Les amateurs de cette période pourront se réjouir puisque la maxi-série que nous évoquons aujourd’hui avait justement été développée dans l’optique de réunir les deux gloires ! Pourtant, alors que l’intrigue n’avait pas encore été bouclée par Claremont, Byrne essuyait un camouflet de la part de Marvel qui avait décidé de supprimer sa série « Hidden years » (1999-2001). La fin des X-Men, leur dernier combat, tels qu’imaginés par C. Claremont se déroulerait donc sans le dessinateur historique de « Days of Future Past ».
Le script fut alors proposé à Sean Chen (« Iron Man »), qui allait ainsi se lancer dans une aventure de plus de 400 pages. Déclinée en trois « books » dans son édition originale, la maxi-série a été publiée en 2009 sous forme de deux tomes par Panini France. Et le moins qu’on puisse dire est que l’ampleur du projet et sa qualité rendent nostalgique… Cerebra, passe-donc en mode Francis Cabrel, veux-tu ?
Quelque vingt ans plus tard ( ?)… Aliyah Bishop, fille de Lucas Bishop et de l’impératrice Deathbird, héritière du trône Shi’ar, traverse l’espace à bord du Starjammer, lorsqu’elle aperçoit un vaisseau Kree entrer dans l’orbite d’une planète pourtant en ruines. Très vite, elle s’aperçoit qu’un échange de premier ordre doit y avoir lieu entre des Négriers et la délégation en question. La « Meute », groupe composé de Cyrène, Slipstream et Jamie Madrox, encadre la transaction. Ce que les Kree convoitent, ce n’est rien de moins que Jean Grey, considérée comme morte depuis sa dernière combustion spontanée (X-Men #150). Leur objectif ? Retourner la puissance du Phénix contre l’empire Shi’ar. Consciente de la menace, Aliyah Bishop va profiter d’une intervention Brood pour mettre la main sur Jean, et avertir son peuple.
La fuite du Starjammer entraine alors l’explosion de l’astre… et sur Terre, les X-Men, démobilisés ou toujours dans le circuit, aperçoivent ce signal parfaitement clair dans le ciel, et comprennent immédiatement le sens qu’il faut lui donner : le Phénix est de retour ! Problème, Mr. Sinistre avait lui aussi passé un contrat avec les Négriers pour récupérer Jean Grey. Autour de lui, ou dans la coulisse, tous les ennemis historiques des X-Men auront, d’une manière ou d’une autre leur part d’implication dans ce « grand jeu » version mutants. Pour une dernière fois, les X-Men devront donc assumer leurs responsabilités aux yeux des habitants de la Terre, et empêcher la réalisation d’un plan aux conséquences intergalactiques…
Les projets que Chris Claremont avaient sous le coude pour les différents personnages qu’il avait créés ou contribué à mûrir trouvent ici une conclusion convaincante. Pas « perso » dans sa démarche, l’auteur fait aussi preuve d’une capacité toujours étonnante à intégrer des éléments semés par différents auteurs. Tout en s’appuyant et en prolongeant par exemple le travail de Morrison, ces épisodes sonnent également comme une réponse à l’orientation prise depuis 2001. Jean Grey morte ? Claremont la ressuscite et renvoie Cyclope à ses doutes passés. On notera également la tendresse affichée du scénariste pour sa Madelyne, autour de quelques planches directement liées à « Inferno ». Il ramène encore des limbes les icônes des équipes « bleue » et « or », leur adjoint les meneurs de « X-Factor » et « X-Force », dépeint des situations qui font écho à de nombreux points restés en suspens. Les origines de Gambit, celles de Sinistre… Rien que ces deux questions suffisent à donner de l’intérêt aux deux tomes. Et tant pis s’il ne s’agit que d’une fin éventuelle. C’est peut-être la seule que les lecteurs biberonnés exclusivement durant les années 1990 auront plaisir à lire.
Côté mise en images, Sean Chen développe un style parfaitement adapté, quoiqu’un peu figé dans les expressions de ses personnages. Là encore, on retourne à une approche de « poses » qui sied parfaitement à l’ambiance du récit. Sans compter la colorisation très « Liquid » de l’ensemble, qu’on dirait directement échappée d’une continuité interrompue en 1996. Enfin, l’unité artistique du contenu, à plus forte raison sur autant de pages, doit être saluée.
Ces deux tomes sont un rassemblement – bricolé avec les années et avec les risques d’incohérences que cela suppose – de nombreux personnages devenus fétiches et de multiples intrigues. La tentative est louable, à elle seule.
Mais cette aventure possède aussi un goût doux-amer, celui d’une fin d’époque, d’un changement de ligne éditoriale, d’une adaptation à un public tantôt différent, tantôt plus âgé. Certes, il y a eu la chute du mur de Berlin, un événement qui marque pour beaucoup de gens très valables la fin du siècle dernier. Eh bien, pour les lecteurs des étranges X-Men, ces 18 épisodes referment définitivement la décennie des 90’s. Ces X-Men sont ceux que les adolescents d’alors avaient appris à aimer. Passés depuis par des heures plus réalistes, mais aussi plus cyniques, ces héros ont probablement perdu de cette « innocence », de cette fougue rocambolesque qui faisait d’eux des êtres extraordinairement… attachants. Jean, reviens pour de bon ! Et toi, Cyclope, épouse-la de nouveau, bon sang ! Vraiment, pour peu qu’on soit sensible à ces situations « old school », un rien caricaturales, on ressort du voyage interstellaire avec l’envie de replonger dans de vieux « Spécial Strange ».
En bonus, le deuxième volume de cette nouvelle édition française propose, ce qui n’est pas rien, le « Wolverine :The End » scénarisé par Paul Jenkins (« The Inhumans », « The Sentry ») et illustré par le maître italien Claudio Castellini (« Silver Surfer : Dangerous Artifacts »). Au programme, la dernière chasse de Logan…
[Nicolas Lambret]
« X-Men : La Fin – Vol. 1 & 2 », par Chris Claremont (scénario) et Sean Chen (dessin), Panini France, Coll. Marvel Deluxe, avril 2009, 264 p.(v1) et 180 p. (v2)
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