Oldies But Goodies: Superman #13 (Nov. 1941)

14 mai 2011 Non Par Comic Box

[FRENCH] Qui fut le premier archer vert de DC Comics ? Les fans de DC Comics auront sans doute vite fait de pointer le doigt vers Oliver Queen, le premier Green Arrow. Mais, comme souvent, la réalité est un peu plus complexe. Bien que Green Arrow ait débuté en novembre 1941 il fait ex-æquo avec un autre personnage similaire, qui allait, lui, croiser le chemin de Superman. Mais comment deux archers verts pouvaient-ils ainsi apparaître spontanément le même mois dans deux revues du même éditeur ? Suivez la flèche…

En novembre 1941, les aventures de Superman sont encore officiellement produites par ses créateurs originaux, Jerry Siegel et Joe Shuster. En fait c’est un peu plus compliqué que ça. Shuster, touché par des problèmes croissants au niveau de sa vue s’éloigne graduellement de la série. Il signe encore mais ce sont déjà d’autres artistes qui, officieusement, prennent la relève. Par exemple Superman #13 est en fait dessiné par Leo Nowak (1907-2001), chargé de la série (mais pas crédité) entre 1940 et 1943. Le scénariste premier reste à bord mais, même à ce niveau, on note un changement de style. Depuis quelques mois la série a amorcé un virage. Jusque-là, en effet, Superman avait été animé par un esprit social assez fort, s’attaquant aussi bien à des gangsters « normaux » qu’à la corruption. Dans certains épisodes, il décidait que le jeu et l’argent étaient à la base de tous les vices… et menaçait les patrons de casinos qui n’auraient pas quitté la ville dans la journée. Dans un autre épisode, avec la même logique simpliste, Superman constate un nombre important d’accidents de voitures et menace cette fois-ci les constructeurs d’automobiles.

La version première de Superman, tel que publié entre 1938 et 1941 était essentiellement anti-capitaliste (voir gauchiste, ce qui dans l’Amérique du début des années 40 n’était pas un discours si évident). Quand ils avaient lancé Superman, Jerry Siegel et Joe Shuster étaient encore de grands adolescents un brin idéalistes, disons même un peu naïfs, qui imaginaient qu’un homme providentiel saurait régler les problèmes du monde les uns après les autres, qu’il s’agisse de la guerre, de la misère ou du crime. Quatre ans plus tard, le scénariste un peu mûri mais aussi un grand nombre de problèmes sociaux avaient déjà été mentionnés dans la série. D’une part il était difficile de continuer sur cette lancée sans expliquer pourquoi et comment le monde, sous l’influence de Superman, n’était pas irrémédiablement transformé. Par ailleurs il y avait tout bonnement un problème de répétition, avec des gangsters ou même des agents de police essayant de tirer sur Superman sans grand résultat.

A force, plus aucun lecteur ne pouvait décemment croire qu’une arme à feu pouvait réellement mettre en danger le héros. Il fallait faire monter la tension, déstabiliser le héros tout puissant en le mettant face à des personnages et des situations plus coriaces. C’est ainsi que le scénariste Jerry Siegel commença à injecter de plus en plus de savants fous (d’abord l’Ultra-Humanite dans Action Comics #13 mais plus notablement Lex Luthor dans Action Comics #23) qui donneraient plus de mal à l’alter-ego de Clark Kent. C’est cette même réflexion qui pousserait Siegel a proposer, vers 1940, qu’on invente un talon d’Achille à Superman, le K-Metal, mais DC, convaincu qu’un héros plus faible serait moins populaire, s’y opposa.

Globalement Siegel était lancé sur une logique visant à injecter dans les aventures de Superman de moins en moins de gangsters interchangeables mais de plus en plus de super-villains (ou tout au moins de prototypes de super-villains). On note cependant encore une certaine défiance envers les classes aisées. Les premiers super-villains de Siegel aiment à s’en prendre à des gens riches plutôt que de racketter les couches populaires. Exemple : Dans Superman #13 (novembre 1941), Superman affronte ainsi The Light (en fait Lex Luthor déguisé), un criminel qui kidnappe des hommes influents puis les hypnotise grâce à un système lumineux. Quelques pages plus loin, dans une autre histoire, c’est au tour d’une version meurtrière de Robin des Bois d’entrer en scène. En préambule de son récit, Siegel écrit ainsi : « Superman rencontre un étrange adversaire, l’être mystérieux connu seulement sous le nom de l’Archer. Ses victimes ont le choix entre payer un prix fort ou périr face à la redoutable précision de ce criminel, armé d’un arc et de flèches ! ».

