Oldies But Goodies: Atom #1 (Juin 1962)
15 mars 2014[FRENCH] Apparu en 1961 dans Showcase #34, le héros minuscule Atom (Ray Palmer) débuta dans son propre titre quelques mois plus tard, toujours sous la houlette de ses créateurs, le scénariste Gardner Fox et le dessinateur Gil Kane. Recevoir sa propre série était une confirmation qu’Atom était appelé à des choses majeures dans le contexte de DC Comics mais ce n’est pas la seule chose que cet épisode a apporté à l’univers de cet éditeur.
C’est par une référence à la France que commence Atom #1. On nous rappelle en effet que le Jour J (D-Day) était le nom du débarquement des alliés sur les plages de Normandie. On nous explique aussi que le V-J Day fut le nom donné par les américains au jour de la victoire sur le Japon. Et le narrateur nous prévient que désormais il va falloir compter avec le Jour P (le « P » étant là pour « Plantes »), le jour où les États-Unis d’Amérique ont été attaqués par les plants, sous les ordres d’un certain Jason Woodrue, le Maître du Monde Végétal. L’image, elle, nous montre une scène singulière : Le super-héros Atom est, comme à son habitude, réduit à une toute petite taille. Mais il s’élance, anxieux, vers une graine de plante portée par le vent, dans la direction d’un avion de chasse qui passe dans le ciel. Atom s’inquiète : « Je vais m’inviter sur cette graine et l’empêcher de fracasser cet avion ! ». Une graine de plante qui pourrait détruire un avion ?
Mais comme bien souvent cette première scène n’est qu’une mise-en-bouche, l’équivalent d’un pré-générique avant le démarrage effectif du récit. L’histoire commence réellement un soir, à Ivy Town (la ville de référence d’Atom). Un passant est en train d’allumer sa pire dans la rue, quand il s’aperçoit qu’un individu mystérieux laisse tomber quelque chose juste devant la banque. La curiosité du passant s’éveille : « La manière dont il a laissé tomber cet truc… Comme s’il voulait que personne ne le remarque ! ». Du coup le passant (un dénommé Henry Chalmers) se précipite. Mais il s’aperçoit que l’inconnu n’a fait que laisser tomber quelques graines dans un bac à fleurs. Pas de quoi paniquer. Sauf que… Le temps de se dire ça et Chalmers s’aperçoit que les graines germent et poussent à une vitesse délirante. Elles donnent vie des plantes qui poussent à vue d’œil et bougent comme si elles étaient mues par une intelligence. Sans prêter attention à Chalmers, ces plantes tournent alors leurs fleurs vers le mur de la banque et projettent une sorte de super-acide qui ronge la paroi. Ces plantes sont en train de commettre un hold-up ! Une fois un trou pratiqué dans le mur, les plantes bougent comme des tentacules et s’introduisent dans la banque. Elles s’attaquent alors – toujours avec leur acide – au coffre fort. Chalmers, qui est entré dans l’endroit pour observer la scène, comprend que les plantes sont dirigées. Mais par qui ?
Une fois le contenu du coffre récupéré par les plantes, l’homme n’est pas au bout de ses surprises. Il voit une magnifique (mais toute petite) jeune femme verte rentrer dans la pièce via le trou dans le mur. Chalmers, qui est lettré, croit rêver : il reconnait en elle une dryade, une sorte de divinité mineure de la mythologie qu’on pourrait décrire comme un esprit des arbres. La dryade a cependant d’autres choses en tête que les forêts. Elle s’empare des sacs qui étaient dans le coffre. Dans un premier temps Chalmers croit à une imposture : « Ca doit être une combine pour voler la banque en se servant d’une naine, un truc monté pour tromper d’éventuels témoins comme moi ! ». Mais cette idée est vite abandonnée, quand il voit la petite femme verte s’envoler et disparaître dans le ciel avec ses sacs ! Ne perdant plus de temps à essayer de trouver une explication cartésienne, Chalmers se met à appeler à l’aide. Rapidement la police arrive (sans doute que de toute façon il y avait une alarme dans la banque). Mais quand les agents questionnent Chalmers son histoire n’est guère cohérente. Il décrit comme une dryade vient de voler la banque en s’aidant de plantes qui crachent de l’acide. D’ailleurs il veut leur montrer ces plantes mais… elles se sont rétractées à l’intérieur des graines ! Il n’y a même pas l’ombre d’une fleur normale. Autant dire que personne ne croit à son histoire. Les policiers pensent même que c’est Chalmers qui a fait le coup et qui tente de se couvrir avec cette histoire folle. Du coup, malgré ses protestations, c’est bien lui, le seul témoin, qu’on coffre et qu’on expédie en prison.
