Review : Captain America : Brave New World

Review : Captain America : Brave New World

12 février 2025 0 Par Pierre Bisson

Captain America: Brave New World suit Sam Wilson, désormais investi du rôle de Captain America. Alors qu’une nouvelle source d’énergie émerge et attise la convoitise du monde entier, Cap va devoir calmer les esprits et s’imposer comme héros. Un parallèle avec son avenir dans le MCU…

Ce film fait suite à la série Falcon et le Soldat de l’Hiver de 2021, où Sam avait déjà fait face à des dilemmes personnels et hésiter à assumer son nouveau rôle. Le film s’ouvre sur un monde qui doit s’adapter à l’ère post-Thanos, mais aussi à la présence d’un nouveau Captain America. Sam Wilson, en tant que Captain America, doit affronter plusieurs défis, à la fois sur le plan personnel, en tant qu’homme noir portant le bouclier, et sur le plan de la sécurité mondiale. Harrison Ford, qui reprend le rôle de Thaddeus Ross, après la disparition de l’acteur William Hurt (qui incarnait le personnage dans les films précédents), ancien secrétaire à la Défense devenu Président des USA. Ross semble être un homme changé. Il est sur le point de conclure un traité de paix entre les différents pays du monde grâce à l’exploitation commune du vestige du Celeste Tiamut, notamment constitué d’adamantium (oui, le même métal que les os de Wolverine). Au milieu de tout ça, un mystérieux individu tente de perturber ce processus. Mais vise-t-il Captain ou Ross ?

Une suite, oui mais à quoi ?

L’un des aspects les plus déroutants du film est son ton, qui semble inconsistant et parfois peu fidèle à l’héritage de la série Falcon et le Soldat de l’Hiver. Alors que cette série télévisée mettait en lumière les luttes personnelles de Sam Wilson et Bucky Barnes après la chute de Captain America (Steve Rogers), le film semble dériver vers une direction inattendue. Le film semble se concentrer davantage sur des enjeux géopolitiques et des scènes d’action plutôt que sur l’évolution des personnages. Sam, lui-même, semble être « statique », toujours à se demander s’il est digne de son nouveau rôle… après 3 ans à l’exercer. Certes, il n’a pas de super-sérum, mais Sam (tout comme son interprète) incarne parfaitement le Captain America qu’on retrouve dans les comics. Malgré tout, certains auront du mal à accepter tout ce que traverse Cap. Il faut dire que la version de papier est plus facilement crédible. En effet, dans les comics, quand Sam se fait envoyer bouler par un Skrull ou tout autre vilain, il se relève et on ne voit pas où est le mal. En version « live », on a du mal à accepter que Sam se prenne des coups de couteau, de hache ou de coup de poing de Hulk et continue de se battre sans aucun souci, même si certains gadgets l’aident dans ses combats.

L’énigme du « méchant » et la dynamique entre Thaddeus Ross et les autres personnages prend trop de place. Ce choix de se concentrer sur ses intrigues moins émotionnellement connectées au parcours de Sam Wilson rend le film plus proche de L’Incroyable Hulk, avec Edward Norton, qu’une suite logique à la série où les thèmes de la rédemption et du rôle de Captain America étaient explorés de manière plus intime. On apprécie plus les moments de camaraderie entre Sam et Joaquim Torres (personnage vu dans la série Falcon et le Soldat de l’Hiver) que les lamentations de Ross sur l’absence de sa fille Betty. Harrison Ford, pourtant toujours vaillant, joue un ex-Général Ross bien faible. Il est plus proche d’un Joe Biden sénile qu’un Donald Trump pro-actif comme on aurait pu l’espérer, après avoir découvert un Général Ross très virulent dans L’Incroyable Hulk ou Civil War. Il semble être en « pilote automatique », comme si sa version du Président des USA de Air Force One ou Danger Immédiat était toujours en poste 30 an plus tard.

Rififi en coulisses

La production de Captain America: Brave New World n’a pas été sans embûches. Comme de nombreux films à gros budget, le tournage a été marqué par des changements de « cap », notamment après des projections tests peu favorables. En effet, plusieurs réécritures majeures et des retours en arrière sur certains aspects du scénario. Il semble que les premières projections ont révélé des problèmes de tonalité et de rythme, ce qui a conduit à un grand nombre de scènes refaites et à des ajustements dans l’intrigue.

