Oldies But Goodies: Blue Beetle #13 (Août 1942)
7 janvier 2012[FRENCH] En 1942, après avoir déménagé de son éditeur originel (Fox), le super-héros Blue Beetle n’avait sans doute plus qu’un souvenir lointain d’avoir affronté, deux ans plus tôt, un saboteur nazi nommé le Skull (Comme on a déjà pu le voir dans le cadre de cette rubrique, dans Mystery Men Comics #14). Mais un adversaire à l’apparence macabre restait un concept efficace. Il était temps pour les auteurs d’injecter un nouveau assassin à « tête de mort » dans la série. Le Death Mask allait à nouveau faire penser à un super-villain bien connu…
En 1942 les héros masqués qui affrontaient des terroristes nazis étaient bien plus nombreux qu’ils avaient pu l’être ne serait-ce qu’un an auparavant. Normal : l’attaque de Pearl Harbor était passé par là et l’industrie des comics s’était lancée comme un seul homme dans le contexte guerrier, multipliant les criminels nazis ou nippons dans les aventures de leurs personnages. Cela n’avait cependant rien d’une fatalité et certains autres héros, tout en ne rechignant pas à participer à l’effort de guerre, avaient également d’autres centres d’intérêt. Peut-être aussi parce que certains éditeurs/auteurs se méfiaient sans doute de l’évolution de la guerre et préféraient ne pas se faire rattraper par les événements. Imaginez que la guerre s’arrête, aussi rapidement qu’elle s’était déclarée, entre le moment où on lançait la production d’un numéro et son arrivée sur les stands des vendeurs ? Jouer à « quitte ou double » sur un prolongement de la seconde guerre mondiale n’était pas aussi évident que ça.
Aussi, bien qu’en 1942 le conflit fasse rage aussi bien en Europe que dans le Pacifique, les responsables d’Holyoke Publishing, qui avaient récemment récupéré les droits de Blue Beetle (précédemment publié par Fox Publishing) prirent soin de ménager son côté « crime stories ». Après tout dans sa version première le Blue Beetle avait été créé comme un simple clone du Green Hornet et son alter ego était le policier Dan Garret. Tout concordait donc pour que le héros reste en Amérique et continue d’y affronter le crime (qui de toute manière pouvait plus ou moins liés aux activités nazies à l’occasion). D’ailleurs la présentation de l’histoire qui nous intéresse présentement place directement l’accent sur l’aspect policier : « Dans les annales du Crime se tient une nouvelle et sinistre silhouette, crainte aussi bien par la police que par la pègre… Un meurtrier masqué et sans pitié, possédant d’étranges pouvoirs sur la vie et la mort.. le Death Mask ! ».
Visiblement, alors que l’histoire débute, le Death Mask en question a déjà beaucoup fait parler de lui dans la ville. Ce malfaiteur, reconnaissable à un masque imitant un crâne vert, n’a aucun mal à se faire identifier alors qu’il s’invite à une réunion organisée par le gangster Porky Ferro. Dès qu’on aperçoit l’inconnu à l’allure macabre, un des hommes s’écrie « Boss, regardez… c’est le Death Mask ! ». Et la réaction de la bande n’est pas amicale. Death Mask est clairement identifié comme étant un fauteur de troubles qui n’a rien à faire là (en un sens d’ailleurs le passage fait un peu penser à la scène d’introduction du Joker dans le film Batman The Dark Knight de Christopher Nolan). Pas impressionné par cet accueil menaçant, Death Mask explique alors à l’assistance qu’il ne les craint pas puisqu’il lui suffit de pointer son « doigt de mort » vers quelqu’un pour que celui décède sur le champ.
