C’est une semaine très chargée de sens pour le milieu des comics, avec le retour de plusieurs valeurs sures. On l’a vu, les Fantastic Four sont de retour chez Marvel mais Vertigo n’est pas en reste, avec ce qui ressemble à une véritable refonte, un « back to the basis » onirique chapeauté par Neil Gaiman. Après le gros succès de Sandman Overture il y a quelques années, c’était pour ainsi dire logique. Vertigo retrouve son marchand de sable mais aussi plusieurs autres personnages liés à cette mythologie. Un réveil de Vertigo ou bien une redite d’un succès passé ?
Scénario de Neil Gaiman, Dan Watters, Kat Howard, Nalo Hopkinson, Simon Spurrier
Dessins de Sebastian Fiumara, Max Fiumara, Tom Fowler, Domonike Stanton, Bilquis Evely
Parution aux USA le mercredi 8 août 2018
C’est dans l’ordre des choses. DC Comics en est à faire des suites de Watchmen (Rebirth, Doomsday Clock), Frank Miller laisse déjà entendre qu’il a en tête le script de Dark Knight IV et peut-être V… Ce n’était qu’une question de temps avant qu’on en arrive à une « continuation » (le mot est plus adéquat que « suite ») de Sandman, autre référence majeure de la fin des années 80 (et du début des 90’s). D’autant que, comme Watchmen, on était déjà passé par une préquelle (Sandman Overture). Cependant, la spécificité du Sandman tel que terminé par Neil Gaiman, c’est de se conclure sur une fin ouverte et la régénérescence du Sandman, désormais Sandman blanc. Sandman était de plus construit autour d’une véritable dynastie de Sandmen, colonne vertébrale de la série. Et à partir du moment où Sandman Universe se fait avec la bénédiction de Gaiman en personne, cette continuation est sans doute, de toutes celles citées précédemment, la plus naturelle et légitime. D’autant que dès ce numéro de lancement, l’idée mérite son titre. Ce n’est pas tellement Sandman qui tient la vedette mais plutôt ses sujets, désemparés, qui réalisent que le Roi des Rêves… s’est éclipsé et qu’il n’y a plus personne sur le trône.
« You don’t need to be scared anymore. »
On pourra voir dans cette situation une parabole de ce qui se passe chez Vertigo, ce label ayant perdu depuis quelques années déjà ses figures historiques (soit que les séries se soient arrêtées, soient que d’autres, comme Swamp Thing, Animal Man et Hellblazer/Constantine, aient été réintégrés dans l’univers DC proprement dit. Dans ce trône vide, on pourra voir aussi tout simplement le siège de Gaiman lui-même. Un Gaiman qui est d’accord pour superviser la relance de toute une aile de Vertigo mais qui, dans le même temps, s’assure de garder la main sur sa version de Sandman. Dans le récit, c’est donc plutôt Matthew The Raven qui joue les fils rouges et visite différents coins du « Vertigoverse ». Car la disparition du Sandman blanc déclenche un effet domino qui touche différents personnages mystiques de Vertigo/DC, comme Lucien ou Tim Hunter, pour la plupart appelés à retrouver leur propre titre dans les semaines à venir (The Dreaming, House of Whispers, Lucifer et Books of Magic…). Néanmoins ce sens d’une certaine légitimité, d’une reprise directe de certains personnages, fait qu’il vaut mieux s’aventurer dans ce numéro de lancement en connaissant certains classiques de Vertigo. Si vous avez entendu parler de Sandman et d’une grande ère de la gamme pendant des années, ce n’est pas forcément le point d’entrée idéal mais bien un « point de reprise ». La lecture d’un ou deux TPB du Sandman de Gaiman ou même de Lucifer est à conseiller (bonne nouvelle, ils sont pour la plupart encore disponibles). Le public visé, c’est celui qui a déjà vibré avec l’ancien royaume de Morpheus, c’est clair dès les premières pages. Sandman Universe privilégie des retrouvailles plus qu’une découverte. D’un autre côté, c’est le propre de toutes ces suites de classique. Il est certain que ceux qui veulent prendre un raccourci et sauter directement au deuxième ou troisième tome d’une saga sans être passés par le premier, s’exposent à quelques moments compliqués. Ici, c’est pareil. Mais les « Sandmanophiles » (et plus largement les « Vergitophiles ») devraient s’y retrouver, même si Universe souffre un peu de la comparaison avec Sandman Overture, qui avait une vision plus soutenue. En fait, l’effet anthologique nous donne seulement des bouts de visions différentes appelées à être plus à l’aise quand il s’agira de visions autonomes. C’est cependant, on l’espère, le signal de départ d’une ère moins décousue pour Vertigo. Et assurément, aussi, l’occasion de retrouver quelques vieux amis…
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