Walking Dead en arrive à la fin de sa neuvième saison, avec les éléments qui se déchaînent et une recomposition des différentes communautés qui animent la série depuis des années. Qui finira où et surtout est-ce que l’ultime épisode de cette saison verra encore des têtes connues disparaître ou apparaître ?
La semaine dernière les spectateurs de la série (et sans doute encore plus ceux qui ne lisent pas le comic-book d’origine et n’ont pas vu le coup venir) se sont pris une baffe avec la conclusion de l’épisode 15. Un véritable traumatisme pour les gens d’Alexandria, de la Colline et du Royaume car si les morts sont nombreuses dans cette série, qu’on les doive aux « marcheurs » ou à quelques guerres, la frontière dressée par Alpha a l’impact d’un 11/9 pour les différents groupes de héros. De plus les premiers flocons apparus à la fin de l’épisode annonçaient un changement de météo. La neige ? Du jamais vu dans la série. Ceux qui voyaient déjà Walking Dead lorgner activement du côté de Game of Thrones (une armée de marcheurs dirigées par Alpha, menaçant de passer sa frontière dans une région enneigée, même le sadisme des décapitations évoquait plus GoT que Walking Dead). On le comprend dans ce seizième épisode, ce n’est pas à proprement parler « l’hiver qui arrive » mais une tempête dévastatrice. La communauté du Royaume, déjà à bout de ses réserves dans cela (il faut croire que le commerce et le troc de la Foire n’a pas suffi), décide de quitter son siège habituel pour trouver refuge ailleurs. Dans une amitié retrouvée, les gens d’Alexandria et ceux de la Colline les accompagnent pour les protéger des embûches qui, dans un tel monde, ne manquent pas de se matérialiser.
On peut se poser la question de savoir si la production n’aurait pas mieux fait d’arrêter cette saison sur le coup de théâtre de la semaine dernière tant cette fois-ci on revient – au premier abord – sur quelque chose qui tient plus de la routine pour les héros : se déplacer d’une communauté à l’autre en décapitant les morts-vivants qu’ils trouvent sur leur chemin. Il y a, à d’autres degrés de lecture, des choses intéressantes qui se déroulent, comme la réunion spirituelle de certains personnages historiques de la série. En un sens le « line-up » achève de se remettre de la disparition de Rick avec les têtes d’affiche restantes qui mesurent combien elles peuvent compter les unes sur les autres. Mais que le chemin est long entre le Royaume et la Colline, plus qu’il semblait l’être auparavant. Si les deux communautés n’ont jamais franchement été de proches voisines, l’ellipse, ici, nous perd un peu. La semaine dernière Alpha enlevait, torturait Daryl et les autres puis en relâchaient certains à sa frontière en l’espace d’une nuit. Cette fois, le même repère est à plusieurs jours/nuits de distance. Et même si on comprendra bien qu’à un certain stade les héros font des détours pour éviter les « problèmes », cette marche manque d’autant plus de rythme que les quelques obstacles qu’ils rencontrent sont un peu « attendus ».
Au bout de neuf saisons, bien entendu que même le spectateur le moins attentif aura compris que lorsque les héros espèrent qu’un plan va bien se passer, quelques « zombies » ne manquent pas d’intervenir. Le réalisateur Greg Nicotero n’en est pas à son bout d’essai (il a supervisé près d’une trentaine d’épisodes rien que sur cette série), il n’en demeure pas moins un géant en termes de maquillages et d’effets spéciaux. Ce qui explique d’ailleurs peut-être qu’on lui confie certains épisodes où la mise en place des « marcheurs » est plus technique. Nicotero pense sa mise-en-scène autour de l’effet et moins de l’émotion ou du sentiment. Là où la semaine dernière Laura Belsey, réalisatrice sur plein de séries TV super-héroïques mais aussi sur Esprits Criminels avait une certaine pertinence pour mette en scène l’impact d’un crime odieux tout en le laissant essentiellement hors-champs, Nicotero souligne le visible. On « sent » sa mise en place par rapport à certains épisodes précédents (la scène avec Lydia et le zombie coincé dans la mare gelée, c’est du pur Nicotero). Et le problème c’est qu’à partir d’un moment on le « sent » venir. Quand nos experts de la survie s’engagent sur la rivière, on serait tenté de leur crier que des morts ne vont pas tarder de surgir du sol, tellement c’est évident selon la logique de la série. Et puis tiens, d’un coup stalactite de glace dans le champ visuel. Est-ce qu’on ne serait pas sur le point de voir un héros s’en servir pour… ben devinez.