D’ailleurs il joint le geste à la parole, montre Porky Ferro et celui-ci s’effondre immédiatement. Mort. Et Death Mask lève à nouveau le bras, menaçant de recommencer avec les autres. La bande, privée de patron, est cette fois terrifiée « Bon sang ! Ce type n’est pas humain ! On se rend ! ». C’est précisément ce que voulait Death Mask : « Ce sera mieux pour votre santé si vous travaillez pour moi ! ». Et les autres, désormais dociles, lui répondent simplement « On fera ce que vous voudrez. C’est vous le boss ! ». Et voilà comment on devient un caïd de la pègre en l’espace de cinq minutes. Maintenant qu’il a une bande à ses ordres, Death Mask explique qu’il connaît une bien meilleur façon d’attaquer la banque qu’ils convoitaient avant son arrivée…
Un peu plus tard la journaliste Joan Mason est en route pour sa visite hebdomadaire à sa banque. Pas de guichet automatique à l’époque. Elle doit donc retirer assez de liquide pour tenir la semaine, jusqu’à sa prochaine visite. En chemin vers la banque elle croise deux policiers. Il s’agit bien sur de Dan Garret et de son co-équipier Mike. A eux trois ils forment alors l’essentiel de la distribution régulière de la série. Dans la discussion Joan taquine Dan en insinuant qu’il veut l’accompagner pour voir combien elle gagne. Chevaleresque, Dan répond qu’au contraire il veut seulement lui tenir compagnie car il sait qu’elle a besoin d’un garde du corps (façon de plaisanter sur la somme théorique que Joan est supposée recevoir). Finalement ils se mettent en route tous les deux sous le regard dubitatif de Mike : « Un garde du corps ! Ha ! J’aimerais bien voir ça ! ». Il faut dire que si le personnage de Joan Mason doit beaucoup à Lois Lane, la dulcinée de Superman, Dan Garret n’est pas très éloigné de Clark Kent même s’ils ne pratiquent pas la même profession. Comme Kent, le héros prend le soin de passer pour un type assez peu dégourdi dans la vie de tous les jours, de manière à ce qu’on ne fasse pas le rapprochement avec son alter ego masqué. Mike n’a donc pas de raison de penser que Dan ferait un garde du corps exceptionnel…
Une fois à la banque, Joan attend son tour pour retirer de l’argent, tout en raillant « Et bien, voici mes millions ! ». Sur la même veine, Dan la taquine : « Dois-je te bander les yeux pour que tu sois capable de passer devant un vendeur de chapeaux ? ». Autrement dit, Joan ne touche peut-être pas les millions qu’elle dit mais le héros trouve que c’est une chipie dépensière. Ce jeu du chat et de la souris ne va cependant pas durer. La discussion est interrompue par des explosions. Bientôt c’est la panique parmi la clientèle de la banque : c’est une bombe qui vient d’exploser. Dan Garret, qui est donc non seulement policier mais un surhomme masqué, s’interroge alors : « Hmm… Il y a quelque chose d’étrange là dessous… ». Mais oui mon bon Dan ! Une bombe qui explose dans une banque, ça n’a rien d’habituel ! Bravo pour cet exemple marqué d’un instinct aiguisé de justicier ! Mais plus sérieusement l’intuition de Dan Garret a des raisons plus solides de se manifester. Quand un « client » se rue vers lui en lui demandant d’organiser l’évacuation des gens à l’extérieur, Dan tique : « Hé! Tu ne serais pas un des gars de Porky Ferro des fois ? Je savais qu’il y avait quelque chose de suspect ! ». Pour toute réponse le gangster l’assomme avec la crosse d’un revolver. Joan est d’abord furieuse contre la brute mais bientôt la colère laisse place à la peur : tout les autres s’enfuient en laissant Dan à terre. Elle a beau les implorer de ne pas le laisser là alors que les explosions continuent de ravager la banque, rien n’y fait. Il faut même penser que dans la cohue Joan est bien malgré elle poussée hors de la banque sans pouvoir aider son ami car quelques instants plus tard une silhouette solitaire peut se glisser derrière le guichet. Il s’agît de Death Mask : « Très bien ! Mon plan fonctionne parfaitement ! ».
