Savage Dragon vit depuis plusieurs années au Canada. Mais qu’en est-il des super-héros canadiens ? Il y a bien une équipe, qu’Erik Larsen avait vaguement évoqué. Mais cette fois-ci elle occupe le premier plan : découvrez North Force, « l’Alpha Flight du Larsenverse »…
Scénario d’Erik Larsen
Dessin d’Erik Larsen
Parution aux USA le mercredi 2 juin 2021
La lecture de Savage Dragon nous rappelle à l’occasion deux choses. D’abord il n’y a pas assez de gens qui lisent ce comic-book (en tout cas pas à hauteur de sa valeur). Et, oui, on sait, ouin il n’y a plus d’édition VF, c’est la faute aux méchants éditeurs mais en fait si tous les gens qui se lamentent sur sa non-disponibilité en France s’étaient un peu bougés pour l’acheter quand elle était dispo… la question serait autrement réglée. Mais même aux USA où elle continue sa route, il faut bien dire que Savage Dragon est un titre relativement confidentiel, qui ne tient que grâce à l’endurance de son auteur, Erik Larsen. L’autre chose que nous rappelle régulièrement Savage Dragon c’est la qualité et la pertinence de Larsen et le fait qu’il pourrait faire des merveilles si on lui laissait certains titres des « big two » (ou s’il était intéressé). Savage Dragon #259, c’est la démonstration de ces deux axes, alors qu’Erik Larsen donne corps à sa version d’Alpha Flight. Gardons-nous des évidences : forcément, dès lors qu’un créateur de comics va chercher à inventer un supergroupe canadien (la Northforce) et y glisser un héros patriote, il y a des chances que le résultat ressemble à Guardian (ou Captain Canuck) dirigeant une nouvelle mouture de la « Division Alpha », c’est certain (la question est d’ailleurs abordée dans le courrier des lecteurs). Mais le déroulé de l’épisode, la manière d’introduire d’abord comme des personnages civils qui renvoient à la diversité du peuple canadien tout en jouant avec quelques clichés (l’amérindienne capable de se transformer en animal), tout cela nous ramène au complexe œdipien que Larsen entretient envers John Byrne. On sait que ces deux-là ne partiront jamais en vacances, du fait de brouilles déjà anciennes. Et pourtant Larsen reste fasciné par l’œuvre du bonhomme. Au point d’écrire et dessiner ici un épisode qui, pour un peu, passerait totalement comme le premier numéro d’un reboot d’Alpha Flight. Larsen lui-même n’ignore pas la valeur potentielle de Northforce puisque l’épisode existe en deux versions : Savage Dragon #259 et Northforce #0. De fait, on prendrait bien un titre régulier de Northforce et l’on peut regretter que Larsen ne suive pas le modèle de certains de ses collègues (comme le Spawn Universe) et ne lance pas plus de spin-offs de Savage Dragon.
Une des choses qui fonctionnent bien dans cet épisode c’est que Maxine (l’épouse nymphomane de Malcom Dragon) ne fait qu’une courte apparition et finalement plutôt pour le renvoyer à ses responsabilités qu’à la gaudriole. Si Maxine avait un intérêt « transgressif » les premiers temps on a franchement l’impression ces dernières années que « le gag de la nympho » n’a que trop duré, au point à en devenir carrément trop répétitif. Il y a un autre intérêt dans cet épisode, c’est qu’il est relativement « reader friendly ». Même si vous ne connaissez pas Malcom, vous comprendrez assez vite ses tenants et ses aboutissants, sa position à la fin de l’histoire. Car Larsen, là encore à sa manière, renoue avec les grandes figures classiques. Il y a, dans Malcom, quelque chose d’un Peter Parker a qui l’on propose de rejoindre les Fantastic Four ou les Avengers, sans qu’on sache trop jusqu’à la dernière page quelle sera la décision. Et au final il y a comme un parfum de Silver Age quand la décision arrive. Si vous n’avez pas touché Savage Dragon depuis des années ou même si vous n’avez jamais lu un comic-book de Savage Dragon de toute votre vie, cela peut être une bonne porte d’entrée. C’est une lecture aussi à considérer non seulement si vous êtes en manque d’Alpha Flight mais aussi de certains éléments qu’on trouve de moins en moins chez les Big Two. C’est à dire qu’il y a l’event, la bataille, mais aussi surtout les sentiments, la personnalité du héros, qui refusent de s’effacer devant l’event. Toute la dernière partie de l’épisode peut se lire comme une parabole de cette situation. Savage Dragon est plus qu’une série de caractère (qui, encore une fois, devrait plaire à ceux qui aiment Invincible par exemple), c’est une série avec sa personnalité, sa sensibilité, qu’elle refuse de compromettre.
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