Dessins d’Esad Ribic
Parution aux USA le mercredi 13 janvier 2016
L’important, c’est la chute. Et nous y touchons avec cet ultime épisode de Secret Wars. Inexorablement, l’empire de Doom s’est effondré, les armées se sont neutralisées les unes et les autres, menant à une situation qui, au final, se décide sur une poignée de protagonistes (trois ou quatre tout au plus). L’essentiel de l’épisode repose donc sur la succession de deux duels avant d’en arriver à la résolution proprement dite. C’est d’ailleurs peut-être le reproche que je ferais à cette dernière ligne droite : on oublie un peu un certain nombre de protagonistes perdus dans la foule, sans prendre la peine de leur donner à eux aussi un sentiment de fin (par contre le clin d’œil à Miles Morales et l’explication de sa survie est assez bien géré). Pas forcément pour en faire des tonnes mais deux ou trois pages pour marquer le coup sur ce qui est arrivé aux compagnons de route de T’Challa et Reed n’auraient pas été un mal. L’effet réciproque et contradictoire, cependant, c’est que du coup Hickman et Ribic disposent d’une certaine place pour faire briller les personnages restants, leur donner l’ampleur et l’attention nécessaire. Tandis que la blogosphère s’agitait cette dernière année au sujet d’une supposée détestation chez Marvel des Fantastiques, Hickman les regarde bel et bien avec beaucoup de tendresse, leur rendant un rang de « famille royale » de l’univers Marvel, avec quelques phrases de métacommentaires sur leur condition.
« Because now I believe in expansion. I believe we endure. »
Tom Breevort s’était un peu avancé en disant que la fin de Secret Wars n’était pas spoilable. En fin de compte nous sommes déjà fixé depuis des mois via d’autres comics sur ce qui arrive à certains des personnages. Et pourtant il n’avait pas totalement tort non plus, dans le sens où les dernières pages de Secret Wars ne se racontent pas, elles se ressentent, animées par un surprenant esprit positif. D’habitude, les crossovers, c’est plutôt la morosité. On pleure Supergirl, Thor ou que sais-je encore. Allez mettons qu’à la fin de Blackest Night Johns ramenait plein de personnages, OK. Mais dans Secret Wars on est dans un autre registre. Là, Hickman installe mieux qu’un happy end : un vrai regard vers l’avant. Il y a une véritable envie de l’univers Marvel mais, plus encore, une envie des Fantastiques, des personnages injustement disparus au fond du top des ventes depuis des années et dont le prestige n’aura très certainement pas été amélioré par le « four » du film de l’été dernier. Hickman termine sur une note ascensionnelle, un point d’orgue. Et c’est là, aussi, où c’est très différent de ces sagas où on escamote un héros démodé le temps de le faire oublier (mettons Hawkeye, Ant-Man, Jack of Heart, Vision dans Disassembled par exemple) pour le ramener plus tard en fanfare. Je prendrais même un autre exemple : acteur principal d’Original Sin, Nick Fury Sr n’en finissait pas moins méconnaissable, presque détruit et pas vraiment utilisable à l’avenir sans passer par un cycle de pirouettes. Là, Reed et ses proches, c’est tout le contraire. Hickman et Ribic convoquent la fanfare dès cet épisode, réinstallent ces héros sur le trône, leur rendent symboliquement une fonction qui était la leur depuis 1961. C’est de la reconstruction, pas de la destruction. Justice leur est rendue. Il y a, peut-être, là aussi une petite facilité sur la manière dont le sort de Ben et Johnny est décidé. Mais globalement c’est grand. Par moments c’est du Kirby, en d’autres c’est du Kubrick. Avec un air de célébration, le scénariste ouvre la voie royale à un retour, un jour, des Fantastiques aux affaires. Clairement, Age of Ultron ou Convergence et autres Fear Itself peuvent aller se planquer…
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