Dans son malheur, Chalmers a de la chance : l’avocate qui s’occupe de le défendre est Jean Loring, la petite amie de Ray Palmer (lequel est secrètement Atom). Jean (habillée très à la mode pour 1961, ce qui lui donne une allure à la Jackie Kennedy) ne prend pas les choses à la rigolade et décide d’enquêter elle-même sur la véracité de ce que raconte son client. Elle va donc voir un spécialiste des plantes, le Professeur Walter Dudley, qui lui confirme que certains végétaux, comme la noix de cajou, peuvent produire une forme d’acide. Il lui montre aussi un plant de banane qui repousse en quelques instants. Les affirmations de Chalmers ont donc un fond de vérité sur le plan botanique. Mais quand Jean Loring veut voir un anacardier (sur lequel pousse des noix de cajou), Dudley est bien en peine de lui en montrer un : on lui a volé le sien deux nuits plus tôt ! Volé ? Jean flaire une explication. Peut-être que l’homme qui a volé l’anacardier est aussi celui qui a causé ces choses étranges à la banque (bien sur ça n’explique en rien l’apparition d’une nymphe des bois et on se dit que Jean a quand même une sacrée confiance en ses clients). Elle demande néanmoins à Dudley pourquoi il n’a pas porté plainte pour le vol. Le professeur lui explique que ses plantes sont bien trop délicates. S’il avait porté plainte, des agents seraient venus chercher des indices partout et auraient ravagé ses plantations. L’avocate demande alors à Dudley une faveur : pouvoir passer la nuit dans sa serre, de manière à voir si le voleur revient voler d’autres plantes. Le professeur accepte à une condition : qu’elle lui laisse le temps de régler la température pour contrebalancer la chaleur de son corps.
Quelques heures plus tard, Jean est au restaurant avec son fiancé. Ray Palmer est plutôt d’humeur romantique et lui propose d’aller, le soir même, admirer la lune qui se reflète dans un lac. Mais Jean refuse en lui expliquant qu’elle a un autre rendez-vous ce soir-là. Ray, on le comprend, ne saute pas de joie en apprenant la nouvelle. Mais Jean le rassure en lui expliquant que ce n’est qu’une affaire liée à des fleurs. Le héros sait qu’il peut lui faire confiance mais la formulation l’intrigue. Il décide donc d’y regarder de plus près. Après avoir déposé Jean chez elle, Ray gare sa voiture à l’écart et, grâce à sa ceinture spéciale qui maîtrise sa taille, il atteint une taille microscopique et porte désormais le costume d’Atom. Comme il s’agit d’un premier numéro mais que par ailleurs Atom est déjà apparu dans les pages de Showcase, Gardner Fox prend alors la peine de résumer les origines de ce super-héros. Quelques mois plus tôt, le physicien Ray Palmer a découvert qu’avec l’aide d’un fragment d’étoile blanche il pouvait compresser les atomes son corps et ainsi se réduire sans rien perdre de sa force. Ray a aussi créé un costume à partir de « fibres d’étoile blanche » qu’il porte tout le temps PAR DESSUS ses vêtements de ville. La logique de la manœuvre fait que le petit costume n’apparait que lorsque Ray adopte sa taille minuscule. Le reste du temps la tenue est « étirée » sur tout le corps de Ray, ce qui fait qu’on ne la voit pas. Quand il se réduit, le costume apparait donc sans qu’il y ait besoin de l’enfiler (l’idée sera contredite dans des épisodes ultérieurs de la Justice League, lorsqu’il arrive à Atom d’atteindre par accident une taille de géant mais que le costume, lui, demeure tout à fait visible alors qu’il devrait être encore plus étiré que lorsqu’il n’a qu’une « taille humaine ».
