Doomsday Clock en arrive à un épisode au contenu important puisqu’il lève le voile sur l’identité et l’origine du nouveau Rorschach. Geoff Johns et Gary Frank en profitent également pour ramener un autre personnage lié à Watchmen (pas franchement le plus attendu) mais aussi une héroïne de l’univers DC dans un rôle mystérieux. Un tournant ?
Scénario de Geoff Johns
Dessins de Gary Frank
Parution aux USA le mercredi 28 mars 2018
Si Geoff Johns nous avait raconté d’emblée l’identité du second Rorschach, sans doute que nous l’aurions jugé avant de le connaître. Mais il a préféré installer le mystère et le mettre dans une situation poignante. Alors qu’il voudrait être cru (tout en refusant d’accorder sa confiance), le voici interné à l’asile d’Arkham. L’occasion pour lui de se souvenir des circonstances qui l’ont amené là, c’est à dire pratiquement depuis l’enfance, en passant par l’incident qui marque la fin du plan d’Ozymandias. Il n’y en a presque que pour Rorschach dans ce numéro, tandis qu’on n’est pas plus avancé sur le sort de Mime et sa tendre moitié, Ozymandias, le Comedian ou Doctor Manhattan. Mais le numéro est riche, en particulier par l’intervention surprise d’un autre larron, qui transmet un peu une forme d’héritage à Rorschach. Il y a une forme de logique méthodique dans la répartition des rôles, avec d’une part un des rescapés du Watchmen originel (Ozy), un autre qui est carrément ressuscité, un troisième, nouveau mais qui hérite de l’identité d’un personnage existant, deux nouveaux mais qui sont des extrapolations de la logique de Watchmen (inspirés de criminels de Charlton Comics) et enfin le revenant de ce numéro, perso croisé dans la première maxi-série mais à l’époque à peine évoqué, comme s’il était une note de bas de page. Johns l’utilise avec une forme de tendre amertume, lui donnant une certaine poésie. La seule chose un peu étonnante c’est que l’on nous avait promis une confrontation entre l’univers des Watchmen et celui de DC Comics. Or, pour l’instant, on a pu voir Superman faire un cauchemar, Batman refuser d’apporter son aide et Luthor s’en sortir blessé. Mais le contact avec le monde de DC est mince, d’autant qu’on arrive au tiers de la série prévue et que l’attrait reste centré sur le sort des héros post-Watchmen (cet épisode le prouve d’ailleurs). Et ce n’est pas la mention anecdotique du Zebra-Man qui va équilibrer les choses. Mais, au moment où l’on se dit que le côté DC est bien mince, arrive une héroïne qui incarne une autre forme de mystère…
« I see what I want to see. And what I see is what is. »
Johns et Frank s’y entendent pour jouer avec les codes de la synchronicité et de l’ironie du destin, comme ici l’insecte qui vient se brûler à la lumière, sorte de fil rouge qui anime le numéro. On sent un vrai travail de relecture du modèle et une volonté d’en remixer certaines figures de style (par exemple Rorschach découvrant l’identité de Batman dans les épisodes précédents faisait écho au premier Rorschach l’appartement du Comedian). Cette fois, en s’appuyant doublement sur les interrogatoires du psy dans Watchmen, les deux auteurs soumettent ici leur Rorschach à un autre psy, soit une ambiance à la fois similaire mais dans le même temps totalement différente. Mais s’ils s’appliquent et s’ils connaissent leur sujet ils font parfois de petits faux mouvements par lesquels ils se trahissent. Les signes volontairement redondants sont parfois maniés avec peu de subtilité (l’insecte foudroyé par une lumière bleutée qui forme le logo de Manhattan, c’est d’une discrétion…). Par moments ils gagneraient à en faire moins, à avoir la main moins lourde. Mais globalement c’est un excellent épisode qui libère beaucoup d’informations tout en restant touchant, en particulier grâce à son guest-star, qui devient un peu le Hollis Mason de cette série…
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