French Collection #34
21 octobre 2009[FRENCH] Retour sur Hour-Man, un des personnages du Golden Age de l’univers DC Comics dont la publication en France a peut être inspiré la création d’un personnage purement français. Le personnage de Hour-Man apparaît pour la première fois dans Adventure Comics #48 (avril 1940). Ces créateurs sont Ken Fitch & Bernard Bailey. Le personnage fait partie de la seconde vague de super-héros des deux maisons d’éditions qui formeront par la suite DC Comics.
Rex Tyler est un biochimiste qui a inventé une molécule qui accroit la force, la vitesse et l’endurance de celui qui l’avale. Nommée Miraclo et prise sous forme de pilule elle produit ses effets pendant une heure. Rex décide de garder cette invention pour lui afin que sont usage ne soit pas fait à mauvais escient. Il décide dans le même temps de l’utiliser pour combattre le crime et prend le nom de Tick-Tock Tyler The Hour-Man (transformé rapidement en Hour-Man et même vers la fin en Hourman).
Comme beaucoup d’autres personnages ne possédant pas leur propre titre, il intègre les rangs de la Justice Society of America dans All-Star Comics. Dans ses aventures solos, le personnage lutte contre des organisations criminelles tandis que celles au sein de la Justice Society of America sont plus orientées super-vilains. Les aventures du personnage s’arrêtent début 1943 comme pour beaucoup d’autres super-héros.
Lors du rachat des personnages de l’éditeur Quality Comics, les scénaristes de DC Comics réécriront une partie de la continuité super-héroïque et Hour-Man sera réputé être l’un des premiers personnages a accompagné Uncle Sam sur Earth X et à y trouver la mort. Il sera miraculeusement ressuscité, la mort du héros Red Bee (autre personnage de Quality Comics) se substituant à la sienne. En termes de continuité, il participera à la guerre au sein du All Star Squadron.
Quoi qu’il en soit, le personnage revient sur le devant de la scène l’orientation du personnage prend une tournure plus adulte lorsqu’il est révélé que la prise de Miraclo entraîne une dépendance de Rex Tyler. Cette dépendance est d’ailleurs combinée avec son besoin compulsif de lutter contre le crime. Il tentera par la suite d’abandonner son identité de super-héros.
Lors de Crisis on Infinite Earths, c’est son fils Rick Tyler qui reprendra le costume en prenant des pilules de Miraclo afin de sauver les occupants d’un hôpital dans lequel se trouvait également la jeune doctoresse Beth Chapel qui est aussi à cette occasion devenu le Doctor Midnight (cf. French Collection #30). Rick rejoindra le groupe Infinity Inc. qui est principalement constitué des enfants de la première génération des super-héros de DC Comics.
Mais pendant ses aventures, Rick va comme son père développer une accoutumance au Miraclo. Ce n’est que grâce au troisième Hourman qu’il en sera guéri. En effet, un androïde du 853e siècle apparaît au XXe siècle également sous le nom de Hourman [Matthew Tyler]. Construit grâce à l’empreinte ADN de Rex Tyler, il se considère plus ou moins comme l’un des descendants des deux premiers Hourman.
Le destin des trois personnages se rejoint lors des différents affrontements avec le super-vilain Extant (incarnation maléfique finale du personnage de Hawk). Rex Tyler est tué ainsi que d’autres personnages de la première génération (comme le Doctor Mid-Night [Charles McNider]) dans un affrontement avec Extant pendant le cross-over Zero Hour.
Mais suite au décès, l’androïde Hourman [Matthew Tyler] donne deux nouveaux pouvoirs à Rick Tyler. Le premier de voir une heure dans le futur au moyen d’un sablier. Le deuxième de parler à son père qui se trouve dans Timepoint (une dimension est figé l’incarnation de Rex dans l’instant qui précéda sa mort).
Lors d’un autre affrontement avec Extant, Rick très grièvement blessé et échange sa place avec l’incarnation de Rex qui se trouve dans la dimension de Timepoint. Alors qu’une nouvelle fois Extant va tuer Rex, l’androïde Hourman [Matthew Tyler] prend sa place et lui sauve la vie. A la fin de la bataille, seuls restent Rex Tyler et son fils Rick qu’il a sauvé avec l’aide du Doctor Mid-Night [Pieter Cross].
