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Review : The Penguin – Saison 1

La série The Penguin s’inscrit dans l’univers sombre et corrompu du Gotham City, mis en place par Matt Reeves dans le film The Batman sorti en 2022. The Penguin se penche sur la psyché de l’un des personnages les plus emblématiques de cet univers : Oswald « Oz » Cobb, surnommé parfois le Pingouin. Portée par la performance époustouflante de Colin Farrell et une mise en scène aussi brutale qu’immersive, cette série se veut un prolongement direct du film de Matt Reeves, tout en laissant, curieusement, la figure de Batman largement en retrait.

GANGS OF GOTHAM

L’univers de The Penguin prend sa source dans les événements de The Batman, un film qui a marqué une nouvelle ère pour le Chevalier Noir, plus réaliste et intimiste que les précédentes incarnations. À la fin de The Batman, Carmine Falcone meurt, créant un vide de pouvoir à la tête des cartels de Gotham. C’est précisément ce vide que Oz (Colin Farrell) tente de combler. La série commence là où le film s’était arrêté : dans une ville ravagée par des inondations, au bord du chaos, où la loi du plus fort s’impose. Gotham est dans une transition, et le Pingouin voit l’opportunité de devenir le nouveau parrain de la ville. Mais les choses tournent vite mal quand l’homme de main de Falcone craque face aux moqueries des autres. Obligé de cacher un cadavre, il tombe sur le jeune Vic (Rhenzy Feliz, vu dans Runaways chez Marvel), petit loubard qui est obligé de mener une vie de criminelle pour survivre à Gotham. Sous l’aile du Pingouin, il va comprendre les rouages de la pègre. Tentera-t-il de se hisser au somment comme son mentor ? Rusé, manipulateur, mais surtout ambitieux, Oz est un homme qui guette sa chance de s’élever. Face à lui des visages comme Johnny Viti (Michael Kelly), Salvatore Maroni (Clancy Brown) et surtout la mystérieuse Sofia Falcone (Cristin Miliotti) qui s’est échappée de l’asile d’Arkham.

L’AMOUR EN HÉRITAGE

L’intrigue principale suit donc l’ascension progressive d’Oswald dans les échelons du crime, alors qu’il navigue à travers des trahisons, des alliances douteuses, et une lutte constante pour affirmer sa légitimité dans ce monde brutal. La série ne se contente pas de montrer les combats physiques pour le contrôle de la ville, mais se concentre également sur la psychologie du personnage, ses motivations profondes et ses vulnérabilités. Contrairement aux versions caricaturales ou grotesques du personnage vues dans le passé, Farrell adopte une approche plus nuancée et humanisée du Pingouin. Son Oz n’est pas seulement un criminel ambitieux, il est aussi un homme brisé, motivé par un mélange de complexes d’infériorité et de désir de reconnaissance. On découvre le passé de Oswald et son rapport avec sa mère Francis (Deirdre O’Connell). Une relation complexe qui se révèle pleine de surprises. Le grand Oz étant resté finalement le petit Oswald qui veut impressionner sa maman. On comprend mieux son côté soupe-au-lait qui le caractérise dans les premières minutes de l’épisode 1… et la situation qui dégénère déclenchant le point de départ de l’intrigue. Le maquillage permettant de retranscrire les infirmités du vilain est tout aussi impressionnant que dans The Batman, même si ce côté gueule cassée avec cicatrices ne plaira peut-être pas aux fans de l’esthétique du comic book ou de la version Batman Returns de Tim Burton.

FEMME FATALE

Cristin Milioti (la mère de How I met your mother mais aussi vue dans Fargo) qui joue Sofia Falcone, est tout aussi remarquable. Personnage issue des comics, son histoire est ici bien différente. Accusée d’être le Tueur au Pendu, elle a passé plusieurs années à l’asile d’Arkham, avec les plus perturbés criminels de la ville. De retour à la vie civile, elle est prête à tout pour venger les Falcone et faire perdurer l’empire familial. Elle a un lien particulier avec Oz, qu’elle ne méprise pas comme peut le faire les autres. Les interactions entre Milioti et Farrell ajoutent une tension palpable à chaque scène qu’ils partagent, faisant de leur dynamique l’une des forces motrices de l’intrigue. Sofia est une femme à la fois séduisante et dangereuse, capable d’une violence froide et calculée. L’épisode qui revient sur son incarcération est l’un des meilleurs de la saison. On y voit les éléments que Matt Reeves voulait développer dans l’autre spin-off initialement prévu sur Arkham (et qui a depuis été annulé). Ce n’est pas seulement la police qui est corrompue à Gotham mais bien tout le système… Elle est une adversaire parfaite pour le Pingouin, et leur confrontation devient le cœur d’une lutte pour la domination de Gotham. Sofia montre aussi le machisme du milieu criminel, où une femme comme elle n’est jamais prise au sérieux, bien qu’elle soit bien plus apte à diriger l’empire Falcone. Cristin Milioti est exceptionnelle quand le personnage change totalement de psyché vers le dernier tiers de la saison, permettant à l’actrice de se libérer totalement et de tenter plus de choses dans son jeu.

