En septembre 1947 lorsque les lecteurs francophones découvrent la quinzième livraison (non numérotée) du supplément au journal de Tarzan mettant en scène Superman (enfin, le Surhomme) et titrée « Désintégration atomique » certains peuvent être interpellés par un scénario un peu « inconstant ».
Il s’agit de la traduction de l’épisode 34 du Daily Comic Strip de Superman intitulé aux Etats-Unis The Science of Superman qui reprend les comic strips #1950 à 1983 publié d’avril à juin 1945.
Le jeune Gilmore est étudiant à l’Université et rend une copie au professeur Duste, son professeur de science, soulignant l’invulnérabilité de Superman. Il reçoit immédiatement un zéro pour sa composition car l’invulnérabilité est scientifiquement impossible. Le jeune Gilmore va alors parler de cette affaire au professeur Lyly, son professeur de littérature, qui écrit une lettre à Superman afin que ce dernier convainque Duste de son « erreur ».
Bien entendu Superman répond et se rend à l’université pour aider Gilmore. Mais le professeur Duste est complètement imperméable aux diverses démonstration des pouvoirs de Superman en trouvant des raisons scientifiques pour les expliquer rationnellement.
La seule chose qui le convaincrait vraiment de l’invulnérabilité de Superman est son exposition au rayonnement du cyclotron de l’université popularisé sous le nom d’Atom Smasher. Bien entendu Superman accepte mais au dernier moment le professeur Duste se « dégonfle ». Comme il est persuadé que Superman est un imposteur il pense qu’il va tuer une sorte de « lunatique » s’il déclenche l’appareil. Il pensait que Superman était un simulateur qui allait se désister devant le danger mais maintenant il est devant un terrible dilemme. Bombarder l’imposteur et le tuer ou ne rien faire et laisser penser qu’il est conscient de son erreur et ne veut pas la reconnaitre.
Pendant ce temps, sur le campus Gilmore rencontre son entraineur de baseball qui s’inquiète de son absence. Il lui explique alors qu’il ne peut plus faire partie de l’équipe car il a été viré par Duste. L’entraineur est extrêmement embêté, lorsqu’un ami de Gilmore vient lui expliquer que Superman est dans le cyclotron.
Gilmore surgit dans le laboratoire et actionne le cyclotron. Bien sur Superman est insensible au bombardement d’électron mais Duste en déduit juste que la machine est en panne. Le dialogue de sourd continue lorsque l’entraineur de l’équipe de baseball arrive et propose à Superman de l’aider à l’entraînement de l’équipe. Et à partir de ce moment, le professeur Duste et le cyclotron sont oubliés sans aucune explication. Pourquoi donc ce brusque changement scénaristique ?
Ce que le lecteur francophone de l’époque, et sans doute vous-même, ne pouvait se douter c’est qu’il lisait deux ans après une histoire de comics qui avait été jugé comme mettant en péril la sécurité de l’Etat aux Etats-Unis.
En effet, en avril 1945 une opération militaire vitale pour la victoire des Etats-Unis dans le pacifique se préparait. Il s’agit bien entendu de l’opération Trinity, c’est-à-dire la réalisation d’une bombe atomique qui conduira aux bombardements sur le Japon qui auront lieu début août de la même année.
Les autorités américaines, et notamment le Federal Bureau of Investigation (FBI), surveillait toutes les publications américaines pour repérer d’éventuelles fuites ou messages de possibles espions étrangers sur le territoire. Soit les agents du FBI était très consciencieux, soit certains aimaient les comics. Quoi qu’il en soit, des agents spéciaux furent dépêché dans les locaux de National Publications (ancêtre de DC Comics) et s’enquérirent du scénariste de cette histoire et de ses sources.
Bien que l’histoire soit créditée officiellement à Jerry Siegel, le scénariste est Alvin Schwartz qui lors de son interrogatoire par les agents du bureau expliquera qu’il s’est inspiré d’un numéro de Popular Mechanics (magazine de vulgarisation scientifique) de 1935. Les agents du FBI se contentèrent de cette explication et demandèrent juste à National Publications de changer son scénario de manière à ne plus faire allusion à l’énergie atomique, ce qui explique le changement soudain du scénario qui s’appuie malgré tout sur le personnage de l’entraineur de baseball qui existait déjà.
Whitney Ellsworth (le responsable de la ligne éditoriale Superman chez National Publications) fera ensuite référence à l’affaire dans la livraison du magazine interne à Independent News (le distributeur de National Publications qui était également une filiale du groupe) de septembre – octobre 1945 en s’appuyant sur des articles d’août de Times & Newsweek évoquant l’intervention du bureau de la censure.
Les lecteurs francophones de septembre 1947 ne pouvaient se douter de toutes ces interventions et lisèrent donc leur récit complet du Surhomme sans savoir que la petite histoire des comics avait rencontré la grande Histoire.
[Jean-Michel Ferragatti]Après deux volets ayant conquis le box-office sans pour autant séduire la critique, Venom :…
Hasard du calendrier, Christopher Reeve fait l'objet de deux documentaires en ce mois d'octobre. Le…
Le documentaire Super/Man : L'Histoire de Christopher Reeve plonge au cœur de la vie de…
Pour bien commencer la semaine, Marvel Studios nous présentent les premières images de Thunderbolts*, prévu…
La série The Penguin s’inscrit dans l’univers sombre et corrompu du Gotham City, mis en…
Qui l'aurait cru ? La sorcière Agatha Harkness, ennemie de la Sorcière Rouge dans la…