Invincible touche à sa fin, avec cet ultime numéro dont il n’est plus, déjà, le seul protagoniste principal. Voici donc Mark en position de père, avec des enfants qui entament leurs propres cycles de passage à l’âge adulte. Robert Kirkman remet encore et toujours la relation paternelle au centre de sa toile, avec l’aide de Ryan Ottley & Cory Walker pour mettre en scène deux destins. Un final approprié pour ce qui devient, à partir de là, un classique.
Scénario de Robert Kirkman
Dessins de Ryan Ottley & Cory Walker
Parution aux USA le mercredi 14 février 2018
This is the end, comme dirait l’autre. Après 15 ans, Robert Kirkman, Ryan Ottley et Cory Walker referment le couvercle sur l’univers d’Invincible et (par extension) des Guardians of the Globe. Soit une série qui, globalement, sera restée imprévisible. Dans ce récit auto-contenu, tout était possible, tous les revirements, toutes les catastrophes. Un allié du héros pouvait décider d’éradiquer une partie de la planète d’une page à l’autre. Ou bien c’était un proche, un parent ou un ennemi qui, au détour d’une case, finissait éviscéré. Au regard de cet itinéraire épique, le dernier épisode peut paraître sage. Disons que ce n’est pas, assurément, le plus spectaculaire de la série. On est déjà dans l’épilogue, dans l’après, une sorte de postface qui laisse la part aux héritiers du héros. De ce fait, Invincible #144 est une sorte d’ascension émotionnelle (comme par exemple ce qui touche au sort d’Eve), une histoire qui met en scène le fait qu’elle ne s’arrêtera jamais, presque un conte de fées assumé. C’est sans doute un poil plus optimiste et naïf que certaines phases de la série. Mais Kirkman clôture la saga de façon satisfaisante.
There was a planet called Viltrium.
Chez Image Comics, nombreuses sont les séries qui sont des odyssées ouvertes (on peut évoquer Saga, Seven To Eternity ou bien entendu de Walking Dead). Autant d’histoires au long court dont on peut se demander quel sera le point final et si les auteurs termineront la chose de façon adéquate, sans donner le sentiment d’expédier les choses. Dans toutes les histoires, l’important c’est la chute. Si l’auteur trébuche avant la fin ou même dans les dernières pages, le compte n’y est plus. C’est ce qui la différence entre un récit simplement sympa et un classique. Il faut aussi qu’il y ait une unité de ton d’un bout à l’autre. Sur ce registre, c’est ce qui fait avec le recul la différence entre un Midnight Nation et Rising Stars. Les deux ont le même scénariste mais le second est un patchwork d’ambiances au gré des dessinateurs. Imaginez Watchmen mis en images par quatre artistes n’ayant rien à voir. Même si Invincible a connu différents types de dessins, ils sont restés dans un périmètre voisin et le principe de retrouver Ryan Ottley et Cory Walker dans cet ultime numéro est une véritable preuve en soi de cette unité. Sans révélation finale particulière et en se conservant quelques portes ouvertes (par exemple la promesse de revanche d’une ennemie) au cas où Kirkman reprendrait l’envie d’ici quelques années, ce #144 est une dernière touche finale qui parachève l’édifice et tout un corpus. Il semblerait incongru de conseiller ce dernier épisode à un nouveau lecteur n’ayant pas les 143 autres. Mais c’est autant un signal de fin qu’un top de départ. Et c’est là où l’unité de ton est une force. Si vous êtes passé à côté d’Invincible, vous pouvez désormais vous lancez dedans en toute confiance (en VF cette BD est éditée chez Delcourt). C’est une œuvre finie qui ne trébuche donc pas dans les dernières pages. Son début et sa conclusion sont cohérentes. Là où il serait compliqué de conseiller l’intégralité d’un Savage Dragon aujourd’hui (le style de Larsen ayant grandement muté au fil des ans), Invincible forme désormais un tout, comme un Jupiter’s Legacy qui aurait duré 15 ans. Invincible fait partie de ces œuvres qui restent et conservent leur pertinence bien au-delà de leur dernier épisode.
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