Rex laissera Rick reprendre le manteau de Hourman et utiliser les nouvelles pilules de Miraclo qu’il a développé et qui ne provoque aucune accoutumance. Rick intégrera la Justice Society of America au sein de laquelle se trouve aussi sa femme Liberty Belle [Jesse Chambers] (qui est la fille de la première Liberty Belle [Libby Lawrence – Chambers] et de Johny Quick).
En France, le personnage de Hourman apparait dans un fascicule de la Collection Fantôme 1ère série (non numérotée) des Editions Mondiales en mars 1945. Le fascicule contient deux épisodes du personnage qui est rebaptisé « L’homme d’une heure ». Le personnage bénéficiera d’un deuxième fascicule de la collection avec également deux épisode.
La carrière officielle du personnage prendra alors fin. Mais de nombreux connaisseurs du monde des super-héros français (dont Gérard Thomassian de la librairie Fantasmak) seront frappés par la ressemblance de costume entre Hourman et le héros Fantax créé par Marcel Navarro (sous le pseudonyme de J. K. Melwyn-Nash) et Pierre Mouchot (dit Chott) dans Paris Monde Illustré en juillet 1946. A noter que l’épisode originel vient d’être réédité dans Strange n° 9bis par Organic Comix et que Tanguy Mouchot (le petit-fils de Chott) a entrepris la réédition intégrale des travaux de son grand-père.
Connaissant l’intérêt que Chott portait aux bandes américaines (le Giff-Wiff a fournit en son temps de nombreux exemples de swip sur Fantax) il y a peu à douter quant à une partie de l’inspiration graphique de Fantax qui bénéficia dans notre pays d’une carrière bien plus longue faisant perdurer l’héritage de Hourman.
[Jean-Michel Feragatti]
C’est vrai qu’il y a une ressemblance avec Fantax…. « Damned! » 😉
J’ai en ma possession le fac-similé du n°1 de Fantax,très bon boulot,je le conseille aux lecteurs de CB.
Une question pour les érudits de l’équipe CB ou un lecteur étant très bien renseigné.Donc j’ai lu le livre de Jacques Sadoul « 93 ans de BD »,dans ce livre l’auteur AFFIRME que Chott a décalqué (pas copié, l’accusation va plus loin) certains de ses dessins de Fantax sur ceux d’Hogarth.Vu le ton utilisé dans le passage du livre,j’ai l’impression qu’il a une dent contre la personne de Chott.Alors voilà la question:Est ce une accusation gratuite? Le fait que Chott est travaillé dans les studios d’Hogarth (ce qui n’est nullement mentionné dans le livre) n’aurait il pas plutôt fortement influencé son travail?
J’avoue avoir beaucoup de mal à croire que Chott ait décalqué des dessins, les copier à la rigueur,l’accusation aurait pu être crédible,mais décalquer 🙁
Je ne pense pas que Sadoul ait une « dent » contre Chott mais c’est quelqu’un qui s’intéresse beaucoup à l’oeuvre d’Hogarth et il est clair que certaines silhouettes sont plus que similaires. Maintenant il faut juste remettre ça dans le contexte de l’époque et savoir que beaucoup d’auteurs en faisaient de même. On trouve du « swipe art » de ce genre y compris dans les tous premiers épisodes de Batman, où Bob Kane avait pompé certains éléments d’images dans d’autres BD. Vous avez aussi des exemples comme des planches entières de Superman et la version française du Blue Beetle qui sont identiques (http://www.comicbox.com/index.php/articles/french-collection-11-2/). Donc oui, très certainement Chott a pris des choses d’Hogarth mais c’était une sorte de coutume à l’époque.
Pour la ressemblance Fantax/Hourman, j’ai pour ma part également une autre théorie, qui vient du fait que Batman était colorisé en noir et rouge dans certaines éditions VF de l’époque (http://www.comicbox.com/index.php/articles/french-collection-10/). Et autant je doute qu’il y avait réellement un intérêt commercial à copier Hourman, autant Fantax devrait un peu au Batman noir et rouge que je n’en serais pas spécialement étonné.
Pour Ludovic, oui il y a des cases de Fantax décalqué sur le Tarzan de Hogarth. Comme je l’indique dans l’article cela a été pointé dès les années 1960 dans le Giff-Wiff. Ma doc est en garde meuble car je viens de déménager et je ne peux donc pas scanner les pages mais c’est vraiment du décalc.
