À l’heure des réseaux sociaux, on utilise beaucoup, à tort et à travers, la notion de soutien. Mais là pour le coup l’heure est venue de faire passer le message, de montrer aux auteurs de BD que les lecteurs sont à leurs côtés. Parce que si l’on ne fait rien, le rideau ne va pas tarder de tomber. Liker le Groupement des Auteurs de BD (https://www.facebook.com/pages/Groupement-des-Auteurs-de-Bande-dessin%C3%A9e-SNAC/169486420839?fref=ts) n’est qu’un début. Twittez, faîtes suivre, partagez, propagez.
Aujourd’hui, les auteurs sont en colère. Ces dernières années, nous avons subi un étouffement lent et progressif. Nous surnagions encore… Mais voici qu’on nous porte le coup de grâce de la plus absurde des façons. Une réforme a été votée « pour notre bien » qui devrait secouer sérieusement le marché du livre et ses 80 000 emplois d’ici les prochaines élections présidentielles.
Même si nous sommes favorables à toute réforme qui permettrait d’assurer de meilleurs revenus aux auteurs retraités, comment se priver de presque un mois de revenus quand la plupart d’entre nous bataillent déjà sous la limite du SMIC ? Depuis cette annonce, plusieurs auteurs et non des moindres ont annoncé abandonner le métier.
Vous trouverez ci-joint notre lettre ouverte à Madame Filippetti, ratifiée par plus de 700 auteurs (en moins de cinq jours).
Les auteurs de BD sont les plus fédérés, et donc les plus réactifs. Toutefois, nous sommes suivis de près par les autres organisations regroupées au sein du CPE (Conseil Permanent des Ecrivains), qui avait déjà tiré la sonnette d’alarme lors du dernier Salon du Livre.
Nous avons besoin de vous pour relayer notre message. Les enjeux dépassent de loin le simple confort de vie d’une poignée de personnes. En effet, nous aimerions attirer votre attention sur deux points :
Il serait facile de se laisser aller à des arguments fallacieux, tels ceux tenus par des membres du RAAP lors de notre rencontre, selon lesquels « auteur » est une activité secondaire, pas un métier.
Auteur, pas un métier ? Pourtant, les auteurs professionnels (tous secteurs confondus) représentent 47000 personnes en France. Dans un pays où le taux de chômage est croissant, les auteurs créent leur propre emploi. Mieux, ils sont à l’origine de milliers d’autres. Sur le plan économique, l’industrie culturelle est la quatrième plus rentable de France. Sans parler de la vitrine qu’il représente à l’étranger, le marché du livre représente 80 000 emplois et 5,6 milliards d’euros. Les auteurs sont à l’origine de cette richesse.
2) Une culture appauvrie, une culture d’élite ?
La Bande Dessinée et la littérature jeunesse, à simple titre d’exemple, sont des secteurs où les auteurs « accessoires » (qui exercent un autre métier à temps plein) sont rares. Qu’en adviendra-t-il si nous disparaissons ? L’offre culturelle si riche et si chère à notre pays ne serait-elle pas réduite à peau de chagrin ?
Nous avons besoin de vous pour relayer notre message. Notre profession est en danger, mais c’est aussi toute une industrie qui est menacée. La situation est ubuesque : on va financer la retraite de demain par la précarité d’aujourd’hui.
Nous ne demandons qu’à stopper cette aberration administrative.
Nous ne sommes pas opposés au principe d’une réforme juste et concertée, mais il en va de notre survie.
Nous nous tenons à votre disposition pour toute demande.
Cordialement
Le SNAC BD
L’Europe aurait demandé que les cotisations aux retraites complémentaires soient dorénavant indexées en pourcentage sur les revenus. Quoi de plus normal ? Mais c’est le conseil administratif du RAAP, composés d’artistes et d’auteurs dont la moyenne d’âge excède celle des cotisants (soit 46 ans), qui a fixé le taux à 8%.
– Aucune étude n’a été faite sur l’impact que ces cotisations auront sur le niveau de vie des auteurs.
– Aucune étude précise n’a pu être communiquée sur le « pourquoi » ou le « comment » de ces 8%.
– Avec cette nouvelle réforme, il y aura beaucoup de cotisants pour peu de bénéficiaires. Le C.A. de l’IRCEC a choisi de privilégier la consolidation et l’augmentation des retraites versées à une poignée de bénéficiaires (aujourd’hui 7000), au mépris de la charge sociale pesant sur la masse des cotisants, dont la majorité est en situation précaire (aujourd’hui 37000, demain 50000 voire plus). Ce choix d’opposer les générations et de baser ses calculs sur des seuils de revenus de 9000 voire 5000 euros, n’est pas un choix démocratique, ni juste, ni solidaire.
Le temps est-il venu de nous dire adieu ?
