Dans la suite des numéros spéciaux consacrés au centenaire de Jack Kirby, DC Comics honore cette fois une cocréation souvent laissée pour compte ou qui a survécu via sa réinvention plus tardive par Neil Gaiman, le Sandman. Même si le roi du rêve était surtout, à la base, un concept de Joe Simon (comme c’est dûment rappelé dans la partie éditoriale), les deux histoires inédites de ce numéro se débrouillent très bien pour marcher dans les pas du King, en lui étant fidèle sans trop le singer.
Scénario de Dan Jurgens, Steve Orlando et Jack Kirby.
Dessins de Jon Bogdanove, Rick Leonardi et Jack Kirby.
Parution aux USA le mercredi 16 Août 2017
Le Sandman des années 7O, protecteur du royaume des rêves, s’était fait une spécialité de défendre les enfants, menacés par les dangers cachés au fond de leur imagination… Comme si un super-héros, reconnaissable à ses collants rouge et or, s’était chargé de voler au secours d’un Little Nemo. Une création fantastique qui porte plutôt des marques du style du scénariste Joe Simon (il suffit de comparer avec son First Issue Special consacré à sa version des Outsiders pour remarquer des similitudes) mais qui a profité du côté pêchu, dynamique, du dessin de Jack Kirby. C’est donc plutôt cette énergie qu’il convenait de retrouver dans le cadre d’un hommage au King. Et là, dès la première histoire, c’est une bonne surprise. Alors qu’on est face à une créative team de vétérans, qui œuvrait déjà il y un quart de siècle sur Superman et qui n’en est pas à son premier hommage à Kirby, Jurgens et surtout Bogdanove arrivent à un résultat assez vivifiant qui évoque l’univers du maître sans jouer l’imitation cheap. L’intérêt de ces spéciaux c’est aussi, à l’occasion, de voir de nouveaux regards sur Kirby (un peu à l’image de ce que fait Paul Pope avec la couverture de ce numéro). Du coup, on pouvait s’attendre à quelque chose de plus convenu concernant Jurgens et Bogdanove. Mais en fait, non : Le dessin de Bogdanove garde des caractéristiques propres, même si l’on a recours à un type particulier de montage ou s’il faut aller dans le sens du King. Typiquement, quand le Sandman est aidé par un mystérieux autre héros, à mi-chemin entre Orion, Thor et l’Infinity Man, le design pourrait tout aussi bien venir de Kirby lui-même. Et Bogdanove l’anime à sa manière propre. Scénaristiquement la fin repose sur une forme de pirouette (et surtout place chronologiquement ce Sandman à une époque où il n’est pas supposé avoir été en activité) mais cela reste efficace. Et puis ce genre d’hommage induit généralement au moins une petite dose de naïveté, il n’y a donc pas de faute de gout.
« I don’t need any more bad ideas. I’ve already got you two. »
Ce qui fonctionne bien, éditorialement, c’est que l’équipe créative de la deuxième histoire joue un peu sur certains angles similaires. C’est à dire que tout en gardant lui aussi son style propre, Rick Leonardi va dans une approche de l’énergie similaire, ce qui fait qu’on ne saute pas du coq à l’âne en passant d’un récit à l’autre. Et là où Jurgens joue un peu la carte de « l’alpha » (en mettant en scène quelque chose qui se déroule dans un passé lointain), Steve Orlando en arrive à nous raconter un peu l’Omega, c’est à dire quelque chose qui se passe après que Jed, traditionnellement le jeune ami du Sandman, ait grandi et laissé derrière lui les mondes du rêve et de l’enfance. Cette fois aussi DC en profite pour rééditer quelques histoires courtes de Kirby et même si elles n’ont pas grand-chose à voir avec le Sandman, ces « Tales of the DNA Project » tirées de Superman’s Pal Jimmy Olsen gagnent à être relues ainsi regroupées, surtout la génèse d’Arin The Amored Man, sorte de chainon manquant entre le Ben Boxer de Kamandi et le Machine Man de Marvel. Globalement un Special assez cohérent et homogène…
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