Pendant ce temps, Jean est montée dans sa propre voiture, regrettant de ne pas avoir pu en dire plus à Ray. Mais elle prend son travail très au sérieux : « Je suis déterminée à prouver que je peux réussir comme avocate… avant de me poser pour être une femme au foyer ! Ray ne semble pas comprendre ça ! ». L’épisode datant de 1962 et étant antérieur à la « libération de la femme », on remarquera que ce passage a deux niveaux. D’abord le héros, le point de vue dans cette série, trouve ça curieux que sa future épouse puisse vouloir travailler (même si ce n’est pas lui qui le dit, elle l’exprime pour lui et rien ne le contredit). Et inversement, sous l’apparence progressiste de l’attitude de Jean Loring, on ne va guère plus loin. Jean insinue qu’elle doit absolument réussir professionnellement avant de se marier… et de ne devenir qu’une femme au foyer. Mais comme beaucoup de personnages de BD, Jean a parlé à voix haute malgré le fait qu’elle se pense seule. Elle ne sait pas qu’Atom est monté dans la voiture et, toujours minuscule, s’est caché derrière le rétroviseur. Il a donc tout entendu du monologue et pense : « Je la comprends tout à fait, c’est pourquoi, en tant qu’Atom, je l’aide dans ses cas les plus difficiles ! Le plus tôt elle réussira dans sa carrière, le plus tôt elle m’épousera ! ». Et là donc on a un personnage qui dit comprendre mais qui adopte une attitude tout à fait paternaliste. Il ne lui vient pas à l’idée que Jean pourrait réussir dans la vie sans qu’on l’aide. Et de toute manière le constat final est le même : tout mène à un mariage ou, en tant qu’épouse, on insinue qu’elle ne travaillera pas autant (en dehors des taches domestiques de la femme au foyer). Atom est un produit de son époque (qui plus est écrit à l’époque par un scénariste né en 1911) et on ne peut pas spécialement le qualifier de progressiste sur la question de la place de la femme. Il ne lui veut que du bien, mais n’a pas l’air de penser qu’elle puisse se débrouiller…
Inversement il faut dire que la « méthode » de Jean Loring est cousue de fils blancs. Elle pense qu’un voleur rôde, s’attaquant aux banques avec des techniques venant de la botanique. Plutôt que de surveiller les autres banques, elle préfère « planquer » dans la serre, sans savoir si l’inconnu n’a pas déjà volé toutes les plantes dont il avait besoin. Le plan de Jean se limite à surveiller la serre avec les yeux grands ouverts, en attendant de voir ce qui se passe. Toujours caché près d’elle (mais de l’autre côté de la vitre de la serre), Atom découvre donc ce qu’elle entendait par avoir un « rendez-vous avec des fleurs ». Il ne connaît pas pour autant la nature de l’enquête. Mais bientôt une chose étrange (de plus) se produit. Jean pique du nez. Et – avant que vous puissiez penser qu’il s’agit encore d’une pique lancée vers l’image de la femme, son manque de suite dans les idées ou sa fainéantise – précisons qu’elle a une bonne raison. Comme Atom le remarque vite, une orchidée s’est tournée vers Jean et émet un gaz soporifique ! L’avocate n’avait donc pas une chance de mener à bien sa garde. Atom, de l’autre côté de la vite, n’est pas exposé et reste donc éveillé… Encore qu’il voit juste Jean perdre conscience et qu’on serait tenté de demander comment, de l’extérieur, il peut faire la différence entre un gaz soporifique et un poison qui serait en train de tuer sa dulcinée (à moins qu’elle ronfle énormément mais le scénario ne va pas vers cette voie, qui ferait perdre de sa superbe à Melle Loring). N’importe qui d’un peu prudent briserait la vitre pour s’assurer que Jean respire. Pas Atom. Sans doute qu’en tant que physicien et super-héros il sait reconnaître des signes qui nous échappent.
