quarter » pour lui s’attaque à tout ce qui contient de l’argent grâce à sa force extraordinaire et une certaine invulnérabilité.

Lors d’une attaque, il est confronté à The Shadow [Lamont Cranston] qui essaye de l’hypnotiser. Mais Shiwan Khan a pris soin de doter son homme de main de lunettes réfléchissantes l’immunisant à son pouvoir. Astuce simple, mais qui est meilleure que celle d’un épisode précédent ou Shiwan Khan résiste au même pouvoir en fermant ses paupières sur lequel il a peint des faux yeux pour tromper son adversaire ! Désemparé, The Shadow [Lamont Cranston] engage le corps à corps mais est rapidement battu pour la première fois de sa carrière du silver age. Leur deuxième confrontation ne sera pas plus couronné de succès et le propriétaire du trésor que The Shadow [Lamont Cranston] a essayé de protéger se moquera même de lui par un retentissant : « This is The Shadow! Ha-Haaa-Haaaa! Who knows what evil lurks in the hearts of men? Only The Shadow knows!”

The Shadow [Lamont Cranston] va alors devoir se fier à de bonnes vieilles méthodes. C’est ainsi que nous voyons le retour du réseau d’agent de The Shadow qui le renseigne sur les méfaits de son adversaire. Beaucoup de gadgets font également leurs apparitions (il y avait déjà eu une lame de rasoir dissimulé dans sa montre) comme le Multi-Action Shadow Gun (pistolet à gaz et électrique), des bottes à ressort (comme Fantomiald !), un vibreur de ceinture qui fait radio pour rester en contact avec les agents, un Power-Beam (rayon de puissance en français). Malgré tout cela, The Brute va une nouvelle fois battre The Shadow [Lamont Cranston]. Mais assez bizarrement, il va refuser de démasquer son adversaire vaincu comme lui ordonne Shiwan Khan ce qui rend ce dernier aussi furieux que quand il a sauvé un enfant d’une chute prouvant ainsi qu’il n’est pas qu’une brute sans cœur.

Le gadget suivant de The Shadow [Lamont Cranston] semble lui donner un avantage décisif. En effet, il brise les lunettes réfléchissantes de The Brute au moyen d’un sifflet supersonic (sic !). Mais en réalité, les lunettes ne sont qu’un leurre. La vraie protection est constituée de verres de contacts réfléchissants incassables ! The Shadow [Lamont Cranston] ne doit sa survie qu’à ses « compressed-air jets » intégrés à ses bottes (encore une fois un peu comme un Golden Avenger bien connu). Ironiquement, le prochain objectif de The Brute est la collection de Lamont Cranston ! Mais une fois sur place, Shiwan Khan lui ordonne un changement d’objectif. Il doit capturer Margo Lane dont il s’était disputé « la main » l’épisode d’avant avec Attila the Hunter dans l’épisode précédent. Puis, se rappelant qu’elle l’avait aussi ridiculisé il lui ordonne de la tuer en la jetant du haut d’un immeuble.

Mais encore une fois, The Brute désobéit. Il est visiblement tombé sous le charme de Margo et décide qu’il va dépenser son quart de butin avec elle. Il part donc avec elle vers The Gargoyle Island (l’île des gargouilles en français) ou Shiwan Khan doit lui donner sa part. L’île doit son nom à d’énormes statues qui la font ressembler à une réplique de l’île de Pâques. Mais sur place, Shiwan Khan n’est venu que pour en finir avec son homme de main. Premièrement, il lui lance une pièce de 25 cents pour solde de tout compte. Après tout, n’avait-il pas promis à The Brute « one quarter » comme récompense (jeux de mots entre un quart et le nom familier de la pièce de 25 cents) ?

Furieux, The Brute se retourne contre son chef, mais celui-ci à amener son Shrinking Ray qui est bien entendu l’inverse de son Growth Ray et va rendre sa forme première à son désobéissant subordonné. Mais à ce moment, The Shadow [Lamont Cranston] qui a suivi la trace de The Brute grâce aux résidus radioactifs dus à son exposition à son Power-Beam intervient. Il aveugle Shiwan Khan avec sa cape, puis avec son Multi-Action Shadow Gun qui émet cette fois-ci un rayon de lumière noire qui aveugle son adversaire alors que lui peut voir dans le noir. Encore une fois nous assistons à un retour aux fondamentaux de la mythologie de The Shadow sans vraiment d’explication. Mais pour se dégager, Shiwan Khan lance une grenade au milieu de la mêlée. The Brute n’est même pas blessé mais l’explosion a fragilisé des statues géantes qui menacent d’écraser Margo. Prouvant encore une fois qu’il n’a pas mauvais fond, il préfère sauver la jeune femme plutôt que de poursuivre son patron. Mais sous l’effort, son cœur lâche et il reprend sa forme humaine avant de mourir dans les bras de Margo.