On l’aura compris, les explosions n’étaient qu’une diversion pour vider la banque, laissant le gang livre d’agir sans être dérangé. Sous son masque de crâne vert, Death Mask ricane : « Ha ha ! C’est presque trop facile ». Mais son gang qui l’attends non loin de là est moins tranquille et le presse d’en finir : « Allez ! On a l’argent ! Mais il ne faut pas perdre de temps ! On doit s’en aller ! ». Trop tard : Alors que Death Mask leur confie une lourde sacoche pleine de billets, le symbole du Blue Beetle apparaît sur le mur. Les fidèles lecteurs de cette rubrique se souviendront en effet que le héros, s’inspirant de certains gadgets du Green Hornet, précède en quelque sorte le signal lumineux associé deux décennies plus tard avec Spider-Man. En lieu et place d’une araignée rouge, le logo qui apparaît est bien étendu celui d’un scarabée bleu mais la logique est la même. Le signal annonce l’entrée en piste du héros masqué et, bien que ce soit un non-dit dans l’histoire, c’est à croire que Dan Garret a seulement fait semblant d’être assommé pour pouvoir semer Joan et utiliser son autre identité.
En voyant arriver le super-héros le gang a peur. Mais leur nouveau chef est moins impressionné : « Le fameux Blue Beetle, hein ? Peut-être que je devrais avoir peur de toi… Mais le Death Mask peut tuer simplement en pointant son doigt ! ». Et bien sur le gangster masqué lève la main vers son adversaire. Sauf que cette fois ça ne produit aucun résultat ! Le héros plaisante : « Et bien quoi ? Ton charme n’opère plus ? ». Son « doigt de la mort » ne fonctionnant plus, Death Mask décide d’utiliser des méthodes plus traditionnelles. Il prend la sacoche de billets et ordonne à son gang d’attaquer le héros. Après tout ils ont le nombre pour eux. Pas impressionné Blue Beetle s’écrie « D’autres ont essayé avant ! Mais si vous voulez tenter votre chance… J’ai bien peur que cela donne encore la même histoire ! ». C’est que Blue Beetle, en plus d’être rendu fort et endurant pas une super-vitamine, porte une lourde côte de maille. Autrement dit les gangsters tapent sur un personnage à la résistance surhumaine qui porte en plus une véritable protection. Pas évident de venir à bout de lui !
Le temps que Blue Beetle vienne à bout des hommes de main, Death Mask s’est cependant assez éloigné pour s’enfuir. Une poursuite s’instaure et, après être sorti de l’édifice, le bandit au masque vert bloque la porte de la banque avec une pancarte. Blue Beetle est obligé de défoncer la vitre pour courir après le gangster : « C’est nécessaire. Mais je m’excuserais pour ça auprès de la direction ! ». C’est sur qu’avec une banque ravagée par des explosions et l’argent dérobé la direction n’a sans doute que ça à faire que se lamenter sur le sort d’une simple vitre… Mais l’important c’est que la ruse de Death Mask a fonctionné : elle assez retardé le héros pour que le criminel prenne la poudre d’escampette. Mieux : à l’extérieur Blue Beetle trouve le masque vert, le chapeau et l’imperméable de Death Mask. Autrement dit le bandit s’est enfuit en reprenant une identité « civile » que Blue Beetle ne connaît pas. Autant dire qu’en théorie notre héros n’a plus aucune piste pour retrouver le « cerveau » du gang. Mais au loin il reconnaît un autre membre du gang : « C’est Muggsy ! Il doit être sorti par l’autre porte de la banque. Je peux m’en servir je pense ! ».
Bientôt le dénommé Muggsy est rejoint par Death Mask, reconnaissable à son masque vert : « Euh… oh c’est vous boss ! Mais qu’avez vous fait de l’argent ! ». Death Mask le presse « T’occupe pas de ça ! Partons d’ici et vite ! Et passe devant crétin ! Je m’occuperais de quiconque tenterait de nous suivre ! ». N’osant pas contredire son patron, l’homme de main ouvre la marche. Sous le masque vert… le Blue Beetle ricane. Car c’est bien le héros qui s’est simplement servi du déguisement abandonné devant la banque : « Je savais que cet idiot tomberait dans le panneau ! Maintenant je vais pouvoir découvrir où ce gang se cache… ». Avec cette ruse, Muggsy va tout bonnement mener le héros vers le repaire du vrai Death Mask… La maison est plongée dans le noir et, en y entrant, le faux Death Mask ordonne à Muggsy d’allumer la lumière (normal, le Blue Beetle n’a aucune idée d’où se trouve l’interrupteur). Seulement voilà, quand l’endroit est éclairé Muggsy découvre qu’il y a un autre Death Mask dans la pièce ! Le vrai ! Muggsy a beau savoir où se trouve le bouton ce n’est pas pour ça qu’il est, lui, une lumière. Il hésite d’abord et croit voir double. Avant que le vrai Death Mask le détrompe : « Non, mais ce que tu vois est une ruse ! Bien que ça ne soit pas assez rusé ! Ce type, c’est notre vieil ami, le Blue Beetle ! ». La mascarade n’ayant plus de sens, le héros enlève son déguisement de Death Mask, révélant son armure bleue.