Jean étant H.S., Atom assiste alors à une scène encore plus délirante : à l’intérieur de la serre deux fleurs s’ouvrent et révèlent chacune une petite femme verte (à peu près de la taille d’Atom). Ray Palmer reconnaît lui aussi des esprits végétaux, qui se dépêchent de couper des fleurs et de partir vers l’extérieur en les emportant. Voyant la direction que les deux dryades empruntent, Atom se précipite à leur poursuite. Mais si elles ont la même taille que lui, elles ont aussi le pouvoir de voler, chose qu’il ne possède pas. Déjà une des dryades est hors d’atteinte. Mais alors que la seconde décolle à son tour, trainant derrière elle la fleur volée, Atom bondit et s’accroche à la tige de la plante. Il utilise ses pouvoirs pour se rendre encore plus petit qu’à son habitude, de manière à ce que les nymphes des bois ne le remarquent pas. Il rumine alors : « Je vais m’incruster et voir où elles vont ! Jean m’a parlé de son nouveau client pendant le repas. Ce vol a l’air d’être connecté à ce cas ! ». Ce qui est une curieuse aberration scénaristique puisque, dans la scène du repas, Jean voulait à peine dire à Ray où elle allait passer la soirée, voulant gérer les choses seules. On imagine mal comment elle aurait refusé de lui parler de la serre pour mieux lui parler de toute l’affaire entre deux cases.
Bientôt les deux femmes vertes arrivent dans un laboratoire où un homme en blouse blanche les félicite : « Je suis content que vous ayez obéit aux ordres de Maya quand je lui commandé de vous convoquer ici ! ». Sentant que c’est le cerveau de toute l’affaire, Atom retrouve la « taille de croisière » qu’il adopte quand il joue les super-héros, espérant capturer le criminel. Il devient aussi, du coup, visible. Mais le mini-justicier n’a pas le temps de fondre sur l’homme à la blouse. Il est « intercepté » par les graines que lancent des fleurs, comme s’il s’agissait d’un tir de barrage. L’homme en blanc jubile : « Je suis le maître de toutes les choses qui poussent, Atom ! Mes petites beautés me protègent ! ». Atom est repoussé par les projectiles, sans se rendre compte qu’on le guide vers une autre plante placée derrière lui : une plante carnivore qui se referme sur lui. A cette taille, c’est un vrai danger mortel pour le héros. D’ailleurs son adversaire, témoin de la scène, promet : « Encore quelques instants, Atom, et tu seras fini ! ».
Comme la série ne s’est pas arrêtée ensuite, vous aurez compris qu’Atom n’est pas vraiment mort dans le passage suivant. Si la plante s’est bien refermée sur Ray, Jason Woodrue (qui est identifié d’un seul coup par le narrateur, comme si on l’avait déjà nommé dans le récit) décide qu’il n’a pas le temps d’assister au spectacle. Il est tellement convaincu qu’Atom court à sa perte qu’il ne reste pas pour le surveiller. A l’intérieur de la fleur, le héros est effectivement dans une mauvaise situation. Le liquide contenu par la plante est si gluant qu’Atom n’arrive pas à toucher les commandes de sa ceinture, qui lui permettraient de changer de taille. Mais il a bientôt une idée. Il est arrivé à arracher au passage une des épines de la fleur. Et c’est avec cet outil qu’il arrive à activer sa ceinture. En quelques microsecondes il change donc de taille et grandi au point de faire exploser la plante carnivore qui le contenait. Libéré, il est donc en théorie seul dans la pièce, puisque Woodrue s’en est allé. Mais il entend une voix de femme qui lui demande son aide !
Levant la tête, Atom voit bien une petite cage en bois (genre cage à oiseaux). C’est de là que vient la voix… Mais il n’y a personne. En tout cas personne de visible. Son interlocutrice se rend compte de son trouble « Oh ! J’oubliais que je dois le vouloir pour qu’on me voit ! Et maintenant petit homme ! ». Maintenant ? Atom voit une autre femme verte (blonde, reconnaissable aussi à des fleurs dans ses cheveux). La prisonnière est une autre dryade mais pas n’importe laquelle. Elle se présente comme Maya, la reine des esprits des fleurs. Atom tente de la libérer mais la cage est trop haute pour sa petite taille (Ray Palmer n’est pas très malin par moment, il lui suffirait de reprendre taille humaine et ce serait réglé). Finalement Atom décide de se servir d’un crayon de papier comme d’un javelot. Il le lance très fort et… attrape le stylo au passage, de manière à s’en servir comme d’un missile sur lequel il est assis. Ainsi il arrive dans la cage et commence à en détruire les barreaux.
