A nouveau prisonnier des glaces, Captain America s’éveille… dans le futur, découvrant une Amérique profondément transformée… au point d’être désormais méconnaissable. Dans cette dystopie, le retour d’un héros portant les couleurs des Etats-Unis éveille forcément des réactions assez fortes. D’un côté il y a les combattants de la liberté, résistants devenus cyniques qui doivent réapprendre l’espoir. Et puis il y a le tyran de cette nouvelle ère, bien décidé à rendre l’Amérique forte à nouveau, selon la formule consacrée… et sa définition n’est pas vraiment celle de Steve Rogers.
Scénario de Mark Waid
Dessins de Chris Samnee
Parution aux USA le mercredi 14 février 2018
Captain America s’éveille dans un nouveau monde. Cette fois-ci ce ne sont pas les Avengers qui le découvrent mais une cellule de résistants, en partie composée d’êtres hybrides, difformes, dans une Amérique ravagée par les bombes et par un régime autoritaire. Un futur de cauchemar, dont Steve Rogers doit apprendre les règles et les usages. De quoi s’imaginer dans un monde à la Kamandi ou à la Omac. Mais la réalité est autrement plus douloureuse. Mark Waid et Chris Samnee mettent en place un cahier des charges qui pourrait presque être le point de départ d’une série autonome, à la 2099. Si ce n’est que le propos, on s’en rendra compte, est tout autre. Dans un premier temps le dessinateur peut réinventer tout un monde, toute une ambiance, à sa guise. On pourrait penser que de son côté Mark Waid joue simplement, au premier degré, sur le Steve Rogers déplacé, ce que nous donnaient déjà Rick Remender et John Romita Jr. il n’y a pas si longtemps. A moins… à moins qu’il s’agisse de réinstaurer une situation à la Secret Empire mais avec Rogers cette fois dans le rôle du rebelle et pas celui de l’oppresseur. Tout cela est vrai si l’on s’en tient au premier degré. En sous-couche, Mark Waid ne nous parle absolument pas d’un autre monde futur. Derrière les images, il s’agit bien d’évoquer le présent…
I don’t know how many generations it took to tear down the american dream
En décembre dernier la disparition d’une vanne de Ben Grimm dans Marvel-Two-In One #1 (il expliquait de plus être le monstre orange le plus connu, allusion à Donald Trump) entre les previews et la version imprimée avait tourné à fond dans la blogosphère. Bon sang, c’est bien sûr, le méchant Marvel, aux ordres de Trump, avait effacé la vanne pour ne pas ternir l’image du Président. Et pas grand-monde, parmi les scandalisés, ne lisant réellement Marvel-Two-In One, peu de gens s’étaient aperçu qu’une large partie de Marvel Two-In One #2 était basée sur… un monstre orange idiot tentant de gagner des élections par populisme, parabole autrement plus forte que la petite bulle du premier numéro. Mais nous sommes ici dans une chronique qui traite non pas de Marvel-Two-In One mais bien de Captain America #698. Or, il y a un lien à tirer tant ici aussi on est dans la parabole politique. Mark Waid ne s’est jamais caché de sa vision et, au-delà des apparences (inutile de chercher le visage de Trump), c’est bien l’Amérique de Trump que le scénariste critique vertement ici. Absent quelques années, Captain America n’a pu guider le pays dans la route du Bien. Il est tombé aux mains d’un roi populiste qui veut rendre l’Amérique grande à nouveau. Et si ce roi n’est pas blond vénitien, son surnom, King Baby, nous renvoi à un président actuel bien connu pour ne pas supporter qu’on lui fasse la remarque qu’il a.… des mains de bébé. Si l’on lit Captain America #698 au premier degré, ce n’est jamais qu’un énième futur apocalyptique. Si l’on regarde la substantifique moëlle, Mark Waid continue un message-parabole pertinent et très présent chez Marvel ces dernières années. Encore et toujours, certains garderont de Captain America et de ses collègues l’image délirante d’une propagande aux ordres du pouvoir. Encore et toujours, dans les faits, Captain America et les autres ne se satisferont pas de l’Amérique telle qu’elle est et resteront de farouches sentinelles de ce qu’elle devrait être. Et si d’aventure certains l’oubliaient, Captain America #698 est une nécessaire piqure de rappel sur la nécessité et le sens d’un Steve Rogers.
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