Amazing Man n’est pas le premier super-héros de l’éditeur Centaur. Mais il est clairement celui qui a été créé pour profiter de la mode superhéroïque suite au succès de Superman. Il apparaît en septembre 1939 et est un des premiers personnages à bénéficier d’un titre à son nom (avec Superman et Blue Beetle). Etrangement celui-ci ne commence pas au numéro 1 mais au numéro 5. Il faut savoir que l’utilisation d’un numéro élevé pour le début d’un titre est une technique assez répandue aux Etats-Unis. Elle permettait de bénéficier de tarif avantageux lors des envois postaux d’abonnement. I.W. Publishing un éditeur spécialisé dans les rééditions illégales (il sera surnommé le « bandit reprint publisher ») se fera une spécialité de commencer ses séries au numéro 10.
Pour les mêmes raisons, les éditeurs plus respectables ne laissent jamais mourir une série. Ils en changent le titre tout en gardant la numérotation. L’exemple le plus connu est le passage de All-Star Comics (comic qui publiait la Justice Society of America, le premier groupe de super-héros de l’histoire) en All-Star Western.
C’est sans doute cette deuxième hypothèse qui doit être retenue pour expliquer la numérotation atypique d’Amazing Man Comics. La question est de savoir quel est le titre antérieur du comic. Deux hypothèses s’affrontent dans le fandom américain. La première est qu’Amazing Man Comics est la suite de Motion Picture Funnies Weekly. Il s’agit d’un titre promotionnel qui devait être distribué dans les cinémas. Produit par First Funnies Inc., l’équipe créatrice du titre est en partie identique à celle d’Amazing Man Comics. Elle comprend notamment Lloyd Jacquet et Bill Everett. Avant de créer First Funnies Inc (qui deviendra ultérieurement Funnies Inc.) Lloyd Jacquet était directeur artistique de Centaur Publication, et notamment sur Amazing Man Comics. Bill Everett est l’artiste qui créera la première aventure de Namor The Sub-Mariner pour Motion Picture Funnies Weekly (avant de vendre le personnage à Timely) mais également d’Amazing Man.
En plus du numéro 1 de Motion Picture Funnies Weekly, les couvertures des numéros 2 à 4 furent produites. Certains spécialistes pensent donc que le numéro 5 d’Amazing Man Comics est la suite de ce titre. Mais la logique chronologique contredit cette hypothèse.
Au-delà de cette bizarrerie, Amazing Man s’approche par certaines caractéristiques de son modèle Superman mais s’en éloigne par bien d’autres. Premièrement c’est un orphelin comme le dernier fils de Krypton et son origine est des plus mystérieuse. Plutôt que de venir d’une autre planète, il a été élevé au Tibet par The Council of Seven. Il possède bien entendu des super-pouvoirs et son nom « officiel » finit en « Man ».
Par contre, il se différencie de son modèle de très nombreuses façons. Comme beaucoup de héros Centaur il ne possède pas d’identité secrète. Mais contrairement à Masked Marvel (French Collection #2) et Fantom of the Fair (French Collection #5) son état civil, John Aman, est connu de tous. Bien que le magazine qui lui soit consacré se nomme Amazing Man Comics, cet alias n’est quasiment jamais utilisé dans ses aventures. A la place, il est appelé par son nom ou bien « Green Mist ». Enfin, le personnage ne possède initialement pas de costume.
Mais Amazing Man partage également plusieurs caractéristiques avec Namor. Premièrement une certaine ressemblance au niveau du physique, ce qui s’explique facilement parce qu’il partage le même créateur. Mais surtout, dans le deuxième épisode, Amazing Man est influencé mentalement par The Great Question. Il laisse alors libre court son agressivité et endossera brièvement le rôle de vilain. Il préfigure en ce sens le caractère emporté de Namor qui à ses débuts est un antihéros. Il faut encore une fois y voir l’influence commune de Bill Everett.
Amazing Man a bénéficié depuis sa plus jeune enfance de l’enseignement du Council of Seven et possède des caractéristiques physiques surhumaines. Il est doté d’une super-force, d’un contrôle corporel extraordinaire qui lui permet de supporter la douleur et d’une adresse surhumaine. Il possède également des caractéristiques mentales très supérieures, s’éloignant ainsi de Superman qui à ses débuts ne possédait que des super-pouvoirs « physiques ». The Great Question, l’un des membres du The Council of Seven lui a enseigné toutes les connaissances des sages tibétains. The Great Question possède des pouvoirs mentaux et Amazing Man en a visiblement acquis quelques-uns uns. Il utilisera notamment un pouvoir de lecture psychique sur un stylo pour connaître le nom de son propriétaire. Enfin, il est capable de se transformer en brume verte (d’où son surnom de Green Mist) au moyen d’un sérum que lui a donné Nika, un autre membre du Council of Seven. Malheureusement, il doit absorber une dose du produit par semaine sous peine de perdre son pouvoir.
Après le départ de Bill Everett (au scénario au numéro 11 et au dessin à partir du numéro 12) le personnage évoluera de manière très différente pour se rapprocher des canons d’un super-héros classique. Premièrement il sera doté d’un costume (assez proche de celui de Namor) dont l’amulette centrale contient le principe actif de son sérum. Il n’a donc plus à craindre d’oublier de prendre sa dose hebdomadaire. Au fur et à mesure des publications, ses super-pouvoirs se rapprocheront de plus en plus de ceux de Superman. Super-force, invulnérabilité et même vol sans avoir à se transformer en brume verte.