Comme l’a indiqué Xavier, il faut remettre cela dans le contexte de l’époque. Cela était très courant. Il y a plein de témoignages d’artistes américains du Golden Age dans Alter Ego (l’indispensable revue de Roy Thomas) qui expliquent que le swipe art était le seul moyen pour eux « d’apprendre ». Et bien entendu, ils swipaient des dessinateurs qui maîtrisaient à la perfection l’anatomie. Donc Hogarth mais aussi Alex Raymond. Dans un autre article d’Alter Ego il est démontré case à l’appui que la première cover de Batman est un décalc d’une case de Flash Gordon.
Pour les similitudes Hourman / Fantask / Batman. Les premières apparitions de Batman (Hurrah !) sont en N & B. La première colorisation se fait dans « Les Grandes Aventures » en 1941 pour quelques numéros (1 à 8 comme indiqué dans French Collection #16). Le vrai début de Batman en Rouge & Noir se fait sur les couvertures des fascicules de la Collection Fantôme 1ère série non numérotée des Editions Mondiales (cf French Collection #10) vers fin 1945 ou début 1946. Mais à l’époque il ne s’agissait pas d’un grand succès. Le véritable essor de Batman se fait avec sa publication dans Tarzan. Mais cette fois-ci le personnage est en N & B. Il faudra attendre 1946 pour voir le personnage en couleur et en effet en Rouge & Noir.
Il n’est donc pas impossible que la publication française de Batman est inspiré Chott. Mais je pense personnellement qu’Hourman a eu une plus grande influence sur la conception graphique de Fantax. La capuche de Hourman et celle de Fantax sont quasiment identique (et à l’époque seule Hourman avait ce genre de capuche). Par contre, les premières aventures de Batman sont assez « violentes » (plusieurs morts). Peu être faut il rapprocher cet état de fait des scénarios très « adulte » de Fantax qui ont été écrits par Marvel Navarro ?
Nous pourrions aussi parler de Zygomar, héros yougoslave qui avait précéder Batamn dans Hurrah ! Et sans doute existe t’il d’autres sources d’inspiration qui n’ont même pas été commentées par la doctrine.
La conclusion de tout cela est que Fantax a été porté par un courant d’inspiration qui existait à la même époque. Il ne s’agit à mon sens pas d’un héros « novateur » (comme a pu l’être Superman) mais plutôt d’un personnage dans « l’air du temps ». Les similitudes et inspiration sont donc inévitables.
A mon sens Hourman en est clairement une. Mais sans doute Batman aussi.
Merci de la réponse,les choses sont plus claires maintenant.C’est du « swipe art » pas du décalqué 😉
Et donc rassuré sur la partialité de Sadoul.Pour ceux qui s’intéressent à l’histoire des comics et de la BD en générale,le bouquin de Sadoul « 93 ans de BD » pourraient vous intéresser.
Ludovic, « swipe art » et « décalqué », c’est essentiellement la même chose… La partialité de Sadoul existerait s’il constatait des ressemblances qui n’ont pas lieu d’être. Disons qu’il y a bien du « décalqué » mais que, comme c’était relativement répandu à l’époque, ça ne fait pas de Chott un « faussaire » dans mon esprit.
Article très intéressant, surtout que je ne connaissais pas l’histoire du personnage ( déjà vu dans les comics et je savais que son pouvoir était la super force mais que pendant 1h cela dit je ne savais pas par quel biais, eh oui c’est ça être jeune lecteur de comics :p ) Donc merci 🙂
Quand on y réflechit « l’homme d’une heure » est un drole de titre ou de nom !
Il vaudrait mieux parler du « sur-homme d’une heure »!
Sinon, il serait redevenu quoi au bout d’une heure, le biochimiste ?
Le theme de la drogue et de la dépendance était pertinant surtout quand on pense à tous les scandales sportifs de nos jours.
Merci à JMF.La réponse n’était pas encore affichée quand je suis passé sur le site.Le seul problème que me posait Sadoul c’est que pour lui Chott=copieur/décalqueur, mais sans remettre les choses dans le contexte de l’époque. 😉
Quelle animation !!!
La ressemblance avec Hourman est évidente et le nier serait idiot. Je voudrais cependant mettre un bémol sur les « swipe art ». Pour en avoir discuter avec Robert Rocca (autre dessinateur de FANTAX et dernier des mohicans de la maison d’édition de mon grand-père), je peux vous dire qu’il ne s’agissait pas de décalquer mais bien de recopier des poses sur le maître de l’anatomie de l’époque : Hogarth. Voilà qui est dit.
Maintenant chacun son opinion mais certaines sont assez virulentes et déplacées.