Ce soir-là, une file de limousines déposent des gens riches au manoir Gayford. Le maître de maison, Thomas Gayford tient en effet des soirées très réputées au sein de la haute société. Il est d’ailleurs hilare et régale ses invités en expliquant qu’il fête une occasion très spéciale. On lui a en effet prédit qu’il allait mourir ce soir. Et il explique qu’il a reçu une lettre anonyme signée « l’Archer« , le sommant de payer une lourde rançon s’il ne voulait pas être assassiné au cours de la nuit. Les invités ne prennent pas la chose pour une plaisanterie mais Gayford les rassure. Celui qui va avoir une déception, ce soir, c’est l’Archer. Car le milliardaire, pas téméraire, a pris le soin de poster des gardes dans toute sa propriété. Il ne risque rien !

Si ce n’est qu’au même moment, à l’extérieur, le dessin nous montre qu’une des sentinelles a déjà été tuée. Une silhouette vêtue de vert passe par les arbres pour se glisser sur un balcon de la maison… A ce moment Gayford propose un toast à la santé de l’Archer, qui a d’après lui manqué sa cible… Mais un des invités aperçoit à l’Archer à l’étage. Trop tard. L’assassin vient de tirer une flèche qui tue Gayford. La foule est catastrophée. Certains hommes courageux s’écrient qu’il faut le capturer. Mais trop tard. L’Archer est déjà reparti aussi mystérieusement qu’il est arrivé…

Dans les bureaux du Daily Planet, le rédacteur-en-chef Perry White cherche ses journalistes vedettes, Lois Lane et Clark Kent. White vient d’apprendre le meurtre de Gayford et veut leur confier le reportage. Mais il ne trouve qu’un jeune garçon dans la pièce. White peste ! Lane et Kent ne sont pas là ! Juste quand il avait besoin d’eux pour suivre cette affaire. Le jeune garçon propose alors de s’occuper de ce reportage. White répond de manière assez sèche qu’effectivement l’aspirant reporter ferait peut-être un meilleur travail que Kent. Le garçon espère alors un instant… Mais White lui dit alors qu’il lui faudra quand même attendre cinq à dix ans avant d’avoir sa chance. De toute façon White finit par croiser Kent et Lane qui expliquent qu’ils étaient simplement dehors, à chercher des sujets potentiels, mais qu’ils n’ont rien trouvé. Le Superman de 1941 n’est pas encore aussi omniscient qu’il le sera quelques années plus tard. Pas de super-ouïe pour lui apprendre le moindre événement douteux. Il apprend la mort de Gayford seulement quand White lui en parle…

Aussitôt Clark Kent et Lois Lane sautent dans une voiture (car à cette époque le journaliste possède visiblement sa propre voiture) et prennent la route du manoir Gayford. Ils sont arrêtés à proximité de la propriété par un policier patibulaire, le Sergent Casey (à l’époque un personnage régulier dans l’univers de Superman). Casey est un bon flic mais terriblement bourru. Il n’aime pas les reporters et ne fait pas confiance à Superman, qu’il aimerait bien capturer un jour. Casey, c’est un peu l’anti-Commissaire Gordon. Le sergent se moque d’eux pour leur capacité à se matérialiser dès qu’il y a de quoi faire un article mais fini en fin de compte par leur confier que la police n’a aucune idée de qui peut-être en réalité cet Archer, bien qu’ils aient trouvé « quelques indices intéressants ». Mais la discussion est interrompue quand une flèche verte traverse une fenêtre, venant se planter dans un mur. Casey y découvre un avertissement : Je ne vois pas de problème à vous en donner le contenu : l’Archer explique qu’il a tué Gayford pour qu’on sache que ses menaces sont sérieuses ». Lois Lane cherche désespérément un téléphone (sans doute pour dicter un article). Puis, alors qu’ils repartent en voiture, Clark lance un regard sur le côté et s’aperçoit qu’une autre flèche fonce vers eux, visant spécifiquement Lois. Heureusement le héros l’a vu venir et lève sa main tandis que Lois regarde ailleurs. La flèche s’écrase lors contre la peau indestructible du super-héros.

