Les éditeurs d’illustrés pour la jeunesse sont confrontés à plusieurs phénomènes qui font des publications de cette année celles qui restent parmi les plus difficiles à acquérir.
A cela vient se rajouter le contexte national de l’occupation. Les français avaient en général bien d’autres problèmes que ceux de conserver les journaux d’enfants. Voir même d’autres dépenses beaucoup plus prioritaires que leur achat. Tout ces facteurs conduisent aujourd’hui à une très grande rareté des pièces dont nous allons parler.
A ces raisons particulières à la période d’occupation, il faut rappeler un autre facteur qui persista pendant près de trois décennies. Les organisations de scouts françaises organisaient tous les ans une journée de ramassage des « vieux papiers » dans le but de les vendre à des sociétés de recyclage. L’équipe qui rapportait le plus de papiers obtenait un prix tandis que le produit de la vente permettait de financer une partie des activités de l’année.
Des milliers de journaux et illustrés pour enfant furent donc collectés, puis détruits au cours des années cinquante à soixante dix. Ceci contrairement aux albums qui bénéficiaient d’un a priori plus « noble » chez les parents (leur coût plus élevé explique aussi qu’ils n’étaient pas donnés). Cette particularité française (mais qui s’étend aussi à d’autres pays européen) peu être rapprochée de la collecte des comics par les jeunes américains pendant la seconde guerre mondiales afin de participer à l’effort de guerre. La rareté de ces comics du golden age qui ont pourtant bénéficiés de tirages très élevés s’explique aussi pour cette raison.
Mais revenons en France. Le deuxième phénomène provient de la multiplication des éditeurs. En effet, du fait de la création de la zone libre nous allons avoir beaucoup plus de journaux qui vont publier des comics, mais pas nécessairement plus de matériel inédit. Avant juin 1940, les choses étaient assez simples.
Suite à l’invasion de la France par les nazis, le paysage va se démultiplier alors que celui de la Belgique reste identique à l’exception d’une interruption temporaire de publication du 16 mai (n° 20 de 1940) au 15 août 1940 (n° 33 de 1940).
Aventures reparaît en zone libre en décembre 1940 en reprenant sa numérotation quasiment là où elle s’est arrêtée. Il y a en effet deux numéros 24. L’un publié à Paris le 13 juin 1940. Son aspect est atypique et il ne comporte que quatre pages. Il faut dire qu’il a été imprimé entre une coupure générale d’électricité et un bombardement nazi. L’autre est daté du 12 décembre 1940 et est imprimé à Nice. Le titre continue de publier les aventures de Superman.
L’Aventureux et Hurrah ! reparaissent également en décembre mais avec deux éditions chacun. L’Aventureux zone libre connaît sept numéros entre décembre 1940 et janvier 1941 avant de changer de titre et devenir L’Audacieux en février 1941.
Un deuxième L’Aventureux publié en zone occupée vient prendre la suite de la version « classique » dès janvier 1941. Néanmoins, une brève comparaison nous amène à découvrir que le numéro 2 de la version « classique » de L’Aventureux de 1941 est identique au numéro 1 de L’Audacieux de 1941. Les deux journaux connaissent une trajectoire parallèle pour bon nombre des séries publiées .dans leurs pages.
Ne pouvant visiblement pas continuer à utiliser la mention Hurrah !, Hurrah ! et grandes explorations réunies devient Tarzan et grandes explorations réunies puis Tarzan et grandes explorations réunis à partir du numéro 10 pour corriger la faute d’orthographe que comporte le titre. Là encore, les deux éditions suivent une voie parallèle. Les trois bandes de super-héros qui nous intéressent (Superman, Blue Beetle et The Shadow) sont publiées dans les deux éditions (zone libre ou zone occupée) mais avec des numéros de décalage.
C’est ainsi que la page de Blue Beetle publiée dans Hurrah ! n° 264 de décembre 1940 est identique à celle publié dans Hurrah ! et grandes explorations réunies n° 1. La page de Superman publiée dans Hurrah ! n° 270 est identique à celle publié dans Hurrah ! et grandes explorations réunies n° 1. Enfin, la page de The Shadow publiée dans Hurrah ! n° 269 est identique à celle publié dans Hurrah ! et grandes explorations réunies n° 1.
Afin d’être certain de ne rien rater, le collectionneur complétiste essaye donc de se procurer des numéros très rares (et donc très chers) pour ce rendre compte au final qu’il possède déjà les épisodes en question dans d’autres numéros.
La bonne surprise du collectionneur viendra de la continuation, malheureusement éphémère, de Batman dans un nouvel hebdomadaire intitulé Les grandes aventures ainsi que de l’apparition de Black Condor et The Shadow dans Hurrah ! mais également dans Tarzan et grandes explorations réunies. Comme quoi rien, dans cette funeste année, ne peut être simple.
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