On peut aussi se demander (mais là la question est plus du côté scénaristique) comment le groupe peut croire qu’il ne sera pas « vu » en se concentrant sur d’éventuelles sentinelles, sans réaliser d’une part qu’il laisse des traces durables dans le sol et que d’autre part, même le lendemain ou le surlendemain, que pensera l’ennemi en trouvant des cadavres à la tête proprement tranchée ou avec un orifice d’entrée de flèche dans la tête ? Une autre maladresse vient du fait de mentionner Maggie (partie « dans une autre communauté qui avait besoin d’elle, nous ont appris les épisodes précédents). D’abord parce que cela revient à remettre sur le tapis qu’il y a quelque part dans cette mythologie un autre groupe qu’on ne nous montre pas et la manière fort désinvolte dont on a éloigné le personnage entre deux épisodes. En mentionnant Maggie, ses (anciens) amis n’ont même pas l’air de s’y intéresser. Quand Rick disparait, ça compte. Quand Maggie ne donne plus de nouvelle alors qu’elle est avec un autre groupe qui, allez savoir, pourrait aider ? Ben ils s’en foutent. Un manque de finesse apparaît aussi dans la jonction entre la Colline et le Royaume. Jusqu’ici la Colline était une démocratie, l’arrivée d’Ezekiel semble « coloniser » l’endroit, devenu le nouveau Royaume sans qu’aucun des résidents précédents ne s’en offusque (sans doute que cette dimension sera gardée pour la saison suivante ?).
Dans le même temps la mise en scène des séquences émotionnelles (la discussion Lydia/Carol, entre autres) sont expédiées de façon très factuelle. Vers la fin, on en arrive à une banalisation du retour au bercail de certains anciens résidents d’Alexandria alors que la scène pourrait réellement les introniser dans le rôle de vedettes de la série dans l’ère Post-Rick. On appréciera aussi que l’histoire négocie sans doute un virage pour Negan dans sa relation avec les autres. Mais c’est sans doute un élément qui fonctionne mieux pour le lectorat des comics, qui se doute un peu de ce qui va se passer. Normalement, Negan devrait être un point fort de la saison 10. Mais il n’est pas certain que le grand public ait la sensation d’un changement à ce stade. Même si la scène finale nous réserve encore une allusion à un élément connu des comics, en faisant allusion à un plus large monde en dehors de ce qui est connu, les scénaristes oublient un peu qu’ils ont eux-mêmes joué avec cet aspect « étendu » ces deux dernières saisons (les scènes avec l’hélicoptère), que Fear The Walking étend encore la chose (y compris, déjà, avec des épisodes tournant autour d’échanges radio) et que les spectateurs ne vont sans doute pas considérer cette nouvelle comme spectaculaire. Mauvais l’épisode ? Non, loin s’en faut. Un brin prévisible et téléphoné par endroits ? Atténuant l’impression qu’on avait, il y a une semaine, d’entrer dans un jeu avec de nouvelles règles ? Assurément. On reste sur l’impression d’avoir vu la fin de la saison 9 la semaine dernière et de voir ici une sorte de projection en avant-première d’un épisode de redémarrage de la saison suivante. C’est une fin en deçà, pour une saison qui aura cependant vu un véritable réveil, un regain d’intérêt, pour Walking Dead. D’autant plus dommage de finir sur une touche qui aurait pu donner bien plus d’appétit pour l’avenir.
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