Signé par un certain Malcom Kildale, les aventures de Spitfire ne commencent pas pendant la seconde guerre mondiale mais bien 200 ans auparavant, alors qu’une « bande d’aventuriers anglais » voyage vers le Nouveau Monde à bord d’un trois-mats. Le capitaine de l’équipage est un certain Black Douglas (ou « Douglas le Noir »), excellent combattant. Mais un jour, alors qu’ils ont quitté les rivages anglais depuis des semaines, ils repèrent un autre navire qui approche. Et cette rencontre est loin de les remplir d’aise puisque ce nouvel arrivant porte le « Jolly Roger », le drapeau des pirates. Douglas comprend immédiatement qu’ils sont sur le point de se faire attaquer. Les deux bateaux échangent des coups de canon mais rien n’arrête réellement la progression des pirates. Bientôt ils sautent sur le pont du trois-mats de Douglas. Lui-même commence à se battre à l’épée. Mais les pirates sont trop nombreux. Les hommes de Douglas sont battus et ils sont traîné devant le capitaine pirate, une sorte de gnome au nez écarlate.
Pendant des heures Douglas reste prisonnier de sa barque. Le soleil de plomb ne manque pas de déclencher une soif terrible. Au point qu’il croit un instant perdre l’esprit quand il aperçoit une île dans le lointain. On ne lui a pas laissé de rames mais il s’efforce alors d’utiliser ses mains pour diriger l’embarcation dans la bonne direction. Quelques instants plus tard, Douglas arrive sur cette ile déserte et privée de toute végétation. Heureusement pour lui, il trouve une source d’eau douce et se désaltère, même si l’eau en question a un goût étrange. Mais le répit est de courte durée. Rien ne pousse sur cette île. Il n’y a pas de flore, pas de faune. Il n’y a donc rien à manger. La seule chose notable, c’est une étrange vapeur qui sort du sol. Puisqu’il ne peut pas se laisser mourir de faim, Douglas se dit qu’il sera obligé de repartir et de tenter sa chance en mer (il est quand même assez curieux que le marin ne puisse pas trouver le moindre poisson ou coquillage sur les rivages de l’île). Il lui faudra repartir, oui, mais pas avant une bonne sieste. Douglas tombe de sommeil et décide de se reposer un peu avant d’entreprendre son périple…
Dans le genre, Douglas n’est sans doute pas aussi en avance que Captain America ou Marvel Boy pour dénoncer les manigances des nazis. Mais on est encore courant 1941 et cette mention reste encore assez avant-gardiste dans un comic-book américain, même si Douglas est anglais. Encore que. Le risque est un peu grand pour l’éditeur et toutes les mentions du terme « Nazi » sont orthographiées « Nazti » (jeu de mot entre Nazi et « Nasty », méchant en anglais). Officiellement les méchants de l’histoire sont donc membre d’un parti imaginaire… qui ne trompera personne ! Bientôt, les allema…. pardon, les naztis remarquent la barque et pensent à une sorte de canular. Ils font monter à bord le rescapé pour mieux pouvoir l’interroger. A plus forte raison après que Douglas se soit aperçu que le « monstre » est une sorte de navire. Il se présente alors ainsi : « Salutations Gentlemen ! Peut-être pourriez-vous me ramener dans cette bonne vieille Angleterre dans votre étrange navire ? ». Demander à des « naztis » de le déposer en Angleterre en 1941 revient à passer pour un plaisantin ou un malade mental. Bientôt Douglas raconte son histoire au capitaine du sous-marin et, curieusement, le marin nazti ne remet pas en cause son histoire. On aurait pu s’attendre à ce qu’il pense que tout ça n’était qu’une fable inventée par un espion anglais. Ou encore qu’il s’agisse d’un délire d’un naufragé trop resté au soleil. Mais non. A la fin du récit de Douglas, le nazti s’écrie au contraire : « Mais l’époque dont vous parlez remonte à deux siècles ! ».
Dans le périscope, il lui montre la marine britannique, ancrée non loin de là. Douglas saute de joie (encore que la vision de navires du vingtième siècle devrait plutôt éveiller sa curiosité) et demande à ce qu’on remonte à la surface. Mais c’est ce moment que le capitaine machiavélique a choisi pour lui révéler ses motivations réelles : « Pas si vite, chien ! Maintenant je peux te le dire : Nous sommes en guerre avec l’Angleterre et je vais te forcer à regarder pendant que nous détruiront tous ces bateaux ! Ha ha ! ». Mais le nazti avait sous-estimé la rage et la force de Douglas, qui l’assomme d’un coup de point.
