Oldies But Goodies: Pep Comics #17 (Juil. 1941)
24 février 2009[FRENCH] Ca commence comme une aventure de Comet (un super-héros dont nous avions déjà parlé dans cette rubrique) et ça se termine avec un héros totalement différent, annonciateur à plus d’un niveau de choses qui plus tard, bien plus tard, trouverait un nouveau débouché dans le Watchmen d’Alan Moore et de Dave Gibbons. Séance flashback…
La plupart des fans de comics savent que la majeure partie des Watchmen sont des équivalents des super-héros anciennement publiés par la firme Charlton (Captain Atom, Blue Beetle…). Mais la série de Moore & Gibbons joue sur plusieurs époques et en particulier des flashbacks qui reposent sur l’Age d’Or et une équipe de super-héros des années 40, les Minutemen. Et ces derniers, eux, ne sont pas inspirés par Charlton mais par les héros masqués anciennement publiés par la firme Archie. C’est le modèle d’un des plus charismatiques des Minutemen que nous allons étudier : le Hangman, qui dans Watchmen est devenu « Hooded Justice »…
« The Origin Of The Hangman » commence bizarrement comme une aventure d’un héros totalement différent, The Comet (par ailleurs sorte de chainon manquant entre Superman et le Cyclops des X-Men). L’histoire commence alors que ce personnage au costume étoilé passe au commissariat déposer quelques gangsters qu’il vient de capturer, tout en leur précisant que ces hommes de « Big Boy Malone » plus le témoignage de John Dickering suffiront à faire condamner Malone. Mais les policiers ne sont pas très reconnaissants. Au contraire ils accueillent The Comet sous une pluie de balles. Le problème, c’est que dans les épisodes précédents Comet a accidentellement causé la mort d’un policier. Du coup les représentants de la loi ne portent pas le héros dans leur cœur… Alors même que le sentiment de culpabilité fait que Comet redouble d’effort pour « expier » et racheter sa faute.
Après ce passage houleux au commissariat, Comet rentre chez lui où il est accueilli par sa fiancée, Thelma. Chose assez rare pour l’époque, Thelma est tout à fait au courant de la double vie de Comet, qui est en fait le fameux John Dickering (voilà pourquoi le héros masqué pouvait affirmer sans se tromper que Dickering irait témoigner). Thelma est inquiète au sujet de l’homme de sa vie. Elle trouve qu’il en fait trop, au point de mettre sa vie en danger alors que – en ce qui la concerne – il a depuis longtemps racheté la mort accidentelle de ce policier. S’il voulait cesser sa vie dangereuse, elle serait prête, enfin, à l’épouser. Mais John Dickering refuse, expliquant que sa conscience ne le laisserait jamais tranquille.
Mais c’est alors que John Dickering est encore habillé à moitié en super-héros qu’un nouveau personnage fait son apparition. Robert, le frère de John, passait lui dire bonjour et… le voici qui surprend John avec une partie du costume de Comet. Il comprend donc immédiatement que John et le héros masqué ne sont qu’un. Le Comet! Le héros que Robert admire tant (même si l’histoire n’explique en rien comment et pourquoi Robert pourrait admirer un personnage publiquement recherché pour la mort d’un flic). John et Robert tombent dans les bras l’un de l’autre. John le croyait encore au collège mais « Bob » a terminé ses études avec les honneurs. Et quand Thelma s’étonne que John ne lui ai jamais parlé de ce frère (que les lecteurs ne connaissaient pas mieux), Comet explique (en ironisant) que Robert est bien plus charmeur que lui et qu’en conséquence il évite d’en parler… D’ailleurs John Dickering a encore du travail ce soir. Il est trop occupé pour sortir mais propose à Thelma et Robert d’aller diner sans lui… Pendant ce temps les hommes de « Big Boy Malone » ont entendu parler du possible témoignage d’un certain Dickering. Leur chef leur ordonne bien sûr d’aller éliminer ce témoin gênant.
De retour chez John après leur sortir, Thelma et Bob se sont visiblement bien amusé. Tellement, en fait, que Comet (qui est resté habillé en super-héros pour faire ses expériences dans son laboratoire, et on se demandera donc pourquoi il se changeait quand son frère est arrivé plus tôt) commence à ressentir de la jalousie… Bob ne serait-il pas déjà un peu amoureux de Thelma ? En écoutant les moqueries de John, le petit frère est vexé. Il quitte alors l’appartement tandis que Thelma se met en colère contre John… C’est là que le drame se joue.
