Wolverine surfe à son tour sur le registre des anthologies noir et blanc, avec une couleur en option. Il suit en cela le chemin déjà initié par des Batman ou Harley Quinn ou, pour remonter plus lointainement, Sin City. Mais la spécificité du personnage est d’avoir des époques de sa vie bien délimitées, d’où un registre « historique » qui permet plus de choses (là où un Batman est sans doute plus intemporel). Comme bien souvent, ce genre d’anthologie nous propose un peu tout et son contraire. Mais c’est l’intéressant qui l’emporte.
Scénario de Gerry Duggan, Matthew Rosenberg, Declan Shalvey
Dessin d’Adam Kubert, Joshua Cassara, Declan Shalvey
Parution aux USA le 4 novembre 2020
On a déjà vu des histoires en noir et blanc (le sang ayant ici fonction de « valeur ajoutée ») de Wolverine mais c’est la première fois qu’on voit une série se monter autour d’un effort concerté pour explorer, au passage, différentes étapes de sa vie. Wolverine: Black, White & Blood #1 nous expose assez vite la richesse potentielle du concept puisqu’on retrouve aussi bien Logan en mode « Weapon X », en super-héros en costume marron ou encore en blouson période « New X-Men » de Morrison et Quitely. Rien n’interdirait dans de futurs numéros d’imaginer des vignettes sur l’enfance du petit James ou encore sur ses années black ops au sein de la Team X, avec Maverick, par exemple. Disons-le tout de suite les trois segments de cette première livraison sont superbes et contrairement à ce que pourrait laisser croire le titre il n’y a pas vraiment de « noir », plutôt des grisés qui laissent entrevoir les coups de crayon ou de pinceaux. Ces tonalités donnent une ambiance qui fait immédiatement le job sur le plan visuel, même si les trois dessinateurs ont des styles différents. Visuellement, Adam Kubert, Joshua Cassara et Declan Shalvey valent rien qu’à eux l’achat.
Scénaristiquement il y a quelques risques inhérents à ce genre d’anthologie et ce premier numéro n’y échappe pas totalement. D’abord, si la force de Wolverine est d’avoir une chronologie propice à explorer, le point faible du personnage est… d’avoir une chronologie propice à explorer. C’est à dire qu’à force de vouloir remplir le passé du héros de rencontres spectaculaires on en vient à ne plus trop comprendre le sens de ses premières apparitions réelles. Ici débarque, par exemple, un Wendigo qui fait qu’on se demande pourquoi ensuite Logan a tant peiné face à un monstre similaire (dans les pages d’Incroyable Hulk ou dans Uncanny X-Men). Surtout, Gerry Duggan reste dans la petite histoire qui voudrait jouer sur l’émotion. Et quelques pages pour dire que Wolverine, même à son niveau le plus bestial, reste un homme, c’est un peu déjà vu et cela n’apporte pas grand-chose. Les deux autres histoires, respectivement écrites par Matthew Rosenberg et Declan Shalvey, sont des exercices bien plus réussis car elles reposent sur des notions de faux-semblants. On met quelques pages à se demander ce qui se passe et puis finalement qui trompe qui (même si les deux scénaristes partent dans des directions assez différentes). Pour résumer on pourrait dire que ce premier numéro nous propose trois facettes : l’animal, l’espion et l’aventurier solitaire. On vous l’a dit, rien que visuellement cela vaut le détour et si l’une des trois histoires est un peu en deçà les deux autres, sans changer la face du monde ou la continuité, nous entraînent assez efficacement dans leurs « embrouilles » respectives.
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