Dessin de Brian Bolland
Parution aux USA décembe 2012
Dans les années 70’s, la revue 2000 AD s’est imposée dans la BD anglaise tout comme le Punk est venu écraser la variétoche dans Top of the Pop. 2000 AD n’avait pas attendu Blade Runner ou les romans de William Gibson pour découvrir le cyberpunk et des visions trash d’un avenir qui ne l’était pas moins. 2000 AD, cousin anglais de Métal Hurlant, était plein d’aliens déglingués, de mutants paumés, de robots assassins… Et puis quelque par en cours de route, par envie de constester même la contestation, la figure de proue du journal est devenue… un super-flic lorgnant souvent la bordure du fascisme. Judge Dredd. Le symbole de l’ordre dans une mégalopole où il ne fait pas bon vivre, où le citoyen, quand il n’est pas dépouillé et trucidé par la racaille du futur, a toutes les chances de finir écrasé sous les roues des imposantes motos de la police, pardon, des Juges, souvent trop occupés à punir les coupables pour s’attarder sur le sort des innocents. A supposer qu’il reste un innocent dans Mega-City One ou dans la Terre Maudite qui l’entoure. Dredd, inflexible officier de police mais aussi juge et bourreau, débarqua donc avec des avis à l’emporte-pièce et des menaces souvent absurdes ou inversement macabrement gothique (le Judge Death et ses alliés). Judge Dredd (apparu dans un premier uniforme qui ne comprenait pas encore la célèbre plaque/insigne/bouclier sur le coeur) verbalisait tout. Les gros. Les petits. Les gauchos. Les fachos. Les riches. Les pauvres.
La férocité du personnage, s’inscrivant dans la même génération de l’Inspecteur Harry (mais qui aurait fait un bond dans le temps), le rendait déjà intéressant en lui-même. Brian Bolland n’a pas créé Dredd mais son arrivée en a remis une couche. Disons-le : Bolland est à Dredd ce que Miller est à Daredevil. Il a remis cent balles dans le flipper et a relancé la balle avec une rage nouvelle, d’autant plus que Bolland allait, au fil des épisodes, mettre au point un style de plus en plus précis, de plus en plus propre, soigné. D’ailleurs l’évolution est manifeste alors qu’on avance dans le volume qu’IDW vient de consacrer au Judge Dredd de Bolland. L’artiste progresse d’épisode en épisode et tout le paradoxe est que Dredd va dans le gore, donnant des coups de poings ou des coups de matraque qui traversent des casques, des crânes… Et pendant ce temps Bolland se fait de plus en plus élégant, détaché, même dans les scènes d’horreurs quand le terrifiant Judge Death s’éveille. Avec le recul, quand on tombe sur les premiers segments, le Bolland des débuts nous fait réaliser à quel point il y avait une « école anglaise ». Des dessinateurs aujourd’hui très différents comme Dave Gibbons ou Alan David avaient, dans cette période-là, des points communs beaucoup plus marqués (scénaristiquement il y a aussi, par endroit, le même grain de folie que dans les Captain Britain de Moore et Davis, un peu plus tardifs). Et on voit donc au fil des pages (en noir et blanc, telles qu’elles sont parues à l’origine dans 2000AD, à part une histoire qui fut publiée à l’époque) Brian Bolland en train de devenir LE Brian Bolland.
Judge Dredd: The Complete Brian Bolland regroupe près de 315 pages d’un papier épais. Comme le titre l’indique on y retrouve les exploits anciens d’un Judge Dredd qui, aventure après aventure, prend de la stature, de la gouaille, devient plus affirmé dans son fameux credo « je suis la Loi ! ». On trouve aussi en bonus les aventures de Walter the Wobot, autre strip de Bolland mais aussi toutes les couvertures de Dredd qu’il a pu réaliser à l’époque et même un dessin de dédicace lors d’un passage… en France. Le seul petit défaut est qu’à l’évidence pour les scans il a fallu repartir principalement des pages parues (d’où un trait qui sur certaines histoires peut paraître un peu lourd, d’autant que 2000AD était publié sur du papier journal) mais c’est un défaut qui s’amenuise quand on entre dans le vif du sujet et que le trait de l’artiste se fait plus énergique. C’est un pavé volumineux mais aussi un must. Parce que c’est beau, parce que c’est inspiré et habité d’un humour au énième degré. Et puis parce qu’ici nous ne connaissons le Dredd de Bolland que de manière morcelée. En France, ces histoires n’ont été publiée que de manière dispersée (comme dans l’antique périodique Judge Dredd d’Aredit Artima, d’ailleurs en France ce que nous avions dans ces numéros n’étaient que la traduction américaine, colorisée et remontée, de chez Eagle Comics) et jamais dans un recueil massif de ce type. D’ailleurs un éditeur français (Soleil ? Delirium ?) serait bien inspiré de traduire chez nous ce Judge Dredd: The Complete Brian Bolland. Je vous laisse, je vais relire le mien et, par Drokk, retrouver les débuts du Juge Anderson, de Father Earth et de bien autres. Judge Dredd: The Complete Brian Bolland, c’est aussi l’histoire de comment un jeune artiste est devenu un maître !
[Xavier Fournier]
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