Dessin de Rags Morales
Parution aux USA le mercredi 7 septembre 2011
J’ai envie de vous dire que c’est cette semaine que les choses sérieuses commencent réellement pour l’univers DC, après le « sampler » vite lu que semblait être Justice League #1. Cette fois, avec la parution de multiples titres on va enfin commencer à se faire une idée de la gamme dans son ensemble. Dans ce contexte, Action Comics #1 est sans doute une des séries les plus attendues. Et à juste titre ! Parce qu’après All-Star Superman, retrouver à nouveau Morrison sur les exploits du kryptonien est déjà, en soi, un événement annoncé. Mais même en faisant abstraction du nom et de la renommée de l’auteur, dès les premières pages il est apparent qu’on est dans quelque chose de bien plus musclé, bien plus dense le premier numéro de Justice League. Avec Action Comics, voici un comic-book que je n’aurais pas peur de conseiller à quelqu’un qui n’aurait pas lu de BD jusqu’ici et qui ne saurait pas par quel côté se lancer dans la lecture de Superman. Morrison ne nous refait pas l’origine en partant de Krypton (même si par la force des choses j’imagine qu’on y viendra). En fait il fait relativement l’impasse sur la naissance du héros et son adoption pour s’intéresser à son arrivée à Metropolis. Morrison ne vise pas l’origine du super-héros mais bien (la nuance est de taille) le super-héros originel.
D’abord il y a l’esprit : on entre dans le vif du sujet, il y a réinvention assumée mais dans le même temps le scénariste est soucieux de revenir au Superman des débuts, tel qu’il paraissait vers 1938-1939, avant qu’il se range et devienne un boy-scout apprivoisé. Le Superman de Siegel et Shuster était plus bourru que ce que nous avons connu depuis, ne demandait la permission à personne quand quelque chose le dérangeait. Si un immeuble était insalubre, il le détruisait ? Un politicien était corrompu ? Il l’envoyait en prison ou le chassait de la ville sans attendre. En un sens le « boy-scout », figure de croisière qui s’est installée dans l’oeil du public dans les décennies suivantes, est une « perversion » du concept d’origine. C’est à cette source que Morrison vient puiser le sens de cet Action Comics relancé. Superman retrouve son rôle de héros du peuple, par opposition à celui de héros de l’establishment qui a pu être le sien ces dernières années. Si on le compare à son homologue d’All-Star Superman c’est un peu, à plus d’un niveau, l’alpha et l’oméga. Le Superman de ce nouveau Action Comics #1 est un héros à ses débuts, qu’un trop plein d’idéalisme rend un brin cynique. Le Superman d’All-Star était, au contraire, à la fin de sa vie, se savait condamné mais restait cependant un idéaliste plein d’espoir. Au demeurant on pourrait croire les deux notions opposées mais on peut les prendre comme deux facettes d’un même personnage, à des moments différents de sa vie (même si dans les faits il s’agit de deux continuités différentes).
Metropolis aussi s’inscrit dans cette évolution thématique. La ville, tout en étant en avance sur son temps, voit grandir son côté industriel, tout en respirant une certaine atmosphère de Dépression économique. Ce qui est intéressant dans ce remix, c’est qu’on retrouve finalement un ou deux éléments aperçus ces dernières années (je pense en particulier et surtout à la dynamique entre le Général Lane et Luthor, telle qu’on a pu la voir dans l’arc New Krypton ou dans Secret Origins). Avec, dans le cas de Luthor, une idéologie renouvelée quand à sa défiance envers Superman (il ne le jalouse pas mais le voit comme une contamination). Surtout, la fin nous montre bien à quel point les choses ne vont tomber toutes cuites dans la bouche du héros. Aux dessins, Rags Morales semble opter pour quelque chose de plus épuré (une approche déjà entamée à un degré moindre sur ses First Wave). En tout cas on ne peut très certainement pas l’accuser d’expédier le boulot. Même s’il y a bien, là aussi, une ou deux pages « à trois cases » et une double splash, le résultat final est compact et ne se lit pas en quelques secondes. Globalement, Action Comics #1 affiche un vrai contenu. Ce n’est certes pas le Superman encore en service il y a quelques semaines mais il y a de la verve, une vision et quelque chose qui, oui, pourra séduire les nouveaux lecteurs éventuels sans forcément faire fuir les fans existants. Un début inspiré, qui respecte le contrat du « DCnU » ! Maintenant il est certain qu’on prendra la mesure de ce Superman plus « roots » quand il sera complété par des épisodes se déroulant dans le présent…
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