French Collection #217
20 août 2014[FRENCH] Cette semaine, nous continuons à explorer la « fabrique de duplication » que les scénaristes de DC Comics ont mise en place (intentionnellement ou non) durant le silver age. Green Lantern [Hal Jordan] était déjà un personnage bien établi comptant des dizaines d’aventures à son actif et des supporting characters bien établis lorsque parait Green Lantern #10 (1960 Series) en janvier 1962. Alors qu’il est en pleine action et qu’il va neutraliser des contrebandiers de diamants, la voix d’une jeune fille s’échappe de son power ring pour le supplier de ne pas l’utiliser sous peine de la détruire avant de disparaître en hurlant.
Green Lantern [Hal Jordan] s’occupe donc des contrebandiers en utilisant ses poings, mais à un moment du combat il utilise son power ring instinctivement et est persuadé d’avoir tué involontairement la jeune fille.Tourmenté par cette apparition, il demande à son power ring de lui donner des informations sur l’apparition. Il apprend alors qu’elle se nomme Beverly Blanding (traduit en français par Beverley tout comme dans cet épisode Green Lantern [Hal Jordan] se nomme Jodan Green !) et que son père est un scientifique.
Il y a quelques mois, le Dr. Jason Blanding a découvert qu’une de ses inventions était capable de rapetisser des êtres vivants au moyen d’une radiation Meson (visiblement le Dr. Blanding travaille sur le même sujet que son collègue Ray Palmer alias The Atom). D’après ses calculs, son chat qui lui a servi de cobaye est bien vivant dans un monde subatomique. Très inquiet du contexte géopolitique, le Dr. Blanding propose à son épouse et sa fille « d’émigré » dans un monde subatomique à l’abri des guerres humaines. Beverly et sa mère accepte, mais la jeune fille est fiancé au jeune Will Chambers qui décide également de tenter l’expérience afin de resté aux cotés de sa fiancée.
Très rapidement, ses « robinsons de l’atome » façonnent leur nouveau monde en fonction de leur désir grâce aux robots atomiques construits par le Dr. Blanding, Beverly & Will (le lecteur se demande bien comment d’ailleurs, mais passons).Beverly commence alors à s’inquiéter de leur dépendance aux robots, dont certains ont été armés par son père. Un pacifiste dont l’une des premières actions est de doter un monde vierge d’arme est un peu étrange mais le Dr. Blanding est inquiet de possible indigènes hostiles. Elle n’a d’ailleurs pas tort car les robots commencent à se faire la guerre entre eux. Le Dr. Blanding découvre alors que leur mécanisme a été endommagé à cause d’une mystérieuse radiation verte qui est apparue récemment sur Earth-1.
Il s’agit bien entendu des résidus de l’énergie déployée par le power ring de Green Lantern [Hal Jordan]. Se sentant coupable, ce dernier voyage jusqu’au monde subatomique ou il arrête les robots puis ramène toute la famille sur Earth-1 pour les sauver. Beverly & Will lui demande alors d’être leur témoin de mariage. Ce sera la première et seule apparition de la famille Blanding (et pourtant un savant capable de construire un rayon rapetissant et des robots atomiques ne doit pas passer inaperçu).
Le scénario signé John Broome (un écrivain de science-fiction qui marquera le silver age de DC Comics comme scénariste) est vite oublié dans la chronologie de l’Emerald Knight. Pourtant dans The Doom Patrol #107 (1964 Series) de novembre 1966 The Chief [Niles Caulder] est confronté à un problème similaire. Alors qu’ils combattent le robot Ultimax, qui ressemble assez fortement à l’Ultivac que combattirent les Challengers of the Unknown et n’est en fait qu’un énième avatar de The Brain, Elasti-Girl [Rita Farr] reçoit une décharge de gaz en plein visage. Elle commence alors à rapetisser et Robotman [Cliff Steele] se précipite pour la rattraper mais elle disparait dans sa main. En fait, comme le découvrira très rapidement The Chief [Niles Caulder], Elasti-Girl [Rita Farr] est prisonnière dans un monde subatomique présent sur l’index de Robotman [Cliff Steele].Mento [Steve Dayton] décide immédiatement d’aller secourir son épouse et le voilà lui aussi projeter dans le même monde subatomique. Sur place, Elasti-Girl [Rita Farr] a déjà découvert que ce monde subatomique est habité, se nomme Zaraka le monde aux vingt-six soleils et qu’il est en guerre. Les hommes de Toxino, le roi borgne, l’ont en effet capturé car ils la prennent pour une espionne des Moglis !