Malheureusement ils ne sont pas au bout de leurs peines. Clark s’aperçoit à ce moment que les freins de sa voiture ne fonctionnent plus (sa vision à rayons X lui révèle que l’automobile a été sabotée. Ils foncent vers un virage sans moyen de ralentir, alors qu’un camion arrive en face. Et Clark ne peut faire étalage de ses pouvoirs tant que Lois le surveille. Heureusement il utilise alors une de ses capacités (qui est depuis complètement tombée en désuétude) : Clark focalise son « regard hypnotique » sur Lois de manière à qu’elle tombe rapidement dans l’inconscience. Mais même sans témoin, Clark n’a plus le temps de changer de costume. Il espère alors que le conducteur du camion qui arrive dans le sens inverse « n’aura pas le temps de le voir clairement ». Ce qui ne manque d’ailleurs pas de piquant si on se souvient que Superman ne porte pas de masque et que le seul rempart de son identité secrète est une paire de lunettes. Clark saute à l’extérieur du véhicule, s’en empare et saute par dessus le camion tout en tenant la voiture à bout de bras. C’est comme si celle-ci s’élevait dans les airs ! Tout danger étant écarté, Clark répare les pneus de la voiture puis tire Lois de son sommeil hypnotique. Lois s’étonne de s’être endormie mais Clark, faussement modeste, lui explique qu’elle trouve sans doute sa compagnie soporifique. Clark dépose Lois chez elle, lui souhaite une bonne nuit… Et, débarrassé d’elle, est enfin libre de ses actes : « Une chose que je sais maintenant : L’Archer n’aime pas les journalistes curieux ! ».

Sans témoin, Clark Kent peut enfin se débarrasser de sa tenue civile, révélant son uniforme de Superman, qui saute sans perdre de temps dans le ciel de Metropolis : « Traquer quelqu’un d’aussi froid et cruel que l’Archer ne sera pas chose facile !’. Mais il n’empêche que Superman va essayer. En commençant par s’intéresser aux traces laissées éventuellement chez les Gayford. Le super-héros, arrivée sur les lieux, ne tarde pas à repérer, grâce à sa « vision microscopique », les empreintes de pas du tueur. Puis en cherchant encore un peu il arrive même à retrouver l’emplacement où l’Archer se tenait quand il a saboté les freins de la voiture de Kent. Mais Superman est tellement plongé dans son enquête qu’il ne prête pas attention à l’arrivée d’une demi-douzaine de policiers (parmi lesquels, à n’en pas douter, on peut compter le Sergent Casey, bien qu’ils soient tous dessinés à l’identique). A l’époque Superman n’est pas encore considéré comme un boy-scout par la police de Metropolis, qui le considère au contraire comme une menace. Ils tentent d’arrêter le surhomme. Heureusement celui-ci creuse dans le sol, comme une foreuse, et peut ainsi se s’enfuir sans demander son reste : « Ça ne servirait à rien d’essayer de les raisonner » souligne Superman. Ses relations avec les forces de l’ordre ne sont clairement pas au beau fixe…

Le lendemain Clark Kent retourne au Daily Planet. Perry White lui explique que Lois Lane n’est pas là, quelle a filé à la résidence Carnahan où l’Archer a encore frappé. Clark tourne les talons bien décidé à la rejoindre mais il est intercepté par le jeune garçon qu’on avait aperçu plus tôt : « Attendez, Monsieur Kent ! Puis-je venir avec vous ? ». Mais Clark ne compte pas s’encombrer de lui « Pas maintenant Jimmy. Une autre fois peut-être… ». Le jeune garçon en question, vous l’aurez compris, c’est Jimmy Olsen. Superman #13 est même la toute première apparition de Jimmy (futur « meilleur ami de Superman ») et de ce fait un ajout majeur à la mythologie du super-héros. Arrivant à la résidence Carnahan, Clark découvre que Lois a déjà collecté toutes les infos et vient de finir de téléphoner son article. Le Sergent Casey a le temps d’expliquer à Kent que l’Archer a laissé une autre lettre annonçant qu’il tuerait de nombreux autres hommes quand…