A partir du numéro 11 il sera accompagné de Zona Henderson, une jeune femme journaliste, comme Loïs Lane. Il sera même affublé d’un sidekick, lorgnant cette fois-ci plus du coté de Batman, au numéro 23. Dans cet épisode, Amazing Man doit retourner auprès de Nika pour se régénérer et maintenir ses pouvoirs au summum. Il entre donc dans une sorte d’appareil qui le bombarde d’énergie. Mais Tommy, le frère de Zona s’est faufilé dans la pièce. Une partie de l’énergie l’enveloppe et lui donne des pouvoirs identiques à Amazing Man. Ce qu’il est intéressant de savoir c’est qu’initialement c’est à Zona qu’il était prévu de donner les pouvoirs. Mais l’idée a sans doute semblé trop audacieuse. De plus, le concept de faire accompagner les super-héros d’un enfant auquel les lecteurs pourraient s’identifier était sans doute trop fort.
Comme nous l’avons déjà indiqué pour Masked Marvel (French Collection #2) et Fantom of the Fair (French Collection #5), l’éditeur Malibu a repris les personnages de Centaur Publications dans sa série The Protectors. Amazing Man faisait bien entendu partie de cette reprise et réussit même à conserver son nom contrairement à Masked Marvel et Fantom of the Fair. Et pourtant, comme pour ce dernier Roy « Rascally » Thomas avait réutilisé le nom d’Amazing Man pour un de ses personnages de la série All-Star Squadron. Très clairement un hommage au personnage originel, son identité secrète est Will Everett, il s’en éloigne cependant suffisamment pour que Malibu ne craigne aucune action en justice. L’action de la série The Protectors se passe de manière contemporaine. Mais contrairement à Masked Marvel (dont c’est le fils qui reprend le masque) Amazing Man n’a pas vieilli grâce à l’enseignement de The Council of Seven. Ce n’est pas le cas de Zona qui fait une apparition dans le premier numéro de la série et dont on comprend qu’elle est sa femme. De plus, le seul super-vilain du golden age a être réutilisé par Malibu est The Great Question. Ses pouvoirs, ainsi que ceux d’Amazing Man sont identiques à ceux qu’ils avaient dans le golden age (contrairement par exemple à ceux de Fantom of the Fair).
Mais l’Amazing Man d’All-Star Squadron n’est pas le seul hommage à la création de Bill Everett. Ainsi dans un de ces articles de son magazine Alter Ego, Vol. 3 n° 4, intitulé « A Very Personal Reminiscence of Gil Kane », disponible en ligne, Roy Thomas écrit :
« Gil Kane, était un admirateur inconditionnel du héros Amazing Man que Bill Everett créa pour Centaur Publications, avant même The Sub-Mariner. Il me raconta les origines de A-Man, qui contenait un clone de Shangri-La et un groupe de figures énigmatiques dirigé par la silhouette encapuchonnée de The Great Question. Tous ces éléments ont été incorporés à notre travail commun, qui n’a été utilisé que dans l’épisode qui raconte les origines d’Iron Fist (dans Marvel Première n° 17) lorsque nous avons passé l’idée principale et quelques autres concepts essentiels à son développement à Len Wein, qui a repris la série à partir de la deuxième histoire avec le dessinateur Larry Hama. »
Il est possible que les scénaristes d’Iron Fist aient lus cette anecdote car le personnage (libre de droit) a été réutilisé récemment dans le run de the Seven Cities of Heaven. Le personnage du Prince of Orphans révèle que son identité est John Aman à la fin d’Immortal Iron Fist #12. Les lecteurs qui connaissaient le personnage originel avaient sans doute déjà deviné son identité lorsqu’il s’était transformé plus tôt dans l’épisode en Green Mist. L’épisode incorpore aussi rétroactivement le personnage à la continuité du Marvel Universe grâce à son interaction avec Orson Randall (le précédent Iron Fist). Les lecteurs purent également découvrir Amazing Man dans les pages de Project Superpowers d’Alex Ross chez Dynamite Entertainment.
En France, la quasi-totalité du run de Bill Everett sera commencé mais malheureusement subira les vicissitudes de la période d’occupation. Amazing Man Comics #5 sera publié dans Hurrah ! n° 251 à 255 mais dans une version tronquée (il manque les quatre derniers panels). Il faudra attendre la réédition de cet épisode dans le fascicule « L’homme invisible » dans la Collection Fantôme des Editions PIC pour lire l’épisode dans son intégralité.
Amazing Man Comics #11 est publié en zone libre dans Hurrah ! et les grandes explorations réunies n° 1 à 4. Il s’agit du dernier épisode dessiné par Bill Everett (mais qui n’écrit pas le scénario pour la première fois). Amazing Man est purifié de l’emprise mentale de The Great Question et obtient son nouveau costume. C’est également dans cette épisode qu’il rencontre Zona Henderson. Le numéro 4 comporte aussi le début d’Amazing Man Comics #12 dont la suite n’a toujours pas été à ce jour publié en Français. L’édition française d’Amazing Man comporte donc quasiment tous les grands moments de son histoire, un point qui mérite d’être souligné.
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