Dessin d’Ivan Reis
Parution aux USA le mercredi 29 avril 2015
C’est incontestablement une grosse semaine en matière de crossovers. Convergence poursuit son cours, Secret Wars et Darkseid War pointent le bout de leur nez via les comics du FCBD… Et Grant Morrison achève son Multiversity en laissant à une armada de personnages méconnus ou de versions alternatives de sauver le multivers DC d’une infection venue… de la réalité. Pris en tant qu’épisode, Multiversity #2 n’est sans doute pas le numéro le plus intéressant du loup dans le sens où l’on n’a pas, cette fois, le même plaisir de la découverte. Il y a bien certains protagonistes en plus mais l’attrait d’un Super-Demon, hybride entre Etrigan et Superman, ne me paraît pas aussi fort que certains des personnages rencontrés jusqu’ici (il faut dire que Super-Demon doit se mesurer à des coups à la Ultra Comics, ce n’est pas facile). Normal: Pendant tous les chapitres précédents, Grant Morrison a ouvert des portes, nous a parfois donné des numéros qui avaient le goût d’épisodes pilotes, de débuts de séries. Et là, nous voici au moment où il faut refermer la porte, où par la force des choses on ne va plus injecter autant de choses. Mais cela reste diablement riche et se termine quand même, encore une fois, sur l’envie de voir toute une série qui en découlerait.
Obligé de représenter quelque chose qui a la densité d’une Crisis (tout en se défendant d’en être une), Ivan Reis est plus à la peine que pour Multiversity #1, avec beaucoup plus de personnages à intégrer, une mise en page plus serrée. Morrison, lui, revient encore et toujours sur son fil directeur, sur une structure connue mais sans cesse remise à jour. Difficile d’avoir des certitudes avec le scénariste écossais mais ce qu’il paraît dégager vers la fin ne manque pas de sel. Là où dans Infinite Crisis Geoff Johns faisait du lecteur (via le Superboy d’Earth Prime) le dépositaire d’un sentiment d’entropie, de résistance au changement, Morrison semble loin de dire la même chose quand il désigne lui aussi le monde réel comme source de l’entropie, de la dénaturation, de l’effondrement. Ce n’est pas le lecteur qu’il vise. Quand il dit, finalement, que pour les personnages de comics, la menace de la perte d’identité vient de notre monde, comment ne pas imaginer que c’est un doigt tendu à l’attention des éditeurs qui veulent faire table rase du passé. Tout le discours de Neh-Bu-loh (ou d’une entité qui ressemble fichtrement à ce personnage déjà utilisé par Morrison) est de se vanter d’aplatir des multivers les uns après les autres. Neh-Bu-loh pourrait aussi bien s’appeler « Dan Dih-Dio » que cela ne serait pas plus clair. Multiversity, c’est encore et toujours avec Morrison l’idée que même le petit personnage le plus désuet, le plus secondaire, a son importance dans la trame globale. Alors que Multiversity semble être son chant du cygne en ce qui concerne les univers super-héroïques partagés, on serait vraiment curieux de le voir revenir encore une fois et d’élaborer à partir de là comment les personnages peuvent élaborer leur riposte contre les « puissances » qui les maltraitent. Comparé à ça ? Convergence (comme bon nombre de crossovers du genre, Final Crisis du même Morrison y compris) peut aller se rhabiller. Et, sans juger d’avance Secret Wars et Darkseid War, elles ont du souci à se faire, si elles veulent se mesurer…
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