Les hommes de Malone arrivent devant chez John et demandent au premier venu (en l’occurrence Bob) si son nom est bien Dickering. Et l’autre répond, bien sûr, par l’affirmative. Immédiatement les gangsters l’enlèvent, convaincus qu’ils tiennent le bon larron. Comet, lui, voit la scène de sa fenêtre. Avec sa visière et son regard-laser, Comet a tôt fait de détruire la voiture des criminels, donnant à Bob l’occasion de s’enfuir. Mais les criminels ont l’ordre d’abattre coûte que coûte « monsieur Dickering ». Ils sortent alors leurs revolvers et tirent sur Bob. Comet, qui arrive sur eux en volant, décident alors d’attirer leur feu pour laisser à son frère une chance de s’en sortir. Voyant le super-héros arriver vers eux, les hommes de Malone changent bien évidemment de cible et tirent sur Comet, qui tombe… C’est au passage une erreur de logique interne puisque dans le tout premier épisode de Comet (Pep Comics #1) il avait été établi que les pouvoirs du héros lui permettait très précisément de désintégrer les balles, simplement en les regardant. Sans doute qu’il y en avait trop ou que Comet n’a pas eu l’occasion de les regarder toutes avant d’être mortellement blessé. La police arrive sur ces entrefaites, convaincue de tomber sur une guerre des gangs et commence à tirer sur la bande de Malone…
Dans la cohue, Robert peut s’approcher du corps de son frère et l’emmener à l’abri. Empruntant une échelle extérieure, Bob a tôt fait de hisser Comet jusqu’à l’appartement de John Dickering, où ils retrouvent Thelma. Les dernières paroles de John/Comet sont alors de demander à Bob et à Thelma de rester ensemble, ce qui serait une manière d’honorer sa mémoire. Puis il meurt… Aussitôt Robert laisse alors exploser son désir de vengeance. Il s’enferme dans le laboratoire de John pour mettre au point… un nouvel uniforme. Selon une logique qui est une allusion à peine voilée aux débuts de Batman, Robert se dit à voix haute que les criminels sont des couards et qu’il lui faut un uniforme qui leur inspirera de la peur. Il devient alors… le Hangman (le Bourreau) !
Au tribunal, pour des raisons qu’on sait, John Dickering ne se présente pas pour témoigner contre Malone. Ses hommes sont donc libérés après qu’un non-lieu ait été prononcé. Ils se pensent tirés d’affaire mais soudain le Hangman surgit de derrière un des piliers du palais de justice. Il jette une poudre au visage d’un des gangsters (qui le plonge dans un profond sommeil) et s’enfuit avec sa victime avant que les autres gangsters aient l’occasion de réagir. Le Hangman enferme le criminel captif dans une cabane reculé et entame une guerre des nerfs avec sa victime, lui faisant croire qu’une potence est en train d’être construite. Hangman utilise pour cela une sorte de précurseur du Spider-signal de Spider-Man: il a une lampe qui lui permet de projeter partout où il veut l’ombre d’une potence (imagerie assez adéquate pour un bourreau). Le criminel se croit perdu et implore qu’on le laisse en vie… quitte à tout balancer sur son patron. C’était, bien sûr, ce que voulait le Hangman… Dès qu’il a la confession, Hangman téléphone à la police et, sans perdre de temps, se rue lui-même chez Malone. Ce dernier a bientôt la mauvaise surprise de voir apparaître sur un mur de son repaire la lugubre silhouette d’une potence. Le Hangman a tout le loisir de casser la figure à Malone, jusqu’à l’arrivée de la police (qui, dans le doute, tire aussi sur le Hangman tout comme ils le faisaient sur Comet). Le « Bourreau » n’a plus qu’à s’éclipser…
Quelques temps plus tard, Malone est condamné à mort et fini pendu, comme de bien entendu. Robert explique alors à Thelma (au cas où elle n’aurait pas compris) que Comet est mort mais que son esprit survit à travers le Hangman et qu’il traquera désormais les criminels partout où ils pourraient se cacher. C’est le début de la carrière d’un nouveau super-héros mais c’est aussi… la première fois de l’histoire des comics qu’un super-héros (Comet) était assassiné. Autant dire que Watchmen, qui repose sur le meurtre du Comedian, est un lointain descendant de cet épisode et que la présence du Hooded Justice (équivalent du Hangman, mélangé avec quelques aspects d’un autre héros de la même firme, le Black Hood) ne doit rien au hasard mais est au contraire une reconnaissance induite de tout ce pan d’histoire des super-héros.