Revenu à New-York, The Shadow [Lamont Cranston] s’engouffre dans un faux regard d’égout qui est en fait un tube de pneumatique lui permettant de rejoindre sa nouvelle base en dessous de sa maison ! Encore une fois, nous revenons aux fondamentaux du personnage qui utilisait dans les romans un réseau de tubes pneumatiques pour acheminer ses messages ! L’épisode se finit étrangement par un twist assez peu inspiré. The Shadow [Lamont Cranston] se fait la réflexion que c’est grâce au fait que The Brute ait enlevé ses lunettes ET ses lentilles de contacts qu’il a pu l’hypnotiser et lui commander de sauver Margo. Mais en même temps, l’action ne montre nullement que The Brute & The Shadow [Lamont Cranston] croisent leur regard. Pire, lors de l’explosion de la grenade le deuxième est visiblement assommé. Enfin, pourquoi utiliser cet argument peu probable alors que tous les éléments du scénario montrant le bon fond de The Brute amène à la conclusion qu’il va sauver Margo ?

Remarquons également de nombreux jeux de mots dans cet épisode autour du terme « shadow » qui permettent à Jerry Siegel d’insinuer assez étrangement que The Shadow n’est plus que l’ombre de lui-même. Faut-il y voir une sorte d’autodénigrement de son travail et ce dans l’épisode qui est peut être celui qui respecte le plus la mythologie originelle du personnage ? Nous en reparlerons dans quelques instants. Nous pouvons aussi remarquer que l’épisode entier est parsemé de jeux de mots dont certains ne dépareilleraient pas dans un dialogue signé Stan Lee. Siegel continue visiblement, sur ordre ?, a regardé ce qui se passe à la Maison des Idées ! Le huitième et dernier numéro de The Shadow (1964 Series) va utiliser un ressort scénaristique dont nous reparlerons ultérieurement sur une autre œuvre de Jerry Siegel. The Shadow [Lamont Cranston] va y affronter TOUS ses adversaires à la fois plus un ou deux nouveaux en supplément.

The Shadow [Lamont Cranston] tombe dans le piège d’un certain Peter Jordan qui l’emmène dans un manoir ou l’attendent The Radiation Rogue (qui lors de sa première apparition devait mourir en quelques jours), Dr. Demon, Attila the Hunter (dont le costume tient moins de celui de l’homme des cavernes que d’un chevalier), Elasto (un clone de tous les héros élant sans charme et sans inventivité. Mais revenons à notre remarque sur les jeux de mots de Jerry Siegel basés sustiques) & The Diabolical Dimensionoid ! Jordan leur explique alors qu’il les a fait venir pour qu’ils puissent tuer The Shadow [Lamont Cranston] et après quoi ils devront le tuer lui pour empocher 1 million de $ ! Mais pendant les combats de ce qui est appeler The Game of Death!, Jordan va plusieurs fois aider notre héros. Ce dernier a d’ailleurs très vite compris le piège et expose Jordan à la fin de l’épisode. Celui-ci lui explique alors qu’il est tellement riche que la vie a perdue tout intérêt et qu’il a organisé ce jeu uniquement par ennui !

Et voici comment se termine cette version du silver age de The Shadow qui est décrit par certains spécialistes comme le pire comic book de l’histoire. Bien qu’il ne s’agisse clairement pas des meilleurs comics books de l’histoire, ils ne sont pas complètemer le terme « shadow ». Peut être faut il y voir la conscience que l’auteur avait de la faiblesse du comic. Si c’est le cas cela veut peut être dire qu’il lui était expressément demandé de produire une version affadie du personnage. Rappelons-nous qu’originellement au début des années trente, le personnage de The Shadow est à la limite de l’horreur. Un personnage occulte pour adulte voulant frissonner un peu bien adapté pour l’époque avec un peu de tension sexuelle.

Un personnage bien loin de ce que permettait le Comic Code Authority des années soixante et dont John L. Goldwater fut le président pendant 25 ans. Les dés semblaient pipés d’avance pour voir surgir de la reprise par Archie Comics autre chose qu’un personnage dénaturé et c’est vraiment dommage lorsque l’on connait les versions intéressantes du personnage qui furent lancées par DC Comics ou plus récemment Dynamite Comics. En France, seul l’épisode avec The Brute fut publié à ma connaissance par l’éditeur nordiste Artima – Arédit dans son Petit Format N&B Etranges Aventures 1ère série n° 30.

Maintenant que je suis arrivé à la fin de cette chronique fleuve qui marque ma 300e chronique, je voudrais profiter de l’occasion pour remercier toute l’équipe de Comic Box qui m’a proposé d’animer cette chronique (et plus particulièrement Xavier Fournier). Je remercie tous les lecteurs et commentateurs de leur fidélité, sans oublier mes amis des Forums Pimpf et Buzz Comics qui réagissent également sur les fils consacrés à French Collection. Je voudrais également vous rappeler que les 81 premières chroniques font l’objet d’un livre à paraître très prochainement chez Néofelis Editions. Enfin, un remerciement très spécial à mon épouse et mes enfants qui supportent la présence des dizaines de milliers de bouquins de ma collection et le temps que je passe à les lire pour préparer toutes mes contributions au fandom des comics.

Je ne sais pas si je peux imaginer vous donner rendez-vous dans 300 numéros de French Collection mais en tout cas je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour la 301e !

[Jean-Michel Ferragatti]
Comic Box

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