A nouveau l’homme au crâne vert pointe son doigt mortel vers le justicier : « Alors tu penses que tu peux de nouveau échapper au doigt de la mort, Blue Beetle ? ». Mais cette fois encore le héros est loin d’être impressionné : « Oui mon ami ! Ces petites fléchettes que tu tires de ta manche n’ont aucun effet sur mon armure ! ». Sentant le vent tourner Muggsy s’écrie : « Hey… je suis neutre ! ». Et le Blue Beetle peut alors tranquillement sauter sur Death Mask et lui donner un puissant coup de poing qui fait voler le criminel à travers la pièce. Il ne reste plus que Muggsy à neutraliser. D’autant que Blue Beetle a une raison bien particulière de lui en vouloir, qu’il lui explique en lui donnant à lui aussi un coup de poing : « Tu est le gars qui m’a assommé dans la banque, hein ? Avec ça nous serons quittes ! ». Sauf bien sûr qu’en théorie cette explication est une très mauvaise idée : Muggsy n’a pas assommé Blue Beetle dans la banque. Il assommé Dan Garret. C’est un peu comme si Blue Beetle venait de lui expliquer qu’en réalité il est le jeune policier que Muggsy a pu croiser pour lui. Heureusement pour le héros et comme nous l’avons déjà dit Muggsy n’est pas vraiment une lumière. Il ne relève donc pas ce qui est, à la base, une erreur scénaristique. L’identité secrète de Garret est donc sauve. Ouf !
L’ennui c’est que si le secret est à l’abri on ne peut pas en dire autant du héros lui-même. Vous pensiez qu’avez Muggsy neutralisé s’en était fini du gang de Death Mask ? Blue Beetle aussi sans doute. Mais c’est à ce moment là que le reste de la bande (sans doute les hommes que le héros avait battu devant la banque) rejoint le repaire. La porte s’ouvre et plusieurs gangsters s’introduisent dans la pièce. Au début Blue Beetle fanfaronne à nouveau, tout en leur sautant dessus : « Bien… est-ce que je ne vous ai pas déjà croisé quelque part dans la journée ? ». Et c’est vrai qu’après tout si leur nombre n’a pas suffit plus tôt, Blue Beetle a toutes les raisons de penser qu’ils ne feront pas mieux cette fois. Sauf qu’il n’a pas vu un des gangsters s’approcher de lui par derrière. Il lui donne un coup de crosse (visiblement c’est un gang qui aime bien assommer les gens en faisant usage de la crosse, à se demander pourquoi ils ne portent pas des matraques au lieu de ces revolvers qui leur servent si peu à tirer). Le Blue Beetle s’effondre à terre. Death Mask ordonne à ses hommes de le laisse le « finir ». L’homme au crâne vert approche alors, une hache à la main. Il la lève, prêt à décapiter le héros. Mais à nouveau la porte du repaire s’ouvre. Cette fois il s’agit de Joan Mason, accompagnée du policier Mike Mannigan. Quand à savoir ce qu’ils font là… Le commentaire nous explique que Joan et Mike ont suivi la trace des derniers hommes de la bande (ceux arrivés juste avant eux), ce qui leur a permis de découvrir le repaire. Bien sûr en théorie Joan devrait plutôt être du côté de la banque pour venir en aide à un Dan Garret qu’elle croit inconscient au milieu d’un édifice ravagé par les explosions mais l’histoire n’a pas l’air de s’en soucier…
Joan s’élance vers Death Mask et tente de lui arracher sa hache des mains. Mais elle n’est qu’une « simple femme » et le gangster la neutralise sans peine. De son côté Mike tombe bientôt devant le nombre de ses adversaires. En définitive l’aide apportée par Joan et Mike n’a pas apporté grand chose. Mais elle a au moins fait diversion. Au lieu de décapiter Blue Beetle, Death Mask décide de se débarrasser des trois curieux en utilisant une autre méthode. Bientôt, quand Blue Beetle revient à lui, ses deux alliés et lui ont été ligotés dans la même pièce. Joan lui explique : « Cette brute a pensé à une manière vicieuse de nous éliminer ». Death Mask est effectivement en train de terminer d’installer un dispositif mortel. Il explique : « Vous n’aurez pas besoin d’attendre longtemps ! Désolé, je ne pourrais pas rester… Ca pourrait être dangereux quand ce bidon de gazoline va exploser… Et tiens, si quelqu’un appelle vous n’aurez qu’à lui dire que je suis parti faire un hold-up, si cela ne vous fait rien… ». Blue Beetle acquiesce : « OK mais laisse moi te promettre une chose… ». Il n’a pas le temps de conclure sa phrase qu’elle est déjà complétée par Joan : « … et c’est que tu ne t’en tireras pas comme ça ! ».