Les retours des tests de public ont été suffisamment négatifs pour qu’une révision en profondeur soit imposée. Les reshoots ont été effectués, augmentant les coûts de production (mais ne dépassant pas un budget de 180 millions de dollars) et retardant encore la sortie du film. Il est évident que la Marvel Studios, habituée à soigner ses productions, a pris cette situation au sérieux, cherchant à équilibrer le film de manière à plaire à un public large tout en préservant les éléments du MCU.

Ces ajustements multiples ont malheureusement laissé une empreinte sur le produit final. Le film semble parfois déséquilibré, jonglant entre des moments où l’on ressent une sincère volonté d’approfondir les personnages et des passages où l’intrigue semble plus superficielle, comme si le film avait été recomposé à la hâte pour satisfaire les attentes du public. Ce patchwork d’idées a parfois du mal à trouver son ton, ce qui nuit à l’expérience de visionnage.

Visuellement, le film est aussi un mélange de scènes bien mises en scènes et de scènes plus confuses, trop brouillon. Les effets spéciaux ne sont ni époustouflants ni aussi mauvais que The Flash (pour citer l’un des plus mauvais). Le Red Hulk est particulièrement bien modalisé et est bien une version déformée de Harrison Ford. Mais on regrette certains plans (parfois pour de simple dialogues) où l’arrière-plan fait incrusté à l’arrache par manque de temps ou changement de dernière minute.

L’Action au Service d’une Histoire Mollassonne

Une autre faiblesse du film réside dans son rythme, qui souffre de moments où l’intrigue semble stagner. Malgré de nombreuses scènes d’action spectaculaires, Captain America : Brave New World manque parfois de l’énergie nécessaire pour porter son histoire. Il y a bien sûr des scènes d’action emblématiques, avec des courses-poursuites dans les airs, des combats impressionnants à main nue et des confrontations à couper le souffle, mais ces moments ne suffisent pas à compenser le manque de profondeur dans la narration.

L’une des grandes faiblesses réside dans le fait que ces scènes d’action, aussi bien réalisées soient-elles, semblent se substituer à une véritable progression narrative. Le film enchaîne des séquences mais l’enjeu émotionnel ou psychologique des personnages n’évolue guère. C’est comme si le film se reposait sur la seule capacité du MCU à offrir des scènes d’action qui, tout en étant très efficaces, ne parviennent pas à masquer les lacunes du récit. La mise en scène, bien que fluide, ne compense pas la confusion tonale et la structure trop éclatée de l’histoire. On a l’impression que le film tente de combiner plusieurs genres et niveaux d’enjeux sans jamais se fixer sur un ton propre.

La multiplication des personnages tels que Sidewinder, incarné par Giancarlo Esposito, ou Shira Haas, jouée par Ruth Bat-Serpah, n’amènent pas grand chose. Le premier étant un ajout de dernière minute, destiné à revenir par la suite. La seconde n’ayant plus grand chose à voir avec son personnage des comics. Les « revenants » comme Isaiah Bradley (sous les traits de Carl Lumbly), le Cap oublié, ou Joaquim Torres, le nouveau Faucon, sont plus intéressants et leur alchimie avec Sam Wilson (et par extension Anthony Mackie) amène des scènes à la fois drôles et intenses.

Captain America : Brave New World souffre d’une production chaotique et d’un ton trop éclaté. Si vous avez aimé la série TV Falcon et le Soldat de l’Hiver, le film vous semblera une extension logique et plus spectaculaire de la série. Mais pour ceux qui espéraient voir un renouveau du MCU, il faudra encore attendre. Entre une direction incertaine, des retours en arrière scénaristiques et une approche géopolitique qui évacue les enjeux personnels des personnages, le film perd de son essence et ne parvient pas à incarner pleinement le rôle de Sam Wilson en tant que nouveau Captain America.

Captain America : Brave New World – Avec Anthony Mackie, Harrison Ford, Ruth Bath-Serpah, Carl Lumbly, Giancarlo Esposito, Tim Blake Nelson, Danny Ramirez & Liv Tyler – En salles le mercredi 12 février 2025 – Marvel Studios/Disney