Après la chute du Secret Empire/Hydra, Captain America se retrouve confronté à son propre reflet… mais déformé par le miroir du Fascisme. Est-ce que les deux personnages sont au-delà de toute compréhension ? Et est-ce que finalement les ramifications de Secret Empire sont bien toutes refermées ? Cet épilogue fait le tri et relance quelques éléments.
Scénario de Nick Spencer
Dessins d’Andrea Sorrentino & Joe Bennett
Parution aux USA le mercredi 13 septembre 2017
C’est le Yin et le Yang : la version humaniste d’un héros et son alternative, biberonnée aux thèses fascistes depuis la petite enfance. Il y a Captain America d’un côté et de l’autre celui qu’on pourrait appeler « Captain Hydra » et tout le sens de cet ultime épisode pourrait être résumé à « Et à partir de là, qu’est-ce qu’il se passe ? ». La formule du face à face n’est pas sans rappeler ce qui passait à la fin de Civil War (Iron Man face au cadavre de Cap) ou de Civil War II (Captain Marvel face au corps inconscient de Tony Stark), mâtiné d’un peu de ce qui se passait pour Norman Osborn après Siege. On pourrait croire que c’est un cocktail de formules déjà vues, si ce n’est que très vite le scénariste Nick Spencer revient vers l’ambiguïté politique de la situation. Steve Rogers n’a pas procédé à un coup d’état. Il s’est contenté d’utiliser les pleins pouvoirs qu’on lui avait confié. Et de là vient finalement la vraie morale du crossover : de nos jours le risque n’est pas tellement de voir les tyrans s’emparer du pouvoir par la force mais bien de se le faire offrir par une masse crédule ou démotivée. Bien sûr, Rogers a quand même procédé à quelques tricheries et manigances initiales mais en gros il peut se défendre en expliquant qu’il n’a fait que ce qu’on attendait de lui (enfin d’une certaine manière en tout cas). Par extension, l’épisode règle une lacune de Secret Empire #10, où l’on avait l’impression qu’il suffisait de castagner Rogers pour que les forces d’Hydra s’effondrent et disparaissent sans demander leur reste. Dans ces pages, Spencer nous montre que c’est plus complexe. Dans la foulée, il règle aussi l’impression déroutante qui pouvait régner autour de la vie ou du trépas de certains personnages, nous montrant que c’est géré et que le mystère donne lieu à une intrigue à part entière.
« I didn’t create any of these conditions. You did.. Your warped and twisted ideology… »
Ce qui est moins « géré », c’est la position par rapport aux mutants et même les quelques pages qui traitent ici de la question de New Tian n’arrive pas vraiment à justifier le comportement des uns et des autres. La discussion entre Emma et Beast n’a pas grand sens, tout comme on voit mal pourquoi les autorités en auraient après New Tian plus qu’après certains Avengers (Thor Odinson ? Vision ?). C’est un point faible dans l’exposé et plus généralement une question que le scénario n’aura pas vraiment exploité. Enfin, Spencer n’est pas d’une subtilité à toute épreuve quand il met en place les conditions à l’avènement d’un personnage qui semble bien parti pour devenir le nouveau Red Skull (ça n’arrive pas dans l’épisode, mais ils ne s’y prendraient pas autrement si c’était bien l’intention). Globalement ces petites réserves n’empêchent pas de faire de Secret Empire l’un des crossovers les plus acides de l’histoire récente de Marvel et ce n’est pas le traitement d’une ou deux intrigues secondaires qui peuvent vraiment l’affaiblir. Ce qui est dommage, encore une fois, c’est que juste dans cet épisode Omega, la gestion des styles des dessinateurs aura été aléatoire et peu cohérente. On a vu, déjà, des runs avec des artistes multiples (les premières années du Captain America de Brubaker ou les premiers numéros de Captain America: Sam Wilson) où tout ce beau monde travaillait dans le même sens. Nick Spencer n’a pas la réputation d’être le scénariste le plus rapide qui soit. C’est peut-être aussi (mais pas forcément), ce qui a forcé la main de Marvel pour distribuer en urgence les pages à dessiner à des artistes disponibles plus qu’à des artistes « logiques » qui auraient pu se succéder avec moins de sautes de style. C’est ce qui fera de Secret Empire, à la longue, un patchwork de dessinateurs au lieu d’une démarche artistique. Dommage car la parabole politique, elle, est diablement pertinente.
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