Le sous-marin nazti fait surface. Vite repéré par la marine anglaise, il est alors pris pour cible. L’accueil est moins amical que ce que Douglas espérait. Il échoue le sous-marin sur une plage et court à l’abri pour éviter les tirs anglais. Mais il est distrait alors qu’un bruit de tonnerre s’élève dans le ciel. En fait, l’approche du sous-marin nazti faisait partie d’une attaque globale. Des avions naztis bombardent les installations anglaises. Un combat aérien s’engage et, soudainement, un pilote d’avion Spitfire touché (ah, le Spitfire qui donne son nom à la revue, on y vient !) n’a d’autre choix que se poser sur la plage. L’avion est intact mais le pilote n’est plus en état de se battre.
Une fois à l’intérieur, le héros appuie sur tous les boutons et l’avion fini par décoller. En l’espace de quelques minutes Douglas le Noir a donc été capable de manier un sous-marin et le voici qui fait décoller un avion sans jamais en avoir vu un. Douglas, marin venu du 18ème siècle, ne sait même pas ce qu’est un allumage. Il ne sait pas lire un tableau de bord. Bref, l’idée qu’il puisse faire décoller un avion à partir d’une plage, alors qu’il ne sait même pas quand il faut redresser, est surréaliste. Tout au moins les auteurs daignent quand même nous montrer que l’avion s’élève en faisant des loopings déments, jusqu’à ce que Douglas saisisse comment on dirige l’engin. Bientôt, il en a compris assez pour pouvoir prendre part au combat aérien. Douglas arrive à même à descendre des avions ennemis : « Et voilà ! Quelques « êtres supérieurs » en moins ! » s’écrie le marin. Il arrive d’ailleurs à lui seul a briser la formation de vol des avions naztis et en envoie encore quelques-uns vers le sol. Finalement les naztis sont tellement mis en défaut par Douglas qu’ils préfèrent fuir, lâchant leurs bombes au dessus de l’eau pour qu’elles ne les retardent pas. Douglas les poursuit au delà de ce qui est raisonnable et traverse même la Manche, toujours à leurs basques. Seulement Douglas n’a aucune idée de ce qu’est le carburant. L’avion tombe en panne et Douglas se poser alors en catastrophe, sans trop savoir pourquoi l’engin ne fonctionne plus.
Ben… Il crachera du feu sans doute. L’idée d’un corsaire du 18ème siècle crachant le feu et sachant conduire intuitivement chaque nouvel engin rencontré est pour le moins… originale. Encore que le concept avait une limitation : posé derrière les lignes ennemies, Douglas pouvait difficilement trouver un autre avion Spitfire à piloter pour la suite de ses aventures. Dans le genre « héros aviateur », Spitfire est au moins aussi pittoresque que le Iron Ace (aviateur vêtu d’une armure médiévale que nous avons déjà mentionné). Et son côté lance-flammes humain le raccroche également à une certaine généalogie d’Human Torch. Quand au côté naïf, à la limite de la démence, du personnage (cette tendance à faire confiance aux soldats naztis qui approchent ou le moment où il se dit que, 200 ans plus tard, tous ses amis doivent être morts), on pourrait y trouver un petit côté Jack Sparrow. Néanmoins tout ça était vraiment trop gros pour fonctionner. Douglas le Noir savait se débrouiller pour faire voler un avion mais sa propre revue, elle, ne décolla jamais !
[Xavier Fournier](P.S.: Pendant quelques jours le site Comicbox.com va fonctionner en automatique (parce que, oui, nous aussi nous avons droit à la plage et aux vahinés !). Ce qui veut dire non pas un site figé jusqu’à notre retour mais un Oldies But Goodies quotidien pendant ce laps de temps (et ça commence, vous l’aurez compris, dès aujourd’hui). Par la même occasion vos commentaires éventuels risquent de ne pas apparaître tout de suite, en attente d’une validation, mais ils seront activés dès notre retour. Bonne lecture !)
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