MAFIA BLUES

The Penguin ne peut empêcher d’être comparée avec certaines des grandes œuvres du genre mafieux qui l’ont précédée. La série emprunte largement à Sopranos, en particulier dans sa manière d’explorer la psyché de son anti-héros et sa quête de pouvoir, ses doutes existentiels. Oswald est un homme piégé dans un monde qu’il cherche désespérément à contrôler, mais où il est souvent dépassé par les événements et ses propres émotions. Il cherche désespérément un sens à sa vie et à obtenir ce qu’il convoite depuis l’enfance. Le thème de la famille, omniprésent dans The Sopranos, se retrouve ici à travers les relations qu’entretiennent Sofia et Oz avec leurs parents. La comparaison avec Scarface est également inévitable. Tout comme Tony Montana, Oz est un outsider, un homme venu de rien, déterminé à prendre le contrôle d’un empire criminel. Néanmoins, The Penguin se concentre davantage sur les luttes internes du personnage principal, ce qui en fait une œuvre plus introspective. Étant diffusé sur HBO (et Max en France), la showrunneuse Lauren LeFranc a eu les coudés franches pour jouer sur la violence exacerbée nécessaire, ou du moins attendue, dans une série sur la mafia. L’hémoglobine coule à flot, mais ce n’est jamais gratuit. Quand un personnage se prend une balle, un coup de machette ou de club de golf, ce n’est pas pour jouer sur l’aspect brut du feuilleton.

LES ABSENTS ONT TOUJOURS TORT

La série se distingue par un choix surprenant : l’absence quasi totale de Batman (Robert Pattinson). Le Chevalier Noir, qui est traditionnellement le contrepoint aux activités criminelles de Gotham, est ici laissé en marge de l’histoire. Bien que la série prenne place dans son univers, Batman n’est qu’une ombre lointaine, à peine mentionné. On pourrait croire qu’à l’heure où se déroule les événements de la série, Batman n’est encore qu’un mythe pour certains. Mais il ne faut pas oublier que le justicier a été vu en train de sauver des Gothamites de la catastrophe causée par le Riddler. Cette absence audacieuse, pourrait dérouter certains spectateurs espérant apercevoir le Batman tant apprécié dans le film. La sortie de ce dernier a été plusieurs fois repoussée (pour le moment en 2026) depuis le lancement du projet du spin-off The Penguin. « Raccrocher les wagons » avec The Batman n’est donc plus une priorité pour les créateurs. Ceci explique peut-être cela… 

Néanmoins, l’esthétique de la série est en adéquation avec celle du film. Certains personnages passent une tête de temps à autre pour bien montrer que, oui, c’est le même univers. Il est dommage que John Turturro ait été remplacé par Mark Strong. Non pas que l’acteur soit mauvais dans la version plus jeune de Carmine Falcone lors des flashbacks, mais il aurait été facile de rajeunir Turturro et ainsi garder une harmonie à l’ensemble.

La série The Penguin est une brillante extension de l’univers de Gotham, grâce à une narration captivante, des performances remarquables du casting, Colin Farrell et Cristin Milioti en tête. Elle positionne le Pingouin comme un personnage tragique et fascinant dans sa montée vers la domination de Gotham, où la montée au pouvoir se fait au prix de la moralité et de la perte de soi. Un adversaire à la hauteur de Batman pour le second film à venir en octobre 2026 ?

The Penguin – Avec Colin Farrel, Cristin Milioti, Rhenzy Feliz, Michael Kelly, Clancy Brown & Mark Strong. Saison en 8 huit épisodes – Premier épisode disponible dès le 20 septembre 2024 puis un épisode diffusé hebdomadairement.

Crédit photo: Warner Bros

Pierre Bisson

Pierre Bisson en plus d'être l'un des rédacteurs du site comicbox.com est aussi traducteur, lettreur et maquettiste.

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