Seulement, une fois Death Mask parti, les héros font moins les fiers. La pièce dans laquelle ils se trouvent va bientôt exploser. Elle est déjà envahie de vapeurs. Et ils n’y peuvent rien: Joan et Mike sont ligotés sur des chaises tandis que Blue Beetle est attaché à un poteau. A l’autre bout de la pièce ils peuvent voir la mèche du bidon qui est en train de brûler. Quand elle aura fini de brûler… BOOM! Mais en se penchant Blue Beetle peut atteindre avec sa tête un lavabo non loin de lui. Il ne peut bien sur pas se servir du robinet avec ses mains mais en se servant de ses dents il active l’arrivée d’eau. Puis il boit… avant de se retourner et de cracher sur la mèche toute l’eau qu’il vient d’avaler. Le bidon ne risque plus d’exploser. Alors Blue Beetle peut bander ses muscles et déchirer les cordes qui le retenaient. Bien sur, s’il pouvait faire ça depuis le début alors on se demande pourquoi il a d’abord tenu à gesticuler autour d’un robinet manié avec sa bouche. Mais bon, passée cette contradiction, l’important est que le héros est libre. Il s’élance alors au dehors pour empêcher le futur hold-up de Death Mask, laissant à Joan le loisir de détacher Mike. Il faut dire aussi que Blue Beetle n’est sans doute pas pressé de perdre du temps avec Mike. Car tout comme il est convaincu que son co-équipier Dan est un gentil gars pas très compétent, Mike croit également dur comme fer que Blue Beetle est un criminel qui ne fait qu’éliminer la concurrence. Un fil rouge de la série est que Mike est obsédé par l’idée de capturer Blue Beetle (mais sans grand résultat). Mike a un petit côté J.J. Jameson…
Ailleurs dans la ville la voiture du gang de Death Mask bloque le passage à un fourgon blindé, que les criminels veulent dévaliser sous la menace de leurs armes. Death Mask point déjà le bras vers le chauffeur, s’apprêtant à le tuer avec son « doigt de la mort ». Mais bientôt un scarabée bleu lumineux apparaît sur le flanc du fourgon. Death Mask est tellement surpris qu’il en bégaye : « Le.. le Blue Beetle ! Encore… vivant !!! ». Cette fois pas question de prendre le héros par surprise. Il neutralise d’abord Death Mask puis le reste du gang et les enferme à l’intérieur du fourgon qu’ils pensaient braquer : « Et voilà ! C’est l’argent que vous vouliez, non ? ». Mais on voit Death Mask s’enfuir en sautant par dessus une palissage : « Mais.. tu n’a pas fini d’entendre parler de moi ! ». Puis l’épisode se finit avec Mike qui raconte à sa manière les événements à Dan Garret puisqu’il croit qu’il était absent. D’après Mike, si Dan avait été là ils auraient pu coffrer toute la bande. Malheureusement, toujours d’après Mike, si le leader du gang a pu s’enfuir c’est grâce à Blue Beetle. Dan s’amuse, expliquant à Mike qu’après tout Blue Beetle coffrera peut-être Death Mask par la suite. Mike tempête en reconnaissant que ça pourrait arriver mais qu’il espère bien, lui, mettre la main sur Blue Beetle avant…
Cette conclusion semble promette à Death Mask un bel avenir d’ennemi régulier de Blue Beetle, qui deviendrait alors une sorte de Red Skull (l’ennemi juré de Captain America) dans la série. Après tout les auteurs de Blue Beetle avaient des raisons de vouloir revendiquer l’archétype du super-villain au visage en forme de crâne.