Merci à Ludovic, Xavier, Jean-Michel et les autres…
A très bientôt.
Merci Tanguy, les choses sont plus claires.Qu’un dessinateur en copie un autre ou en soit très inspiré, je trouve cela normale.Prenez les dessinateurs amateurs qui sévissent sur les forums de comics, on leur reproche d’avoir un style Turner, Silvestri ou autres dans l’air du temps.Que Chott est recopié des poses de Hogarth, ça ne me dérange pas du tout, il s’est servi de la référence pour parfaire son style, c’est comme ça que je vois les choses, après chacun voit midi à sa porte.Mais encore une fois, prenez les dessinateurs français qui essaient de faire des comics à la française, on leur reproche de trop ressembler aux cousins américains.
Donc l’impression de malaise que j’ai eu à la lecture du bouquin de Sadoul était justifiée.Cette façon d’affirmer le « décalqué » sans aucun argument, il avait juste à mettre les dessins incriminés en comparaison avec les originaux, ce qu’il ne fait à aucun moment.Bon maintenant comme dit Tanguy « chacun son opinion », mais si mon message a pu faire en sorte que certains ouvrent les yeux sur le travail d’un artiste qui n’est plus là pour se défendre, et les fermer sur des accusations gratuites, j’en retirerai non pas une satisfaction personnelle, mais une impression que la vérité sera toujours plus forte que le mensonge et la calomnie.Oui je l’avoue, j’ai beaucoup d’admiration pour le travail de l’artiste, et j’espère que l’initiative de Tanguy envers le travail de son grand père aura assez d’adeptes pour lui permettre de nous faire découvrir tous les n° de Fantax. 😉
Merci à Comic Box, votre site prouve une fois de plus, son complément essentiel au magazine.
Et désolé pour le hors sujet 😉
1) D’une part je souligne quand même que dans cette discussion personne n’a traité Chott de « repompeur » et que donc il n’y a pas de discussion à charge ici vu que toutes les parties en présence tombent d’accord pour remettre les choses dans le contexte. Maintenant (et ça vaut pour tous les gens qu’on accuse à tord ou à raison de « pomper ») s’il suffisait de recopier un dessin ou une photo pour faire une BD, et bien on attend les oeuvres de ceux qui crient au plagiat si c’est si facile. Car bien souvent j’en croise qui disent qu’un Alex Ross ne fait que recopier des photos et bien OK alors c’est facile, qu’ils prennent leur scanner et fasse la même carrière que lui.
2) Pour autant il me paraitrait déplacé de dire que Jacques Sadoul ait manqué à quoi que ce soit. Il avance une opinion qu’il a le droit d’exprimer et c’est quelqu’un qui a beaucoup fait pour la reconnaissance de la BD également et a qui on doit un certain respect (et en tout cas le respect qui consiste à lui laisser avancer un avis sans que ce soit analysé comme un « manque »). Je peux me tromper mais si Chott et Sadoul s’étaient croisés, sans doute auraient ils parlés de leur passion commune pour Tarzan. L’un a estimé l’honorer en s’en inspirant pour ses dessins, l’autre a estimé le défendre en soulignant la provenance de certaines poses. Ce n’est pas tout à fait comme se montrer le poing (et bien loin des écrits ridicules que certains universitaires ont parfois pu déverser sur Chott). Je ne pense pas qu’il faille y voir un conflit réel. Que Sadoul ait utilisé le terme « décalqué » au lieu de « recopier » me parait une question de vocabulaire plus qu’une lutte d’opinions. Parler de « calomnie » me parait tout à fait déplacé (cela supposerait une intention délibérée de mentir) d’autant que dans son livre « C’est dans la poche » Sadoul cite (page 140) Fantax en exemple comme une des séries ayant souffert de l’acharnement des bien-pensants. Dans « 93 ans de BD », Chott écrit précisément « Un autre reproche,bien plus grave, aurait pu lui être fait » en parlant des images « calquées ». Notez le conditionnel, surtout quand Sadoul dit plus loin dans le même chapitre: « Pour aussi étonnant que cela puisse paraître, malgré des sources aussi hétéroclites, il réussissait à donner une unité générale à sa bande. » Donc oui Sadoul utilise le terme de « calque » mais dans un contexte où il est bien loin de charger la mule en ce qui concerne Chott et ne lui fait pas un procès d’intention. Franchement je ne vois pas dans Sadoul un ennemi de Chott.