Numéro spécial publié dans le sillage de Monsters Unleashed, All-New X-Men #1.MU a d’excellentes intentions et ambitions. Si ce n’est que vouloir bien faire et y arriver sont deux choses différentes. Jeremy Whitley (qui scénarise par ailleurs les aventures de la nouvelle Wasp) se trompe de langage en donnant à l’ensemble l’architecture d’un cartoon bourré de clichés.
Scénario de Jeremy Whitley
Dessins de Carlo Barberi et Ron Lim
Parution aux USA le mercredi 1er février 2017
Un ami de Gambit est mort dans les marais, non loin de la Nouvelle Orléans. Le mutant a donc l’idée de demander l’aide d’une traqueuse-née, Wolverine (Laura Kinney) pour éclaircir les circonstances de cette mort. Pendant ce temps, le reste des All-New X-Men s’en va profiter des festivités dans la ville, ce qui permet une nouvelle fois au jeune Iceman d’explorer un peu mieux sa place dans la société. Si c’est un numéro produit à l’occasion de Monsters Unleashed, Jeremy Whitley accorde une grande importance à des notions de diversité des mœurs, s’applique à ne pas « simplement » raconter des histoires de monstres et c’est tout à fait louable. Malheureusement l’exécution n’est pas au niveau de ce cahier des charges et le scénario a tout d’une démonstration par l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire. L’intrigue principal (le meurtre de l’ami de Gambit a un goût de carton-pâte, au moins que l’auteur ne prend même pas la peine de donner un nom, un prénom, à ce mystérieux ami, comme si Gambit lui-même n’avait pas la moindre idée de qui il s’agit. Tout au plus on nous dit du défunt que ce n’est pas le genre de personnage qui risquait de se faire tuer par un alligator dans les marais… pour que quelques cases plus loin Wolverine elle-même passe très près de se faire avaler par une de ces bestioles, ne devant la vie sauve qu’à ses pouvoirs et démontrant l’inverse de ce que vient d’expliquer Gambit. Plus tard, quand survient le « méchant de service », il est si stéréotypé qu’il donne en deux bulles son identité et ses motivations, comme si l’on était dans un spectacle de marionnettes. Et le tout est balayé par l’arrivée d’un des monstres de Monsters Unleashed mais servi sans beaucoup d’enjeu. A trop vouloir en mettre dans un épisode unique, Whitley torpille lui-même son histoire (pourquoi rajouter le personnage du Doctor Chimera, qui n’apporte rien, alors que l’ami de Gambit aurait aussi bien pu être directement tué par le monstre ?).
« What’sa matter, petit, your whole team down there dancing. Don’t you feel like dancing ? »
Whitley vient des comics visant l’enfance (Princeless, Mon Petit Poney) ou même la petite enfance et c’est tout à fait respectable. Il faut de jeunes lecteurs si l’on veut que les comics continuent d’exister dans les années à venir. Mais la naïveté assumée de ses projets pré-Marvel semble l’avoir mal préparé à écrire ce genre de récits (pour d’autres raisons, le scénario de Unstoppable Wasp #2 cette même semaine montre lui aussi des lacunes). C’est à dire qu’il lâche la proie pour l’ombre, en se préoccupant (à juste titre) de ne pas raconter un énième combat, il place effectivement des éléments variés (par exemple il exprime bien la relation particulière d’Idie avec la religion ou emmène Bobby vers un carnaval LGBT) mais perd de vue le reste, qui semble écrit en pilote automatique. Si bien que l’enchainement des scènes est décousu (tandis que Chimera approche du cratère du monstre, à quelques mètres de lui, les All-New X-Men, eux, ont le temps d’assister à un carnaval puis de se déguiser pour aller à un bal masqué). C’est un peu comme l’ami de Gambit qui n’existe pas vraiment, auquel le scénario refuse d’accorder quelques petites touches. C’est globalement dommage. D’une part parce que si les dessinateurs Carlo Barberi et Ron Lim ont des styles d’habitude assez différents, ils cohabitent ici de manière assez naturelle. Avec les mêmes éléments (les marais, le carnaval LGBT…) et le même objectif, Whitley aurait pu raconter une histoire plus efficace. Au lieu de cela, c’est cliché sur cliché, avec un ton qui se voudrait naïf mais qui fait finalement simpliste. C’est comme vouloir faire une bonne recette mais en s’occupant surtout de mettre le couvert, sans s’occuper de la partie cuisine. On comprend ce que Whitley veut faire, mais il ne se donne pas les moyens de ses idées.
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