Quand l’Archer surgit au bout du couloir, l’arc à la main. L’homme vêtu de vert les vise mais ni Casey ni Kent ne sont du genre à se laisser faire. Ils se ruent sur le criminel et c’est même Clark qui arrive à le capturer, dissimulant du mieux qu’il peut sa super-force. L’Archer est vite maîtrisé et démasqué. Mais c’est un inconnu qui prétend répondre au nom de… Robin des bois. Lois et Clark s’apprêtent à repartir vers le Daily Planet quand ils sont interceptés par Casey qui insiste auprès d’eux : « Souvenez-vous de mentionner que c’est MOI qui viens de capturer ce dangereux criminel ». Ce qui est une manière peu gracieuse d’effacer tout le mérite de Clark. De toute façon l’intrépide journaliste s’en moque. Il sent déjà que quelque chose cloche. L’Archer ne peut être ce dément qui prétend être Robin des Bois : « Si vous voulez mon avis, je pense que ce type est un cinglé inoffensif qui se prend pour l’Archer ! ». Mais la police ne veut rien entendre, trop contente d’avoir enfermé un suspens. Quand de nouvelles menaces, dirigées contre le joaillier Kendrick, arrivent au commissariat, les policiers sont convaincus qu’il s’agît de blagues puisqu’ils ont le « vrai » Archer derrière les barreaux. Ils décident de ne prêter aucune attention aux missives.

Heureusement Clark était dans le commissariat au même moment, tentant de glaner des informations. Et lui n’hésite pas. Il est convaincu que le faux Archer, c’est celui qui est en prison. Il s’éclipse et reprend donc son identité de Superman, se dirigeant vers chez Kendrick. Ce dernier, planqué chez lui, est terrifié. Il se sait menacé mais ne comprend pas pourquoi la police n’arrive pas. Soudain une flèche verte traverse la fenêtre. Superman, qui arrivait à proximité de la maison, n’hésite pas un instant et passe à travers le plafond pour essayer d’intercepter la flèche pendant qu’il est encore temps. Sauf que la scène, vue par Kendrick, est interprétée différemment. Le joaillier voit une flèche surgir puis un personnage au costume coloré qui traverse un mur. Il est convaincu que l’intrus est l’Archer… Et il tire donc sur Superman. Heureusement Superman est à l’épreuve des balles et n’est donc pas blessé. Mais le temps de dissiper le malentendu et de rassurer Kendrick et le vrai Archer s’est échappé loin. Superman ne peut le poursuivre. Il lui faut à nouveau redevenir Clark Kent et retourner au Daily Planet pour récupérer de précieuses informations.

Au journal, justement, Jimmy Olsen arrive une note destinée à Clark Kent, annonçant des révélations sur l’Archer. Kent n’a pas encore eu le temps de revenir à la rédaction mais Lois le rassure. Elle va s’en occuper. Elle s’empare donc de la missive, qui donne rendez-vous à l’angle de Binston et Annex Avenue. Lois disparaît en trombe… Mais tombe sur Clark devant les locaux du Daily Planet. Elle lui explique alors tout… Sauf qu’elle ment effrontément sur un point important : l’adresse ! Elle affirme à Clark qu’on lui a donné rendez-vous sur Wingate Road. Il s’agit bien sûr d’éloigner son rival. Clark s’éclipse pour redevenir Superman mais médite à voix haute : « Cet altruisme de la part de Lois semble incroyable. Il est inhabituel pour un journaliste de partager une bonne histoire ». Lois Lane s’engouffre dans sa voiture (encore qu’elle monte à la place du passager), convaincue qu’elle est la seule sur l’affaire. En fait, c’est faux : Jimmy Olsen, lassé qu’on lui dise d’attendre pour son premier reportage, se glisse dans le coffre du véhicule : « Si j’attendais qu’on me donne ma chance, ça ne viendrait jamais ! Je dois faire comme Lois et créer mes propres opportunités ». Rapidement Lois arrive à l’angle de Binston et Annex et rencontre un homme mystérieux qui explique qu’il a découvert que son « maître » (visiblement l’inconnu est domestique) est un criminel. Mais il n’a pas le temps de finir sa phrase. Il est tué par une flèche verte. L’Archer est là ! Bientôt les flèches pleuvent, menaçant désormais Lois. Heureusement Jimmy fait irruption pour la pousser de côté pour la sauver des projectiles meurtriers. Jimmy lui explique alors qu’ils doivent se cacher dans les bois voisins, où ils seront une moins bonne cible. Mais l’Archer les poursuit, bien décidé à en finir.