[Xavier Fournier]
Des rubriques « Oldies but goodies » en pleine semaine , Mais vous êtes de grands fous chez Comic Box…lol. Gardez en un peu pour le week-end malgré tout !
Y’en aura aussi 😉
Un héros déguisé en bourreau… Décidément, dans le golden Age , on faisait parfois dans le macabre… Mais ce n’est rien à côté du Hooded Justice, dont on peut se demander, à la lecture de Watchmen, si c’est un vrai super-héros ou simplement un sadique uniquement motivé par le désir de tabasser des gens et pour qui la lutte contre le crime n’est qu’un prétexte…
PS : Au fait, qui est l’équivalent de Comet dans Watchmen ?
Sauf erreur pas vraiment d’équivalent pour Comet (qui aurait alors été une sorte de Doctor Manhattan du Golden Age ?). Les Crimebusters ne sont pas une reprise *systématique* des héros archie. Quand à savoir si le Hooded Justice est un sadique… a priori pas vraiment, en tout cas rien dans les scenes effectives ne le laisse transparaitre. Dans la série ce sont des tierces personnes qui l’insinuent, souvent par crainte ou jalousie.
En fait,il semblerait que ce super-héros n’ait pas inspiré que Watchmen,il y avait aussi un « Hangman » dans les premiers épisodes de Spider-Woman(parus dans Nova).
Oui. Encore que le terme de « Hangman » est assez générique pour qu’il n’y ait pas forcément une « inspiration ». D’ailleurs Marvel/Timely a eu un « Hangman » dans les années 40, qui était un nazi adversaire de Captain America. Mais les propriétaires du premier Hangman (celui de Pep Comics) étaient déjà assez énervés de s’être fait plagier le Shield (qui a servit de modèle à Cap) et tout ça c’est finit dans une réunion tendue entre les deux concurrents au terme de laquelle Marvel s’est engagé a ne plus utiliser « leur » Hangman de l’âge d’or, pour éviter tout problème.
« Quand à savoir si le Hooded Justice est un sadique… a priori pas vraiment, en tout cas rien dans les scenes effectives ne le laisse transparaitre. Dans la série ce sont des tierces personnes qui l’insinuent, souvent par crainte ou jalousie. »
Il est quand même question de VIOLS commis par Hooded Justice dans le bonus de l’épisode de Silk Spectre.
L’épisode dont vous parlez est paru en 2012, dans une série apocrype pas écrite par les auteurs d’origine. Surprise : l’article que vous commentez a été publié lui en 2009, trois ans avant. Je ne risquais pas d’y faire référence. Je ne minimise jamais les viols. Ou les VIOLS, puisqu’il semble qu’il faille l’écrire en capitale. Mais dans Watchmen (pas Before Watchmen), Hooded Justice n’en commet aucun, au contraire il s’y oppose. Et c’est le seul matériel qui existait à l’époque de l’écriture de l’article. Tout comme un Oldies sur Superman écrit en 2009 ne risque pas de tenir compte des Action Comics de Morrison. Au regard du comportement d’HJ dans le vrai Watchmen, allez le décrire en violeur dans Before Watchmen était quand même une belle idée de merde. A se demander si quelqu’un ne cherchait pas à illustrer la dénaturation du concept d’origine.
» le bonus de l’épisode de Silk Spectre. »
Il s’agit de la lettre écrite par le (futur) mari de Silk Spectre Senior ou il est question de jeunes garçons qui risque de révéler « quelque chose ».
On y apprend aussi que Hooded Justice et Captain Metropolis sont amants et que Silk Spectre fait croire qu’elle est avec le premier pour éviter un scandale.