Pendant ce temps Maya commence à raconter son histoire : Jason Woodrue n’est pas réellement un terrien. Il vient d’une dimension parallèle qui est habitée par les nymphes de bois, des dryades, les néréides, les esprits des airs et ceux des plantes. Mais à cause de ses mauvaises actions il a été banni de sa dimension d’origine, ses juges pensants qu’une fois livré à lui-même il périrait.
Mais Woodrue gardait toute sa connaissance des esprits élémentaires. Arrivé sur Terre, il utilisa son savoir pour capturer Maya et la forcer à lui obéir. Maya et ses sujets influençant la vie végétale, capture la reine revient à diriger le monde des plantes. Qui plus est Jason Woodrue a expérimenté sur les plantes qu’il trouvait pour en créer de nouvelles, plus dangereuses, qu’il nomme ses « plantoïdes ». Il a ainsi créé quelque chose qui pousse aussi vite qu’un pied de banane mais crache de l’acide. C’est ce qui a permis de piller la banque d’Ivy Town. Atom, qui ne brille décidément pas par son intelligence dans ce numéro, s’exclame : « Alors la police a arrêté Henry Chalmers mais c’est Woodrue le coupable ? ».
Maya lui confirme, expliquant que les femmes-esprits sont invisibles sauf si elles sont obligées de toucher quelque chose de tangible (ce qui explique pourquoi Chalmers a pu les voir emporter l’argent tandis qu’Atom les voyait prendre des fleurs…). Atom demande à sa nouvelle alliée si elle sait où est passé Jason. Mais elle l’ignore. Elle est seulement au courant que Woodrue veut ni plus ni moins qu’utiliser ses plants pour conquérir le monde. A ce moment-là, de manière abrupte, Atom l’interrompt : « Avant que nous nous occupions de ça, je ferais mieux de voir si Jean Loring va bien ! ». Euh oui Atom, mais n’aurais-tu pas du le faire quelques instants plus tôt ? Maya n’y voit pas de problème, d’autant qu’elle peut elle aussi voler. Elle peut donc emporter le héros vers sa fiancée.
A la serre, Jean est réveillée, mais elle manque de tomber dans les pommes en voyant arriver son ami et allié Atom (elle ignore que c’est Ray) pendu à une mini-femme verte volante. Rapidement Atom explique que Chalmers est innocent, que Woodrue est le vrai coupable. Mais en son for intérieur le héros rumine « Je n’ai pas parlé à Jean des plans de Woodrue pour conquérir la Terre ! ». Pourquoi ? Comment ? On ne saura pas. Ce qui parait le plus probable c’est que dans l’esprit de Gardner Fox Jean Loring ne mérite pas d’être tenue au courant parce que c’est de l’action et qu’elle n’y comprendrait rien. On ne peut pas non plus parler de sexisme pour le coup puisqu’à l’inverse Maya est jugée digne d’aider Atom (mais bon, elle n’est pas humaine). Quand Jean remonte dans sa voiture, elle demande néanmoins, avec une pointe de jalousie : « Et ta petite amie va t’aider aussi ? ». Atom rit intérieurement en se demandant ce qu’elle dirait si, en plus, elle savait qu’il est Ray Palmer, son fiancé. Inversement Maya n’est que trop heureuse d’aider Atom. Alors que les deux micro-personnages retournent au labo de Woodrue, la reine des esprits floraux lui fait du rentre-dedans, lui explique qu’elle n’a pas de problème à attendre tant qu’elle est en sa compagnie et ainsi de suite.
