Scott Lang (Paul Rudd) est un ex-cambrioleur qui s’est promis de ne pas retomber, de manière à pouvoir faire partie de la vie de sa fille et être le meilleur papa possible, malgré ses maladresses régulières. Mais la société n’est spécialement tendre avec les ex-taulards et Lang va devoir sérieusement réfléchir à un nouveau casse s’il veut se remettre à flot et continuer de voir la petite Cassie. En vis-à-vis, il y a le bouillant Pym (Michael Douglas), un vieux scientifique retiré des affaires, au point que ses employés le reconnaissent à peine quand il passe, rarement, à son usine. Et pourtant Pym est un homme hanté par un secret extraordinaire, qui lui a déjà beaucoup coûté. Un secret qu’il a caché… dans le coffre que Lang et ses amis projettent de voler. Bienvenu dans un long-métrage qui prête une attention toute particulière au mythe d’Ant-Man. Vous me direz que c’est logique, que c’est « marqué dessus », mais ce que je veux dire c’est qu’au bout du compte il est étonnant de voir jusqu’où les scénaristes sont arrivés à placer des choses liées aux deux principales incarnations d’Ant-Man. Michael Douglas/Pym ne fait pas qu’une petite apparition de 15 minutes le temps de prendre son chèque. Il est au contraire une partie intégrante de l’histoire et du passé de l’univers cinématique de Marvel mais aussi un élément important dans l’alchimie de ce film. Pym est un type acerbe, un père et un époux rongé par le remord mais aussi le mentor de fait de Lang, dans une relation très particulière qui fait qu’on se demande en divers endroits lequel des deux a le plus besoin de l’autre.
Ant-Man est un petit film sans ambition. Si cette phrase vous paraîtra sans doute condescendante, qu’on ne s’y trompe pas : c’est ce qui fait sa force ! Voici un projet que Marvel Studios a mené avec une pression certaine (le changement de réalisateur à quelques semaines du tournage en témoigne) pendant des années, mais pas avec les mêmes enjeux qu’un Avengers II ou même que les films précédents de la gamme. Cela donne à ce film quelque chose de plus détendu et, si on ne manque pas de guest-stars ou de références à d’autres super-héros, la logique est ici tout autre. Age of Ultron avait ses propres mérites mais aussi, incontestablement, ses défauts, comme un empilement de scènes de scènes d’exposition (Ultron, Quicksilver, Scarlet Witch, Vision, sans oublier la famille d’Hawkeye). Ant-Man est plus simple ou auto-contenu. S’il ne manque pas d’humour, c’est quelque chose de beaucoup plus « à froid » que la plupart des autres films Marvel, Scott Lang cultivant un second degré assez différent (même si certains de ses potes jouent le rôle du bouffon/slacker plus habituel chez Marvel). Et puis tout découle d’une même technologie et, en un sens, on peut faire une comparaison avec Iron Man 1 et son combat contre l’Iron Monger. Là, rassurez-vous, c’est moins pataud mais le fait est qu’une fois qu’on a expliqué la particule Pym, l’introduction rapide d’autres mini-personnages devient possible, sans passer des heures dans des palabres. Du coup, Ant-Man est un film qui s’étale dans toute une chronologie, qui dévoile un passé de Marvel tout en s’intéressant aussi au futur. Et de ce côté-là les deux scènes planquées dans le générique font le job, même si la première est logique et pratiquement sans surprise (mais néanmoins ultra-nécessaire) après vision du film. La deuxième séquence est extérieure à Ant-Man bien qu’elle implique des retombées pour lui. Mais bien qu’elle fasse le job, on est surpris par la prise de vue assez bricolée de ce dernier segment, vue l’importance stratégique…
On fait un procès aux films Marvel depuis quelques temps sur la place occupée par les femmes. Si par endroit on peut le considérer comme justifié (l’absence de film « féminin » jusqu’à Captain Marvel, mais Warner ne fait pas mieux en la matière), sur d’autres aspects c’est une contre vérité car les femmes sont loin d’être des potiches. Pepper Potts sauve carrément la vie à Iron Man dans deux films sur trois (il n’arriverait pas à gagner sans elle). On est loin de Lois Lane et, sur ce terrain, Hope Van Dyne (Evangeline Lilly) vient assez bien compléter la donne, puisque, clairement, elle serait plus compétente pour le job que Scott Lang et qu’elle n’en fait pas mystère. D’une certaine manière le film Ant-Man voit l’apparition de plusieurs super-héroïnes dans l’univers cinématique et, comme le dit l’un d’entre elles « It’s about time ! » (« il est grand temps »). Il ne faudrait pas oublier, non plus, l’importance de Cassie. Je ne parle pas de la prestation de la petite comédienne mais bien du fait que Scott soit père, une situation qui le défini pratiquement à chaque instant. Là où l’essentiel des héros Marvel sont de grands enfants (Lang n’est pas d’une maturité à toute épreuve mais…), Ant-Man a un sens des responsabilités. L’autre chose qui change, avec Ant-Man, c’est que c’est un personnage qui est tout sauf solitaire. Ant-Man est un « général ». Il est pratiquement tout le temps accompagné, parle avec ses fourmis. On n’échappe pas à la scène un peu niaise du sacrifice d’une des bestioles (mais bon, la chose existe aussi dans les comics), mais l’élément à retenir c’est qu’Ant-Man est un personnage beaucoup plus social et sociable que ses prédécesseurs.
Si le départ d’Edgar Wright, remplacé par Peyton Reed, a beaucoup fait causer, sa patte est encore manifestement là. Il est d’ailleurs dûment crédité au générique et des scènes du film font vraiment penser à lui et à son style. Le moment au fond de la baignoire, qui prend des allures du mur du Nord de Game of Thrones, par exemple… Ce n’est pas tout le temps le cas, cependant. En termes de réalisation, son remplaçant heurte un plafond invisible en plusieurs endroits du film, en particulier pour ce qui des scènes de dialogue « statique » où là, d’un seul coup, sur ces passages, c’est filmé avec le dynamisme d’un téléfilm des années 80… mais en un sens. Néanmoins il faut être honnête, cela ne vient pas exclusivement de la réalisation mais aussi du concept d’origine. Quand David Michelinie et Bob Layton ont inventé Scott Lang, son profil avait quelque chose d’un pilote de série TV. Scénaristiquement il y a donc un voisinage avec des feuilletons comme Invisible Man (celui avec Vincent Ventresca). Ces réserves sur les limites de l’idée et de la réalisation ne plombent cependant pas le résultat final, qui est d’une assez bonne tenue. Il faut dire aussi que la distribution est là pour porter ces moments en deçà. Là où Age of Ultron était comme un gâteau qu’on aurait abîmé à force d’y rajouter de la décoration, Ant-Man fonctionne globalement comme un film très sympa (et pas comme une réinvention du cinéma ou une montée des enchères qui perdrait tout sens). Ant-Man est un petit film sans ambition, oui, mais sans savoir ce que cela donnera au niveau des entrées, c’est assurément le film de super-héros le plus fun depuis Guardians of the Galaxy et plus facile à assimiler puisque moins chargé… Ant-Man est donc à mon humble avis le film de super-héros de l’année. Pas de portée philosophique ou quoi que ce soit de ce genre, mais – même si Lang est un cambrioleur – on ne sort très certainement pas volé…
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