Bien avant la création de Captain America et du Red Skull, Blue Beetle avait déjà un adversaire nazi nommé le Skull. Seulement ce Skull mourrait dans un crash d’avion à la fin de l’épisode où il apparaissait (Mystery Men Comics #14). A partir de là il est difficile de savoir si les scénaristes ont consciemment décidé de créer un autre pseudo-Skull ou si simplement l’idée d’un criminel ressemblant à la Mort était un cliché qui, par la force des choses, ne pouvait que ressurgir. Ce qui est certain c’est que les auteurs de Blue Beetle utilisèrent plusieurs fois la même recette.
Et sans attendre même l’apparition de Death Mask : Dans Mystery Men #30 (janvier 1942), Blue Beetle avait déjà pu affronter un criminel portant un crâne pour visage. Cette fois simplement appelé Death (« Mort »), le gangster pouvait apparemment voler et emprisonnait des gens dans une mine de radium en leur faisant croire qu’ils étaient tombés dans l’Au-Delà. En fait, il s’agissait de les réduire en esclavage pour les forcer à travailler dans la mine. Ni le Skull de Mystery Men Comics #14 ni le Death de Mystery Men #30 ne pouvaient se réduire à des imitations du Red Skull. Pour le Skull, c’est facile à prouver : son apparition était antérieure à celle de Red Skull. Pour Death, le personnage porte bien un masque imitant un crâne (blanc) mais ses méthodes se distinguent clairement de Red Skull. Pour le troisième adversaire à tête de mort de Blue Beetle, c’est par contre une toute autre histoire…
Car si on regarde bien la méthodologie de Red Skull est omniprésente dans le comportement de Death Mask. Certes l’ennemi de Captain America est nazi tandis que celui de Blue Beetle n’est qu’un simple voleur de banque. Mais ils ont la même manière de faire. En effet lors des premières apparitions du Red Skull Joe Simon et Jack Kirby avaient pris soin de lui donner un gimmick : Le Red Skull faisait toujours semblant de tuer d’une manière surnaturelle, immédiate, alors qu’en fait l’explication se cachait dans son costume. Dans Captain America Comics #1, le Red Skull fait croire qu’il peut tuer d’un simple regard alors qu’en fait il injecte discrètement un poison à ses victimes. Dans Captain America Comics #3, le Red Skull revient en faisant croire qu’il possède désormais « le toucher de la mort » : Il lui suffit (en apparence) d’entrer en contact avec quelqu’un pour le tuer. En fait le nazi a équipé son costume d’un gadget qui électrocute ses victimes quand il les touche. Par la suite cette méthode disparaîtra mais il semble clair que le « toucher de la mort » et l’explication d’un truc caché dans le costume est très semblable au « doigt de la mort » utilisé par Death Mask et à sa manche qui cache en fait un système d’éjection de fléchettes empoisonnées. D’ailleurs Joe Simon et Jack Kirby n’appliquaient pas cette logique qu’au seul Red Skull. Dans Captain America Comics #6 (publié à l’automne 1941) ils avaient inventé un autre terroriste, le Camera Fiend, dont l’appareil photo semblait mystérieusement privé de vie les personnes qu’il photographiait. En fait l’appareil cachait… un système de lancement de fléchettes empoisonnées. Fléchettes auxquelles Captain America pouvait résister puisqu’elles s’écrasaient sur son bouclier (de la même manière que les fléchettes de Death Mask s’écrasent sur l’armure du Blue Beetle). Il est certain qu’en 1942 les auteurs de Blue Beetle cherchaient à émuler le Captain America de Simon & Kirby, un procédé qu’on retrouverait en d’autres endroit de la série. Par exemple en 1944 Blue Beetle affronterait le Prophetic Painter : un assassin qui prenait le soin de peindre d’abord la mort de certaines personnes avant de les tuer, de manière à faire croire à une sorte de malédiction. Comme par hasard Simon & Kirby avaient créé dès 1941, dans Captain America Comics #9, un peintre fou nommé le Black Talon qui avait exactement les mêmes méthodes. 1942 marque le début d’une opération d’envergure pour donner à Blue Beetle le même folklore que celui de Captain America (c’est d’ailleurs cette année là qu’on donnerait au Beetle son sidekick, Sparky, en lieu et place du Bucky accompagnant Cap). Il ne fait donc guère de doute que Death Mask était pensé comme une imitation du Red Skull plus que comme un successeur du « Skull » ou de « Death ».