Depuis des années, sans bruit, sans révolte, nous survivons par passion pour notre métier, pour nos histoires et ceux qui les lisent, mais aujourd’hui, nous voyons notre fin approcher et nous refusons de nous y résigner.
En mars dernier, à l’occasion du Salon du Livre de Paris, le Conseil Permanent des Écrivains avait tiré la sonnette d’alarme, exposant de nombreux motifs d’inquiétude sur l’avenir immédiat de notre profession. À cela s’ajoute la paupérisation croissante qui frappe les auteurs, que ce soit au travers des baisses d’avances ou de pourcentages, ou par l’apparition de formules numériques illimitées qui ne rémunéreront personne, sinon les diffuseurs.
Alors qu’il semblait impossible d’aggraver davantage la situation, le RAAP vient de nous annoncer abruptement, par simple courrier et sans consultation d’aucune sorte, qu’à compter de janvier 2016 nous allions devoir cotiser à hauteur de 8 % de nos revenus pour financer notre retraite complémentaire obligatoire. Actuellement les auteurs peuvent cotiser à cet organisme privé en ne versant qu’une cotisation minimale de 200 € par an.
Madame, nous vous prions de considérer avec gravité cette dernière raison de notre juste colère autant que de notre dégoût. Dans quel autre métier inflige-t-on des baisses de revenus aussi importantes à des travailleurs déjà fragilisés ? Des « travailleurs de l’esprit » qui ne bénéficient d’ailleurs pas des avantages que peut offrir le régime général (chômage, congés payés, 13e mois)…
Cette réforme soudaine et irréfléchie, les auteurs n’en veulent pas. Ils la rejettent au motif premier qu’elle est INACCEPTABLE autant qu’inapplicable.
Même si nous sommes évidemment favorables à un système solidaire des retraites, et ne sommes pas à ce titre opposés à une réforme juste, mesurée et concertée, croyez-vous que les auteurs pourront, en plus de leurs autres sacrifices, se priver de 8 % de leurs revenus afin de s’acquitter de nouvelles cotisations sociales ? Ceci représente l’équivalent de presque un mois de revenus, alors que la plupart d’entre eux ne gagnent pas assez pour payer des impôts et peinent à boucler leurs fins de mois. Nous vous rappelons, Madame la Ministre que le revenu de la moitié des auteurs de BD se situe (hélas) bien en dessous du SMIC. Il est urgent que cette réalité soit prise en compte, avant de réformer quoi que ce soit.
Depuis l’annonce de cette réforme, des auteurs, certains très précarisés, d’autres ayant vendu des centaines de milliers de livres, ont déclaré qu’ils abandonnaient le métier. Ils sont écœurés, fatigués et ne croient plus en des lendemains meilleurs alors qu’ils sont les premiers acteurs, et pourtant les plus mal lotis, de la chaîne du livre. Au rythme où vont les choses, leur exemple sera bientôt suivi par de nombreux confrères.
Dans un pays où le taux de chômage est croissant, nous créons notre propre emploi. Mieux, nous sommes à l’origine de milliers d’autres. Sur le plan économique, l’industrie culturelle est la quatrième plus rentable de France, comme votre ministère s’en est récemment enorgueilli. Sans parler de la vitrine qu’il représente à l’étranger, le marché du livre représente 80 000 emplois et 5,6 milliards d’euros. NOUS, AUTEURS, sommes à l’origine de cette richesse, de cette dynamique.
Nous demandons dès à présent la suspension de l’application de cette réforme et nous vous invitons à réfléchir et à faire réfléchir AVEC NOUS à la meilleure façon de conduire cette réforme de financement des retraites complémentaires pour qu’elle aille dans le sens d’un réel progrès social. La piste qui nous apparaît comme la plus évidente serait d’envisager un réel financement de la couverture sociale des auteurs par les acteurs de la chaîne du livre qui bénéficient le plus du travail de ces professionnels, comme c’est le cas dans d’autres domaines artistiques. À titre d’exemple, pour le RACD, les producteurs financent en partie la cotisation des auteurs, sans affecter le niveau des rémunérations nettes.
Notre lettre exprime les opinions majoritaires du monde de la bande dessinée, opinions partagées par bien des artistes et des écrivains avec qui nous comptons agir très prochainement.
Les auteurs signataires de cette lettre souhaitent, isolément ou à travers les représentants de leurs organisations professionnelles, engager une action de concertation constructive avec leurs interlocuteurs (Ministères concernés, RAAP, Agessa/MDA, SNE…), à partir du moment où des garanties d’écoute réciproque existent.
Dans le cas contraire, nous envisageons, dès septembre 2014, l’organisation d’actions collectives et médiatiques de blocage ou d’opposition par toutes les voies légales autorisées.
Les idées ne manquent pas. Après tout, c’est notre métier.
Les auteurs.
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