Amené devant le roi, Elasti-Girl [Rita Farr] est alors condamné à mort par Waja le conseiller du roi. Mais Toxino déteste les exécutions capitales et s’enfuit avec la condamnée dont il est également tombé amoureux (visiblement les standards esthétiques sont identiques sur Earth-1 & Zaraka ou sans surprise l’anglais est la langue commune). Après quelques péripéties, et notamment de sauver le roi de Waja son conseillé belliqueux, Mento [Steve Dayton] retrouve son épouse et leur administre un gaz de l’invention de The Chief [Niles Caulder] qui leur rend leur taille normale.
Cette fois-ci, le monde subatomique était habité par un peuple distinct dans un style très héroïc fantasy. Il faut dire qu’entre temps a été publié Fantastic Four #16 (1961 Series) dans lequel nous découvrirons l’épisode The Micro World of Doctor Doom! dans lequel The Doctor Doom découvre un monde subatomique dont la technologie est restée au niveau de celle du moyen-age. En sachant le soin qu’Arnold Drake [le scénariste de The Doom Patrol #107 (1964 Series)] apportait a étudié les comics Marvel, la coïncidence est peu probable. La mode des mondes subatomiques était lancée ! Après tout, comme l’indique The Chief [Niles Caulder] : « C’est incroyable ! Cela signifie que des milliards et des milliards de mondes atomiques peuvent exister… »
Il est possible de citer très rapidement le monde existant dans le livre de magie du père de Zatanna qui le visitera avec The Atom [Ray Palmer] de manière parfaitement logique dans Atom #19 (1962 Series) comme nous l’avons évoqué dans French Collection #176. L’aller-retour (intentionnellement ou non) entre DC Comics & Marvel se poursuivra tout au long du silver age (et même au-delà).
C’est ainsi que nous découvrons dans Aquaman #50 (1962 Serie) de mars – avril 1970 qu’Aquaman [Arthur Curry] a été victime d’extraterrestres qui l’ont une nouvelle fois réduit à une taille microscopique. Mais cette fois, la civilisation qu’il découvre est plutôt futuriste même si les habitants sont dans une certaine « apathie » qui rappelle certains livres ou films de Science-Fiction. Sur Earth-1, Mera pense que le rayon des extraterrestres à tuer son mari. Elle essaye néanmoins de la contacter de toutes ses forces. Ses appels mentaux font alors passer Aquaman [Arthur Curry] d’un monde subatomique à l’autre.
L’épisode est assez connu aux Etats-Unis car dans l’un des mondes sont représentés Steve Keates (le scénariste sous le nom de Steev) et Jim Aparo (l’artiste sous le nom de Jimm) travaillant dans une « mine » et reconnaissant Aquaman [Arthur Curry] mais s’en désintéressant de peur que Dikk (que nous pouvons reconnaître comme Dick Giordano, Editor de la série à l’époque) ne leur brise les os s’ils ne rentrent pas avec la récolte (allusion assez transparente et humoristique à leur collaboration et au rythme de production).
Après quelques péripéties, Aquaman [Arthur Curry] reviendra à la surface d’Earth-1 grâce à la force mentale de Mera pour se rendre compte qu’il a vécu toutes ses aventures dans l’anneau qu’elle porte à son doigt. Cet épisode fait immanquablement pensé au monde que Hulk [Bruce Banner] découvrira dans The Incredible Hulk #140 (1968 Series) et dans lequel il tombera amoureux de Jarella (nous reviendrons ultérieurement sur cette saga dans un lointain French Collection). Le scénario de cette saga est signé par l’immense écrivain de science-fiction Harlan Ellison. A-t-il lu l’épisode d’Aquaman #50 (1962 Serie) ou a-t-il plus simplement puisé dans le fond de littérature de science-fiction comme John Broome ?
Le concept des terres parallèles aura donné de nombreuses déclinaisons (cf. French Collection #100) mais celui des mondes subatomique également. Les exemples sont quasi-infinis sans mêmes parler de séries entières qui se passe entièrement dans un monde subatomique comme les célèbres Micronauts (à venir également dans un lointain French Collection). Comme quoi, même des idées de scénarios repris en boucle peuvent amener à des concepts extrêmement riches.
[Jean-Michel Ferragatti]