Pendant ce temps, à Wingate Road, Superman se rend compte qu’on lui a posé un lapin et commence à sentir la supercherie. Il fonce au Daily Planet et se rhabille en Clark Kent de manière à inspecter les locaux. Il ne tarde pas à découvrir le vrai message du domestique et donc la vraie adresse donnée. Redevenant Superman, le héros fonce au bon endroit. Mais pendant ce temps Lois et Jimmy continuent d’être poursuivis par les flèches de l’Archer. Mais cette fois il semble que rien ne protégera Lois d’une ultime flèche qui arrive par l’arrière, sans qu’aucun des deux fuyards ne l’aperçoive. Heureusement, Superman arrive au bon moment. Il s’interpose et la flèche se brise sur sa nuque indestructible.

L’Archer panique. Il lui faut absolument échapper à Superman. Peut-être que s’il arrive à atteindre sa voiture… Mais cette fois le super-héros l’a repéré. Superman s’empare d’un énorme rocher et le lance de manière à ce qu’il écrase la voiture, coupant toute retraite à l’Archer. Il ne lui reste plus qu’à attraper l’Archer et à le démasquer. Lois, Jimmy et Superman s’aperçoivent alors que c’est Quigley, un célèbre chasseur de fauves. L’Archer, piteux, explique: « Je… je pensais que chasser les humains serait plus profitable ! ». Ça à quoi Jimmy lui rétorque : « N’importe quel gosse vous dirait que le crime ne paye pas, Monsieur Quigley… ». Plus tard, au Daily Planet, Clark et Lois demandent à Jimmy ce que ça fait d’être crédité en bas d’un article pour la première fois. Visiblement les deux adultes ont décidé de s’effacer et de laisser le bénéfice du reportage au jeune Jimmy. Et le jeune homme les remercie. Mais Lois souligne qu’après tout une bonne partie du mérite revient à Superman.

Rideau sur la première apparition de Jimmy Olsen dans le folklore de Superman. Il connaîtra par la suite le succès qu’on lui connait, devenant d’une certaine manière le sidekick du surhomme. L’Archer, lui, ne fera plus guère de vagues. Il faut dire que par la suite Superman se découvrira de nombreux adversaires hauts en couleurs. A l’évidence les flèches de l’Archer ne pouvaient rien contre la peau de Superman. Et sans doute que DC préférera privilégier son autre archer vert, Green Arrow, né le même mois. Ce qui pose quand même la question. Même si le masque de l’Archer n’est pas entièrement similaire à celui de Green Arrow, comment deux variantes d’un même concept sont-elles apparues spontanément chez le même éditeur, au même moment ? On pourrait s’en tenir à l’influence commune de Robin des Bois. Ou encore invoquer qu’après tous l’Archer tout comme Green Arrow étaient sans doute inspirés au moins en partie par un autre héros équipé d’un arc et de flèche, The Arrow, qui précédait les deux personnages. Mais la vérité est tout autre. L’Archer et (à un degré moindre) Green Arrow descendent tous les deux d’un même « serial » cinématographique de 1940 : The Green Archer !

 

The Green Archer, lui-même inspiré d’un roman homonyme de Edgar Wallace paru en 1923, était un feuilleton cinématographique produit par la Columbia et diffusé à partir d’octobre 1940. L’Archer Vert en question était une sorte de tueur tuant les occupants d’une riche maison, frappant aussi bien les gens corrompus que les représentants de l’ordre. On reconnaît à l’évidence une bonne partie du script de Superman #13, où l’Archer s’attaque à la classe fortunée le plus souvent à l’intérieur de grands manoirs. L’Archer adversaire de Superman et Green Arrow sont donc cousins de fait puisqu’à un certain niveau ils descendent tous les deux de Robin des Bois mais sont aussi parents, plus directement, du côté de Green Archer dont la sortie fin 1940 explique tout à fait comment deux archers verts ont pu apparaître quelques mois plus tard au même moment. De nos jours l’Archer ne représenterait sans doute plus aucun danger pour Superman, dont les pouvoirs ont encore évolué. Mais on pourrait facilement imaginer que Quigley puisse devenir un adversaire de Green Arrow ou bien, pourquoi pas, tienne le rôle de l’archer de service dans une version maléfique de la Justice League of America.

[Xavier Fournier]