A 9 heures du matin, une cité du bord de l’atlantique est attaquée par des plantes géantes. D’énormes variations des fleurs cracheuses d’acide surgissent et s’attaquent à tout. Les immeubles, les moyens de transport… En quelques instants elles ont détruit un avion. Elles menacent aussi les réserves d’eau ne puisant dedans. Du coup les humains ont des difficultés pour alimenter les générateurs électriques. C’est le moment que choisi Jason Woodrue pour se manifester. Grace à un gadget, sa voix est propagée à travers toute l’Amérique. Il laisse à la population cinq minutes pour se rendre, sinon il détruira la capitale… Écoutant ça, Atom comprend que Washington est en danger et qu’il faut absolument l’arrêter. Mais Maya objecte que Woodrue a ordonné aux esprits des fleurs de planter des Plantoïdes à travers tout le pays. Et là, il y a une « minute blonde » et, pour le coup, c’est Atom qui lui souligne l’évidence. C’est elle la reine des esprits des plantes ! Maintenant qu’elle est libre elle peut contrer les ordres de Woodrue. Maya est sidérée « Ooh j’étais si inquiète que j’ai oublié de rependre le contrôle ! ». Utilisant alors une méthode de transport assez caractéristique, Atom se rue sur un téléphone, compose un numéro et s’introduit dans le micro de manière à chevaucher les impulsions électriques jusqu’à son objectif. Il peut ainsi ressortir à Washington, par le micro d’une opératrice. Mais dans les rues les Plantoïdes ont déjà endormi l’armée, qui gît au sol. Atom aperçoit alors une grosse plante qui a été « reconvertie en défense anti-aérienne ! Ses graines sont si dures qu’elles sont comme des boulets de canon ! C’est l’œuvre de Woodrue ! ». Cela nous permet de retomber sur les évènements dépeints dans la scène d’ouverture. Désirant sauver l’avion, Atom bondit sur une graine. Ensuite il utilise son poids pour ralentir la graine-projectile. Elle manque du coup l’avion mais, mieux, Atom arrive à générer un effet boomerang : la graine est renvoyée vers sa destination et déchire la plante.
Sans perdre de temps Atom se précipite au secours de blindés de l’armée américaine, attaqués par des plantes géantes. Mais cette fois le héros comprend ce qui est arrivé aux soldats, le même gaz qui avait endormi Jean est présent au niveau du sol. L’ayant respiré par inadvertance, Atom titube, à deux doigts de tomber. Heureusement pour lui, c’est le moment où la cavalerie arrive. Ou plus exactement les dryades, sous la direction de Maya, arrivent et s’attaquent aux Plantoïdes. Mieux : voyant Atom tombé au sol, les minuscules femmes volantes le tirent vers le ciel de manière à ce qu’il puisse respirer de l’air et retrouver ses esprits. Mais Atom est pessimiste : « Woodrue est bien parti pour nous conquérir. Et quand les autres pays verront ce qui est arrivé, ils se rendront eux aussi ! ».
Non loin de là, Jason Woodrue n’est pas si optimiste que ça. Depuis l’extérieur de Washington il observe l’avancée de ses troupes et remarque que sa plante de « défense anti-aérienne » a été neutralisée. Alors qu’il a le regard vissé sur une paire de jumelles, il n’aperçoit pas Atom et les Dryades qui approchent dans le ciel. Mais il est vite averti par… l’arbre auprès duquel il se tient. C’est lui aussi un Plantoïde, un arbre dont les fruits font du bruit comme des clochettes en cas de danger. Mais le savant n’est jamais à court de piège végétal. Il lance une graine dans une flaque d’eau et une plante surgit alors, avec des branches se comportant comme des tentacules, saisissant Atom et l’entraînant sous l’eau. Maya et les Dryades tentent bien de venir au secours du héros mais Woodrue se retourne vers elles et lèvre le bras : « Ferme les yeux et dors ! Ne t’éveille pas avant que 10 ans soit passés ! ». Maya, visiblement sous l’emprise du terroriste, tombe comme une pierre. Woodrue jubile : « Avec Maya endormie, ses esprits-fleurs doivent m’obéir et arrêter de combattre mes Plantoïdes ! Et maintenant effaçons Washington de la surface de la Terre ! »
Woodrue prend sa « plus terrible graine », la place dans un lance-pierre et tire en direction de la ville. Mais contre toute attente la trajectoire de la graine s’inverse. Elle revient vers lui. Woodrue se précipite sur le boitier qui dirige ses plantes et qu’il porte sur la poitrine. Mais cette graine, semblable à du pissenlit flottant dans les airs, a le pouvoir de désintégrer tout ce qu’elle touche. Mais le boitier n’est plus là ! Atom vient de s’en emparer et de le cacher !
