Made Men, nouvelle série lancée chez Oni Press par Paul Tobin et Arjuna Susini, voit le mythe de la créature de Frankenstein transposé dans un univers de gros flingues. Une bande de gangsters a en effet la très mauvaise idée de s’attaquer à la dernière descendante des Frankenstein. Fallait pas la tuer, pardon, l’énerver.
Scénario de Paul Tobin
Dessins de Arjuna Susini
Parution aux USA le mercredi 6 septembre 2017
Le roman « Frankenstein ou le Prométhée moderne » de Mary Shelley est une source inépuisable d’inspiration, des générations d’auteurs s’étant essayé à réinventer l’idée dans d’autres contextes. C’est au tour du scénariste Paul Tobin de s’y coller en transposant la chose sur… une unité d’élite de la police. Des agents tombent dans un guet-apens et sont trucider de façon sanglante par des gangsters un peu caricaturaux (imaginez le moment où l’agent Murphy tombe dans une embuscade, dans Robocop). Tous les policiers y passent, jusqu’à leur leader, Jutte Shelley… qui revient d’entre les morts car… Shelley n’est pas son nom. Dernière héritière des Frankenstein, elle ne voulait plus entendre parler du noir passé de sa famille. La mort de ses co-équipiers, qui étaient tous ses amis, ne lui laisse pas le choix. Elle va les réanimer et se lancer après ceux qui les ont assassinés. Le pitch est clair, mais Tobin hésite un peu entre quelque chose de noir et des artifices un peu plus caricaturaux. C’est à dire qu’il y a des choses que l’on accepterait facilement si l’on était dans le registre exagéré d’un Deadpool (comme la dernière des Frankenstein qui ne voulait soi-disant pas entendre parler de la science familiale mais qui, ouf, s’est injecté avant un sérum qui la sauve… le sérum dont elle ne voulait pas, donc). Et puis, même si l’un des « Made Men » est passablement amoché, il y a peut-être des choix plus pratiques, plus logiques, que lui greffer une tête de lion. Tout cela marcherait sur un ton délirant, dans un univers à part, mais – dans ce premier numéro tout au moins – Tobin semble plutôt s’orienter vers quelque chose de plus noir. Et du coup on ne sait pas trop sur quel pied danser.
« My friends are dead, but I’m not alone. »
Arjuna Susini emprunte beaucoup de choses aux mangas, en particulier certaines expressions faciales de Jutte, avec une composition généralement énergique, même si d’une case à l’autre les personnages ont parfois l’air à quelques centimètres l’un de l’autre puis soudainement plus éloignés sans qu’en théorie ils aient bougés. Mais il instaure une ambiance prenante et cohérente, bien qu’ici la plupart des scènes se déroulent dans l’obscurité et qu’il faudrait voir ce que donnera Susini si le scénario lui demander des atmosphères plus variées. Le pitch de Made Men (l’équivalent d’une équipe du SWAT (ou quelque chose d’approchant) transformés en autant de Punishers morts-vivants) a quelque chose qui accroche. Mais qui dans le même temps nous perd un peu car les auteurs n’ont pas l’air d’avoir totalement tranché et choisi leur approche. Paul Tobin devra, dès le numéro #2, préciser s’il surfe sur un certain humour noir ou s’il cultive un côté hardcore (à sa décharge, une partie des personnages principaux ne s’expriment pratiquement pas dans cet épisode, cela laisse de la marge). Parce que l’idée de départ est bonne. Mais on se prend à se demander ce qu’en feraient un Ennis ou un Ellis. Il faudra que l’équipe créative impose sa personnalité à cette série si elle veut convaincre et perdurer.
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