Le prélude de Batman: Metal, gros événement à venir chez DC Comics, se poursuit avec Dark Days: The Casting, dans lequel Scott Snyder et James Tynion IV (accompagnés d’une ribambelle de dessinateurs en vue) continuent de tisser une curieuse toile « métallurgique » qui remonte à l’aube de l’univers de DC. Un curieux équilibre entre structure et chaos, qui en profite pour ramener dans la continuité une horde de héros portés disparus (en tout cas sous cette forme) depuis 2011 et les New 52.
Dessins de Jim Lee, Andy Kubert, John Romita Jr.
Parution aux USA le mercredi 12 juillet 2017
Quand DC a annoncé un crossover cosmique centré autour de Batman et qui permettrait, par la même occasion, de ramener Hawkman, on pouvait être perplexe dans le sens où ces éléments ne semblaient pas totalement coller ensemble. Mais depuis le précédent one-shot, Dark Days: The Forge (hé oui, deux one-shots vendent plus qu’une mini-série en deux épisodes), l’intrigue de Snyder et Tynion révèle au contraire un visage protéiforme, capable de se nourrir de pratiquement tout accessoire qui traîne dans l’univers DC. En gros, en imaginant qu’il y ait un mystère autour du « ninth metal » d’Hawkman Snyder imbrique la chose dans ses propres concepts, comme les Talons de la Cour des Hiboux, ramenés eux-aussi à la vie par une étrange substance. Mais pas seulement. Alors que le Hawkman thanagarien est récemment décédé dans l’univers DC, l’histoire repose sur la réinstauration dans la continuité de son prédécesseur, le Carter Hall du début du XX° siècle et dans la foulée de toute une foule de choses, à commencer par sa version de Hawkgirl (et ce serait bien le diable si on ne revoyait pas ces deux-là dans la Justice Society). L’enquête d’Hawkman, qui précède celle de Batman, permet de resituer de nombreux aventuriers de DC sous leur forme originelle (les Challengers, pour ne citer qu’un groupe, avec le reboot de Dan Didio totalement passé aux oubliettes). Ce qui est curieux, c’est la nature de l’inventaire ainsi effectué. Les deux coscénaristes tissent finement les choses anciennes avec les nouvelles (non seulement la Cour des Hiboux donc mais aussi la machine à cloner des Batmen). Mais au passage des choses totalement valides et acceptées dans l’univers DCnU/Rebirth passent quand même à la trappe. Ainsi, alors que la nouvelle origine de Shazam par Geoff Johns et Gary Frank a fait l’unanimité, on voit redébarquer l’ancien sorcier Shazam (celui qui ressemble à un échappé de Fort Boyard) et on en vient à hésiter. S’agit-il simplement d’une erreur de référence ou bien la génèse de Billy Batson et de la « Shazam Family » vient-elle de refaire un nouveau mouvement de balancier ? Difficile à dire avec certitude.
Pour ce qui est de la forme plus « chaotique » du récit, il y a des choses qui sonnent bizarrement. Comme l’idée et l’identité du prisonnier de la Batcave. On ne voit pas réellement Batman enfermer ce type là-bas (est-ce que la nouvelle base sur la Lune n’aurait pas été plus logique ?) et non ne le voit pas non plus utiliser une cage d’où on peut s’enfuir si facilement. Snyder et Tynion gèrent aussi de manière inégale les autres membres de la Justice League : très bien la dernière fois pour Superman (et un Aquaman aperçu dans une moindre mesure). Mais leur Hal Jordan semble bien peu compétent, se fait avoir comme un « bleu » (un comble pour une lanterne verte) et on a l’impression, sur ce point, de relire le Jordan des All-Star Batman & Robin The Boy Wonder. L’amazone Wonder Woman s’en tire avec plus de prestance. Oui mais voilà : plus tendue et en contact direct avec les dieux (à ce qu’il semble) elle donne l’impression d’avoir été scénarisée avant la refonte de Greg Rucka, semblant plus tenir des épisodes d’Azzarello). Globalement c’est pourtant intéressant, avec plein de pistes lancées à la minute, des secrets cachés à l’intérieur d’autres secrets. En un sens, même si les dialogues sont assez différents et si le monologue d’Hawkman apporte une autre ambiance, il y a quelque chose d’un Hickman préparant son Secret Wars dans ses premiers épisodes d’Avengers. Niveau dessins, c’est un peu l’auberge espagnole, avec les trois dessinateurs à des niveaux différents. Lee & Kubert semblent avoir été un peu plus pris par le temps, tandis que Romita, plus inspiré, nous donne un travail dans la ligné de ses All-Star Batman. Metal semble prometteur de nombreuses retombées, directes ou indirectes. La notion que l’on devine, le Dark Multiverse, semble pourtant un peu faire redite de Terre III et de Forever Evil. Mais l’intérêt est piqué, c’est certain.
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