Woodrue est sidéré. Il était convaincu qu’Atom était mort noyé. Cependant, sous la surface de la flaque, Atom est arrivé à utiliser les commandes de sa ceinture et à grandir assez pour échapper à la plante. Laissé sans surveillance, il a utilisé une tige comme une catapulte, se propulsant dans les airs sur la trajectoire de la « terrible graine ». C’est d’un coup de point qu’il l’a renvoyé vers Woodrue. Bon normalement la graine détruit tout ce qu’elle touche et la cogner devrait poser problème mais là aussi le scénario ne perçoit pas la contradiction. Ensuite, tandis que Woodrue se concentrait sur la trajectoire de son arme, Atom a coupé la lanière qui retenait le boitier de commandes de Woodrue puis mis hors d’atteinte. Mais le « maître des plantes » est désormais sans moyen de défense contre cette fameuse graine de pissenlit destructeur, qui avance pourtant vers lui. Woodrue est terrifié mais Atom promet de le sauver… à condition qu’il tire Maya de son sommeil. Toujours sous le charme du héros, la nymphe s’écrie « Oh! Atom… Tu as sauvé le monde ! ».
Plus tard, Henry Chalmers est libéré tandis que Jason Woodrue est condamné pour le vol de la banque d’Ivy Town, en attendant un autre procès pour avoir tenté de conquérir la Terre. Jean Loring remercie Atom mais lui explique qu’elle doit se dépêcher. Il faut absolument qu’elle raconte tout à son fiancé. Il panique un peu « Uh-oh ! Je ferais mieux de retourner à mon laboratoire et à mon autre identité de Ray Palmer ! ». Mais… pourquoi ? Jean veut seulement lui téléphoner. Au pire s’il n’est pas là, il n’est pas FORCE d’être devant le téléphone (à plus forte raison à une époque où le cellulaire n’existait pas). Mais il profite du fait que Jean compose le numéro du laboratoire pour voyager à nouveau via les impulsions électriques. Quand quelqu’un décroche, il lui suffit d’aller reprendre taille humaine dans une autre pièce… et de prendre le téléphone pour répondre à sa belle. Celle-ci propose de l’inviter à manger pour tout lui raconter sur le règlement de son affaire. Intérieurement Ray pense : « Je sais déjà tout. Mais je vais devoir l’entendre encore ! Oh. Bien. C’est le prix à payer pour avoir deux identités ! ».
Cet épisode très « fleuri » d’Atom a trois apports particuliers. Le plus visible est la première apparition de Jason Woodrue, qui deviendra Floronic Man (« l’Homme Floronique »), reviendra plusieurs fois attaquer Atom mais aussi la Justice League puis, à partir des années 80, Swamp Thing (en particulier pendant le run d’Alan Moore et de Steve Bissette). Dans la continuité moderne, avec des origines très différentes, Woodrue est également un ennemi de Swamp Thing mais utilisant cette fois-ci le pseudonyme de Seeder en lieu et place de Floronic Man. Le deuxième apport est également lié au Swamp Thing d’Alan Moore et Steve Bissette. Atom #1, en 1962, est à ma connaissance le premier comic-book du Silver Age à injecter dans la continuité de DC Comics l’existence d’une caste d’esprits végétaux. A un certain niveau il y a dans Maya et ses « sœurs » la… hmm… racine de ce qui sera plus tard le Parlement des Arbres dans les écrits de Moore. On pourra m’objecter que Maya est visuellement très différente du Parlement des Arbres mais, dans certains épisodes des années 90, on voit dans certaines scènes de Swamp Thing un genre voisin de « petites nymphes » qui colle tout à fait au portrait fait dans Atom #1. Non pas que les auteurs modernes de Swamp Thing se soient inspirés d’Atom #1 et de Gardner Fox (en tout cas sur ce point). Plus probablement à quelques décennies d’écart les scénaristes ont simplement puisé dans le mythe de la nymphe des bois et obtenu, du coup, un résultat évidemment très voisin. Il n’en reste pas moins qu’Atom #1 lance les bases du « monde végétal » chez DC Comics…
[Xavier Fournier]
« le scénariste Gardner Fox et le dessinateur Gardner Fox ». C’est pas Gil Kane le dessinateur?
Si. C’était un test ! 😉
Maya me fait aussi penser à Poison Ivy. Existait-elle déjà à l’époque ?
Poison Ivy a été créé en 1966. Mais, plus simplement, Maya fait penser à la fée Clochette de Peter Pan. Ne manquent que les ailes.