Malgré ces efforts, la promesse de Death Mask de revenir et celle du Blue Beetle de le capturer un jour, on ne reverrait pourtant pas Death Mask dans la série. Enfin presque pas car le mois suivant, dans Blue Beetle #14, il y a bien un assassin portant un masque en forme de crâne vert mais il a un nom différent : The Red Robe (ou plus exactement « The Red Robe of Death« . Un simple lapsus qui aurait fait qu’entre le #13 et le #14 on se serait trompé sur le pseudonyme utilisé par le criminel ? Pas vraiment. Car l’histoire établi clairement l’identité du Red Robe : Otto Bohm, « chef de la Gestapo en Amérique ». Le Death Mask n’était qu’un gangster intéressé par l’argent tandis que le Red Robe, malgré un masque identique, était un saboteur nazi. En fait le Red Robe était tout simplement une autre imitation du Red Skull mais s’appuyant sur d’autres points communs. Pourtant la parution de deux ennemis si similaires à un numéro d’écart ne semble pas être accidentelle puisque dans les deux on reconnait le même style de dessin (que la base de référence Comics.org attribue à Charles Quinlan). L’équipe créative était donc au moins en partie la même, sinon totalement identique. Elle ne pouvait ignorer ce qui s’était passé dans le numéro précédent et il ne s’agit pas de deux groupes d’auteurs à qui on aurait commandé des histoires sans réaliser qu’elles se ressemblaient. Peut-être qu’avec l’avancement de la guerre le scénariste ou l’éditeur pensèrent qu’il valait mieux que Blue Beetle ait un ennemi « à face de crâne » qui soit un vrai nazi plutôt qu’un simple cambrioleur. A partir de là on ne revit pas Death Mask, qui avait d’une certaine manière était « remplacé » par Red Robe. Encore que Red Robe n’aurait pas plus de longévité que son prédécesseur. Il faut dire qu’entre le Death de Mystery Men #30, le Death Mask de Blue Beetle #13 et le Red Robe de Blue Beetle #14 les fans du héros s’étaient farcis trois « faces de crânes » entre janvier et septembre 1942 ! Et çà sans même compter le Skull de 1940. Cela commençait un peu à faire. Et puis surtout, avec l’arrivée imminente de Sparky, le pseudo-Bucky, les épisodes seraient sans doute devenus un peu « voyants » si on y avait croisé dans la même page un clone de Red Skull et un clone de Bucky. Passé cette date le Blue Beetle du Golden Age ne croisa donc plus vraiment d’assassins portant des masques mortuaires. Le dénommé Death Mask court donc toujours…
[Xavier Fournier]
Je crois qu’on tient là un specimen rare ; un supervillain raisonnable.
Au lieu de revenir, encore et encore, échafauder des plans improbables (qui ne lui apporteront que des ennuis) , il a choisi, sagement, de retourner à la vie civile, trop heureux d’avoir échappé à la prison…
Ou bien… Ou bien dans ce fameux moment où il disparaît de l’autre côté de la palissade il tombe, se casse les deux jambes et est obligé de changer de métier 😉