Trade Paper Box #96: Hollywood Killer

[FRENCH] Vous voulez lire une histoire vitaminée un peu irrévérencieuse, qui fonctionne sur des codes narratifs et des thèmes efficaces et dont le scénario n’est pas trop bien pensant ? Indeez éditions a ce qu’il vous faut, avec ce tome qui vient juste de paraître. On vous prévient tout de suite, les Jordy, Loana et Nabilla n’ont qu’à bien se tenir !

« Everybody comes to Hollywood »

Nous dit Madonna. C’est en tout cas là-bas qu’évolue depuis sa plus tendre enfance un certain Richie Reese. Ancien enfant star, un temps égérie d’une marque de céréales (oui, une star, une vraie.) Notre homme a très mal vécu sa violente retombée dans l’anonymat. Ce « One Hit Wonder », qui n’a comme son titre l’indique qu’un succès à son actif, programmé depuis lors à devenir « quelqu’un » fomente son retour à la lumière depuis l’adolescence. Et Mesdames Messieurs, rendez-vous compte, nous sommes tous conviés à son retour triomphal. Attention, le jeune homme n’a pas prévu de faire dans le raffinement et la dentelle. Richie n’est animé que par son obsession, revenir (ou accéder enfin toute proportion gardée) au « haut de l’affiche », et sa démarche peut être résumée par l’adage : la fin justifie les moyens. Et peu importe ces moyens… le jeune homme choisi éconduit d’un nombre incalculable de castings décide donc pour parvenir à son objectif, de se former afin d’intégrer ni plus ni moins que la mafia locale !

Mafia, pépés et gros calibres…

Sont au programme de ce tome (ça y est, les messieurs sont convaincus  ), inspiré notamment de Scareface dont le personnage se revendique clairement. De l’impressionnante scène d’ouverture à l’ouverture finale vers la suite dans les deux dernières planches, l’action est omniprésente, le rythme soutenu, les rebondissements intéressants. Un héros plus proche du forcené qui exprime ses frustrations par un ultime carnage, que du stratège pathologique à la Dexter, auquel on parvenait davantage à s’attacher (c’est dire.) Une intrigue rocambolesque narrée tambour battant par un duo artistique efficace. Le style très caractéristique d’Ariel Olivetti participe complètement de la dimension inquiétante du personnage principal, surtout lors des scènes de sa jeunesse et de son adolescence. Le petit monstre en herbe se relève en effet tout aussi intéressant que son pendant adulte.

Toute ressemblance avec des situations ayant existé est évidemment fortuite…

Car Hollywood Killer et le scénario de Fabrice Sapolsky, en forçant le trait, et transportant l’action dans le temple des dérives de la notoriété, se penche sur un fait de société bien contemporain. A l’heure de la célébrité à tout prix, il nous parle de ces générations (la mienne, peut être la votre aussi) nées ou presque avec la télé réalité. Et oui alors que nos ainés étaient motivés par la réussite d’une carrière solide, et d’une famille heureuse (oui on caricature), nombre d’entre nous se divertissent quotidiennement avec ces programmes et rêvent prioritairement par extension de buzz et de célébrité éclair. Parce Richie c’est un peu un « Ange de la téléréalité » sous acide, en quête perpétuelle de reconnaissance et qui va mal tourner, par défaut d’attention. C’est aussi un peu Loana sans silicone, qui au lieu de la longue décente aux enfers, trouverait un moyen (loufoque mais on est heureusement dans une fiction) en se radicalisant de dépasser cet état. Bref derrière son pitch de film de gangster, les scènes d’action et les explosions un peu bourrines qui parsèment le volume se cache cette réflexion étonnante sur les excès de notre société. Bon avec ça, vous ne mourrez pas d’envie de prendre des nouvelles du petit garçon égérie des Kinder Chocolat ?

[Anne-Sophie Peyret]

Hollywood Killer, par Fabrice Sapolsky (scenario), et Ariel Olivetti (dessin), Indeez, juin 2013, 56 p.

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