Dessins de Greg Tocchini
Parution aux USA le mercredi 17 juin 2015
Les six premiers épisodes de Low nous ont régalé des mésaventures de Stel, optimiste forcenée, pour essayer de retrouver ses filles, avec des succès divers, dans un environnement où tout est désespéré. Le premier arc s’étant achevé de manière épique, Rick Remender revient avec un environnement assez différent mais très austère, avec un Tocchini qui lui est garant de la continuité visuelle. Si bien que j’ai cru pendant quelques cases que l’on retrouvait Stel à une autre époque, bien avant ou bien après la période vue dans Low #1-6. En fait, c’est une autre ballade à laquelle nous invitent les auteurs. L’univers de Low ne se limite pas à la ville décadente (où Stel et sa famille habitaient) ni au royaume barbare des pirates. Il y a d’autres villes, avec leur propre système politique. Pour l’occasion, on ne peut pas dire que Remender ait fait dans la finesse puisque cette autre cité est visiblement inspirée l’URSS de Staline aussi bien dans les designs que dans le mode de pensée. Cela fait un peu penser à la répartition des mégacités dans Judge Dredd. Pas dans la finesse, donc, mais efficace cependant, avec une ambiance qui devrait plaire aux nostalgiques du comic-book The Red Star.
Plutôt que l’imminence de la fin du monde, les habitants de cette ville-là sont obsédés par un régime à la Fahrenheit 451, où toute créativité est interdite et rigoureusement combattue par le « Ministère de la Pensée », en particulier par l’héroïne de cet épisode (une femme très importante dans la mythologie de la série). Comme de bien entendu, son amante est passionnée de peinture, un critère qui – en théorie – fait d’elle une hors-la-loi. Dans le contexte actuel où la diversité fait beaucoup parler, qu’un épisode centré sur un couple lesbien soit passé sous silence est à la fois une bonne chose (meilleur des cas : les gens s’y font) ou une mauvaise (l’option B étant que Low passe « sous le radar » de pas mal de monde). Après avoir vu quelques scènes provo passées totalement inaperçues dans les premiers épisodes, j’aurai tendance à pencher pour la seconde hypothèse. Mais, alors que je me posais la question, il m’est soudain apparu que Remender avait très probablement glissé un énorme pied-de-nez à l’attention de certain(e)s de ses adversaires ces dernières années. Cette « maîtresse à penser », en couple avec une femme, qui se révèle tantôt une fanatique, tantôt une hypocrite qui n’applique pas à elle-même ce qu’elle professe… C’est plutôt gonflé de la part du scénariste d’arriver ainsi à « absorber » un profil et à le réinjecter dans son histoire, pour l’utiliser sous un jour très particulier, c’est le moins que l’on puisse dire. Cela permet une fois de plus à l’auteur à quel point il n’est pas le cliché machiste parfois attaqué. Low est une série énormément féministe (plus que beaucoup d’autres qui prétendent l’être). L’avantage certain de cet épisode, c’est qu’il peut se lire tout seul, comme une pièce dramatique de Ray Bradbury (et je ne pense pas qu’au seul Fahrenheit 451 en disant cela). Si vous hésitiez à vous mettre à la série, une petite lecture de Low #7 peut être un bon test avant de récupérer le premier album (d’ailleurs traduit chez Glénat) (*).
* (oops, une erreur de copié-collé dans notre planning interne fait que je n’attribue pas à César ce qui lui revient, erreur du coup répétée dans une phrase de #CB 95. Cela sortira chez un autre en VF)
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