Mister Miracle et Big Barga ont pris la seule décision qui s’impose : sacrifier leur famille pour assurer la survie de l’univers. C’est, pour eux, la pire chose qui soit puisque cela revient à condamner leur bébé à la même enfance qu’eux, l’offrir à Darkseid. Mais ne s’agit-il pas d’un marché de dupes ? Peut-on réellement marchander avec le seigneur d’Apokolips ? Et Darkseid peut-il vraiment virer veggie ?
Scénario de Tom King
Dessins de Mitch Gerads
Parution aux USA le mercredi 19 sep 2018
A bien des égards Mister Miracle #11 sonne comme si on arrivait déjà à la fin de cette maxisérie, comme si c’était déjà le douzième, tant ce numéro repose sur la résolution du choix cornélien qui hante Scott et Barda depuis des mois. Peuvent-ils réellement aller jusqu’au bout et offrir leur enfant, le petit Jack, en pâture à Darkseid, dans une redite du pacte qui, il y a longtemps, a fait de l’enfance de Scott un enfer ? Mais il ne semble pas y avoir d’autre option. Aussi, contraint, Mister Miracle et Big Barda prennent-ils la route d’Apokolips… sans se défaire de ce lien déconcertant avec la normalité, lien qui est la signature de Tom King depuis le début de la saga. Ils y vont donc, en bons invités, avec de quoi grignoter l’apéro et le landau en main. Bien entendu, on doute assez vite du déroulement apparent des choses. Que Scott et Barda puissent abandonner aussi facilement leur rejeton ? Oui, bien évidemment qu’il y a un twist. Mais le scénario de King est à tiroirs, reposant sur le côté impénétrable de son Darkseid. Là où le couple de héros ne cesse de commenter leurs états d’âmes, leurs propres actions, Darkseid est presque – à comparer – minimaliste. Ce qui, par contraste, le rend encore plus imposant et destructeur. Mister Miracle et son épouse « normalisent » ce qu’ils vivent, tandis que Darkseid donne de l’ampleur à tout ce qui se passe, avec une forme pesante de majesté, qu’il s’agisse de manger un peu ou de sceller, de manière sanglante, le pacte.
« Like there’s a weapon that would hurt HIM. »
Mitch Gerads est un peu comme Darkseid. Et il ne faut pas comprendre, par-là, qu’il a un problème de peau qui vire au gris ou qu’il est pourvu d’une personnalité tyrannique. Le fait que le dessinateur est un élément essentiel de la réussite de ce numéro parce que, comme le maître de l’Anti-Vie, il la joue tout en retenue, avec son système en apparence guindé de « gaufrier » en neuf cases. Malgré un trait bien différent, Gerads traite sa narration comme le faisait Gibbons dans Watchmen, avec des personnages comme sous pressions, enfermés dans des cases serrées (ce qui ne veut pas dire que Mister Miracle = Watchmen, précisons-le pour les amateurs de raccourcis et de malentendus). A part une double page qu’il se permet à un moment (et finalement une double page assez étrangère à l’action), l’artiste s’en tient à cette grille. Il ne cède pas aux sirènes du spectaculaire et traitre avec un même cahier des charges un personnage qui croque un amuse-gueule et un duel de titans. Gerads matérialise avec ses « gouttières » comme les barreaux d’une histoire à laquelle Scott Free doit échapper à tout prix. Scénario et dessins, tous les deux parfois désopilants mais d’autant plus humains, font que cette saga restera sur la durée. Et que cet avant-dernier numéro, en tout cas, est déjà une réussite.
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