Alors que Marvel sort presque trois films par an, Warner et DC Comics peinent à aligner les films et les succès au box-office. Du coup, la sortie cette semaine d’Aquaman est un événement pour le studio et l’avenir du DCU au cinéma. Fini les héros sombres et torturés. Place à la couleurs explosives, à l’humour et à l’action démesuré… DC se le joue « Marvel way » ?
Si Arthur Curry est l’une des figures phares du Justice League de Zack Snyder, on ne sait pas grand chose sur le héros. Le réalisateur profite de l’occasion pour revenir aux sources. Ainsi, tout commence par la naissance du petit Arthur, né de l’union de Tom Curry, un gardien de phare, et d’Atlanna, reine déchue d’Atlantis. Malheureusement, après quelques années de bonheur, la Reine est obligée de fuir sa famille et de retourner dans les profondeurs sous-marines. Des décennies plus tard, Arthur est grand… et tout en muscle ! Avec ses pouvoirs hors du commun, il ne loupe jamais… une « Happy Hour » ! Enfin, ça, c’était avant de rencontrer d’autres justiciers et de vaincre Steppenwolf (dans Justice League, rappelez-vous). Du coup, il donne un coup de main de temps en temps. Il est devenu la coqueluche de son village, Amnesty Bay, et est surnommé « Aquaman ». À Atlantis, Orm, le second fils d’Atlanna et Roi de la cité sous-marine, a soif de pouvoir. Il est prêt à tout pour devenir « le Maître des Océans » et régner sur la surface et les océans. La charmante Mera va tente de convaincre Arthur de prendre en main son destin et de renverser son tyrannique demi-frère. Bref, de devenir un vrai « héros » comme l’annonce fièrement l’affiche du film !
Aquaman suit le parcours logique des films d’origines de super-héros. Ainsi, on a le droit aux nombreux flashbacks sur l’enfance du héros, à la découverte de ses origines et de son univers et à la quête qui le mènera à accomplir sa destinée de héros. Cependant, le réalisateur James Wan n’en oublie pas que Arthur a « vécu des aventures » avec la Justice League. Il joue déjà les héros, même s’il ne le fait pas « à temps plein ». Comme tout héros moderne, il est torturé par un drame familial : la disparition de sa mère. Il sait d’où il vient. Il connaît Une partie d’Atlantis et de ses habitants. Il n’est pas pas étonné de voir débarquer Mera ou d’entendre parler de son frère Orm. Quand on voit Aquaman, on ne peut s’empêcher de penser à un de ses concurrents : Thor. D’un point de vue physique, Jason Momoa (Aquaman) ressemble à Chris Hemsworth (Thor). Leurs attitudes nonchalantes et grand enfant les rassemblent encore plus. Mais c’est surtout le thème d’être digne de son rôle qui frappe les fans de super-héros. Bien sûr, ce thème se rapproche aussi du mythe du Roi Arthur, qui porte bien son nom. Dans le film, Arthur/Aquaman doit être digne s’il veut pouvoir déloger le trident magique, tout comme Arthur doit pouvoir retirer Excalibur du rocher. On ne peut donc pas accuser James Wan et Geoff Johns (le scénariste de DC Comics signe l’histoire du film) de surfer sur le succès de Thor. Momoa porte à bout de bras son rôle et donne l’impression d’être lui-même une bonne partie du film. Mais quand il enfile son costume orange et vert, il crève l’écran et gagne en majesté. Un costume qui aurait pu faire rire est l’une des meilleures transpositions des comics.
C’est à James Wan que revient la lourde tâche de nous présenter le royaume d’Atlantis. Autant dire que le réalisateur avait un sacré challenge de transposer le visuel du comic book à l’écran. Il s’en sort très bien. Les couleurs explosent à l’écran. Le temps d’une séquence, on navigue dans la cité principale et on aperçoit plusieurs recoins du royaume. On n’est bien loin du mince rendu de la planète Oa dans le tristement célèbre Green Lantern. Bien sûr, on l’attendait aussi au détour concernant les scènes sous-marines. Là où Snyder avait éludé le problème en créant une bulle d’oxygène lors du dialogue entre Mera et Arthur dans JL, Wan prend le parti de les faire parler naturellement, avec une légère vibration dans la voix. Les effets de flottement sur les vêtements et les cheveux fonctionnent et donnent l’impression d’être immergés dans l’eau avec les personnages. Tel un Peter Jackson dans les Terres du Mordor, James Wan s’éclate à créer des batailles gigantesques entre deux armées mêlant acteurs et créatures de synthèse démesurées. Et là encore ça fonctionne. Que ce soit des crustacés géants qui se battent contre des requins ou des hommes en armure chevauchant des hippocampes, on y croit. Certains diront que « trop de CGI tue le CGI » mais le réalisateur ne peut pas faire autrement s’il veut faire pour le mieux. On regrettera seulement que certaines incrustations dans décors qui auraient pu être naturels.
FRÈRES ENNEMIS ET PETITE SIRÈNE
Le long-métrage nous donne aussi l’occasion de découvrir l’entourage d’Aquaman (dans mauvais jeux de mots avec la série TV Entourage dans laquelle les personnages veulent mettre en scène un film Aquaman). Outre ses parents, avec une Nicole Kidman rajeunie par les effets spéciaux, c’est surtout son « love interest » Mera et ses ennemis, Orm et Black Manta qui se détachent. La première, avec ses cheveux rouge vif et sa silhouette moulée dans une combinaison verte, fait penser à une version adulte (et avec des jambes) d’Ariel, la petite sirène de Disney. Une scène « tendre » où elle découvre le monde des hommes (avec une chanson romantique en fond) évoque le dessin-animé. Un héros se mesure par ses adversaires. Orm et Black Manta sont deux vilains différents, chacun avec ses raisons. Celles de Black Manta sont assez « basiques » et quelque peu ridicules. Contrairement à son histoire tragique des comics, ici, le coup du destin qui le marque dans les premières minutes semble forcé. Peu utilisé par la suite, son passage ne sert que de tremplin à une éventuelle suite. Orm, lui, a soif de pouvoir mais veut aussi agir pour le bien de sa nation, victime de la pollution des « hommes ». Un petit côté école pour justifier les motivations du vilain. Dans le contexte actuel, c’est plutôt malin. Visuellement les deux personnages sont tous droit sortis des comics. Les costumes flashy (l’armure noire de Manta ou le costume violet et argent d’Orm) ne font pas kitsch.
Un chef d’œuvre ? N’exagérons pas. Le film n’est pas exempt de défauts. Mais c’est un grand pas en avant pour Warner qui livre un film plus familial sans tomber dans le cliché. On se serait bien passé de certains effets de ralentis (chers aussi à Snyder) et aux coups de guitare électrique dans les premières minutes à chaque fois que Momoa donne un coup de poing, mais ces problèmes s’estompent au fil du film, comme si le réalisateur évoluait avec son héros.
Aquaman – De James Wan – Avec Jason Momoa, Amber Heard, Patrick Wilson, Yahya Abdul-Mateen II, Dolph Lundgren, Nicole Kidman – Sortie le mercredi 19 décembre 2018
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