French Collection #311
22 juin 2016[FRENCH] Cette semaine, nous allons évoquer une histoire de famille qui traverse les guerres modernes de l’Histoire de France et également nous permettre de revenir sur notre série de duplication des scénarios dans l’histoire du comic. Lors de sa première apparition dans Star Spangled War Stories #84 (1952 Series), Mademoiselle Marie rejoint son père mourant après avoir récupéré un parachutiste américain devenant ainsi la responsable du réseau auquel elle appartient pour défendre « La Belle France » (en français dans le texte).
La référence à la famille de Mademoiselle Marie est par la suite centrale dans sa troisième apparition dans Star Spangled War Stories #86 (1952 Series) et ce dès le début de l’épisode. En effet, l’encadré de début d’épisode indique : « La foudre peut-elle frapper trois fois ? Mademoiselle Marie se trouve dans la même situation que son grand-père et son père dans les deux guerres précédentes. Elle est piégée en plein centre de la cible qu’elle doit indiquer. »
Un bombardier Boeing B-17 Flying Fortress tourne au-dessus de la France occupée attendant avec angoisse le signal de Mademoiselle Marie pour larguer ses bombes. Le problème de la jeune fille est qu’elle s’est réfugiée au milieu de la cible qu’elle doit indiquer. Les nazis ont en effet construits une base de lancement de missile au milieu de la campagne française et l’ont dissimulée sous un faux près avec des mannequins simulant des vaches et une ferme en ruine au milieu.
Repéré par une patrouille nazie blindée, Mademoiselle Marie s’est réfugiée dans la fausse ferme avec son émetteur radio. Son dilemme est que s’il est envoie le signal au B-17 elle sera réduite en poussière. De plus, le char nazi est toujours à l’affut du moindre bruit pouvant la faire repérer. La jeune femme se rappelle alors des histoires que lui racontait son grand-père André et son père. Le premier lui racontait comment il avait obtenu sa médaille pendant la guerre franco-prussienne qu’il qualifiait de dernière grande guerre car les affrontements était au corps à corps.
André était incorporé dans une compagnie de grenadier et subissait le feu d’une batterie d’artillerie ennemi. Il ordonna à l’un de ses hommes de retourner à l’arrière des positions pour que leur propre batterie se tienne prête à faire feu à son signal. L’homme essaye de le dissuader de cet acte suicidaire mais le grand-père de Mademoiselle Marie est prêt au sacrifice suprême pour la défense de La Belle France.
Il prend donc d’assaut les positions ennemies et se retrouve par hasard au-dessus de la position camouflée. S’il réussit à alerter les forces françaises le bombardement va immanquablement le tuer. N’écoutant que son patriotisme, il allume un feu permettant ainsi à sa propre batterie d’ajuster son tir. Les obus français s’abattent donc tout autour de lui mais le laissaient miraculeusement indemne et capable de recevoir une médaille pour courage au-delà du sens du devoir.
Le père de Mademoiselle Marie combattait dans les tranchées de la Marne pendant la première guerre mondiale lorsqu’il se retrouva dans une situation similaire. Pilonné par les forces adversaires toute sa compagnie allait être décimée lorsqu’il décida de s’infiltrer derrière les lignes ennemies et d’envoyer un signal à ses propres batteries pour neutraliser l’ennemi. Après avoir échappé aux mitrailleuses, il se retrouve dans un champ comportant une grange en plein milieu. Apercevant des flammes de canon en sortir, il comprend que la batterie d’artillerie est dissimulée dans la bâtisse.
Alors qu’il se demandait comment approcher de la grange, la pluie se mit à tomber lui fournissant une couverture suffisante pour monter sur le toit. Et comme il se demandait à nouveau comment alerter ses propres forces, la pluie cessa et le soleil brilla de nouveau. Alors qu’il utilisait un miroir pour attirer l’attention de la batterie française, il se fit la réflexion qu’étrangement il se trouvait dans la même situation que son propre père quelques décennies après.
Et comme André, bien que la grange fût détruite par un coup au but, ses blessures lui permirent néanmoins de recevoir une décoration pour héroïsme. Il est à remarquer que la décoration est une croix de Lorraine totalement anachronique pour la période de la première guerre mondiale. Les deux hommes sont des purs produits de leur époque, y compris dans leur réflexion lorsque la petite Marie fait le souhait de réussir un exploit guerrier digne de ses aïeux. Aucun ne pense qu’une guerre aussi meurtrière que la sienne ne se reproduira et de plus que leur descendante ne servira jamais les armes à la main.
L’histoire leur ayant donné tort, Mademoiselle Marie doit maintenant trouvé une solution à son problème immédiat. Prenant son courage à deux mains, elle se saisit de son émetteur radio et donne le signal au B-17. Immédiatement repéré par le Panzer nazi, la transmission est coupée par une rafale de mitraillette. Incapable de repérer avec précision le lieu du bombardement le B-17 continue de tourner sous le feu des Messerschmitt ennemis qui finissent par détruire sa radio. Sourd et muet, la mission est sur le point d’échouer.
Mais Mademoiselle Marie se réveille miraculeusement indemne dans les ruines de la ferme en pensant qu’elle a survécu au bombardement aérien. Mais elle se rend compte que ce n’est pas le cas et que non seulement sa radio a été détruite mais le tank Panzer stationne dans l’objectif de piéger ses compagnons de maquis susceptibles de venir lui venir en aide. Mademoiselle Marie décide alors une action aussi héroïque que celle de ses ancêtres. Elle s’élance sur une des chenilles du Panzer et décharge son pistolet mitrailleur Sten dans la fente de visée du blindé. Les ricochets touchent un obus qui explose, tuant l’équipage et mettant le feu au blindé. Ne possédant plus de radio, l’équipage du B-17 repère néanmoins la fumée et bombarde au final leur cible tandis que Mademoiselle Marie se traine loin des explosions. Revenu à son camp de base, ses camarades de maquis décident de la décorer comme ses aïeux de la plus belle médaille qu’ils ont pu trouver : une rose !
L’épisode a pour intérêt de nous présenter la famille de Mademoiselle Marie et de l’inscrire dans une lignée héroïque. Mais pour les historiens des comics, il possède un autre intérêt que nous fidèles lecteurs auront peut être identifiés par eux-mêmes en se souvenant du French Collection #241 traitant d’André Lunet. Ce jeune résistant également créé par Robert Kanigher dans Our Army at War #154 (1952 Series) est non seulement le prototype d’Henri, le leader de The Unit 3 (cf. French Collection #189) mais possède quasiment la même histoire familiale que celle de Mademoiselle Marie ses père et grand-père étant mort en tenant leur positions pendant les deux précédentes guerres.
Sachant que Star Spangled War Stories #84 (1952 Series) avec Mademoiselle Marie a été publié en octobre 1959 et Our Army at War #154 (1952 Series) avec André Lunet (qui partage d’ailleurs son prénom avec le grand-père de Mademoiselle Marie) en mai 1965 nous sommes clairement dans une duplication de scénario consciente ou inconsciente, le scénariste étant le même. L’épisode de Mademoiselle Marie a été publié dans le Petit Format N&B Brûlant 1ère série n° 20 (soit après celui d’André Lunet caprice des plannings de traduction français) chez l’éditeur nordiste Artima – Arédit.
[Jean-Michel Ferragatti]